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« En 2019, le marché mondial du textile était en difficultés en raison des conflits entre les États-Unis et la Chine, explique en anglais le directeur général de la Coopérative, Eric Bjergso. Tout le monde avait de grands espoirs que les choses iraient mieux en 2020. Mais quand la COVID-19 est arrivée en mars, ça a frappé beaucoup plus fort que la guerre commerciale. L’industrie a été paralysée complètement, et elle tente toujours de se relever. En période de crise, la nourriture et l’hébergement deviennent des priorités, mais pas les vêtements. Les magasins de vente au détail ont en plus fermé, et c’est là que la chaîne d’approvisionnement a commencé à refouler », confie à La Tribune M. Bjergso.
« La grande question, c’est de savoir quand les choses vont s’améliorer, et ça, personne ne le sait », ajoute-t-il.
Les solutions de rechange à l’exportation se font rares, comme l’explique M. Bjergso, qui vend à l’étranger entre 80 et 90 % de la laine confiée à la coopérative. Sept pays, dont la Chine et les États-Unis, se portent habituellement acquéreurs de ballots canadiens.
« Il n’y a pas grand marchés au Canada. Au fil des années, l’industrie du textile a quitté le pays comme le reste de l’Amérique du Nord, et les fibres synthétiques ont pris la place des fibres naturelles. Il n’y a plus que deux grandes fabriques de textiles au pays qui utilisent de la laine canadienne, l’une en Atlantique et l’autre dans l’Ouest. »
Les Sources cherchent des solutions
L’espoir est est tout de même là, « il y a certainement un mouvement pour l’achat local, on l’entend et on le voit », se console M. Bjergso. Mais il reste de nombreux obstacles avant de pouvoir développer un marché pour la laine à même le pays.
Une problématique à laquelle n’est pas indifférente la MRC des Sources, qui vient tout juste de démarrer un projet au sein de son Carrefour d’innovation sur les matériaux (CIMMS) à cet effet. L’ingénieur junior Bastien Ouellet se consacre depuis le mois dernier à préparer le terrain afin d’approfondir certains débouchés autres que le textile pour la laine, comme l’isolation, la filtration, le rembourrage, les matériaux composites et autres surprenantes utilités.
« Ce qu’on veut au CIMMS, c’est de créer un écosystème qui travaille autour de la laine canadienne, localement. On veut lancer des projets-pilotes, c’est-à-dire qu’on veut décider de produits en partenariats avec des industries et faire de la fabrication à plus petite échelle. Ensuite, elles peuvent installer une usine après avoir eu le temps de valider leur produit. »
Une recherche qui est surtout motivée, à la base, par les trop bas revenus que tirent les producteurs pour cette fibre. Rappelons que pour la grande majorité d’entre eux, c’est plutôt la vente de viande qui sert de gagne-pain. En 2019, une livre de laine se vendait entre 20 et 60 cents. Chaque mouton produit entre 5 et 7 livres par tonte.
« Au Canada, la manière dont la laine est produite n’est pas adaptée pour l’industrie du textile. La qualité n’est pas assez bonne, mais ils ont de la difficulté à avoir de bons prix pour la laine. Alors j’ai l’impression que ça crée une sorte de spirale négative où ils vont choisir des races moins difficiles à gérer, mais qui ne produiront pas nécessairement de la bonne laine. Il y a aussi les difficultés de l’hiver, qui font qu’il y a beaucoup de foin qui contamine la laine en les gardant à l’intérieur », explique M. Ouellet.

Autre grand obstacle identifié par MM. Ouellet et Bjergso: les infrastructures nécessaires pour nettoyer la laine en question sont inexistantes au pays, et représentent de grands investissements. D’autant plus que le Canada demeure un joueur de petite échelle avec son million de bêtes, comparativement à la Nouvelle-Zélande et ses 27 millions de moutons.
La mise sur pied d’une ligne de lavage et de conditionnement fera donc partie des premiers pas de cet organisme aux grandes ambitions.