L’agression sexuelle pour laquelle l’enseignant a plaidé coupable au palais de justice de Sherbrooke vendredi a été commise une nuit de juillet 2022. Leblanc s’est alors présenté avec une amie à une fête. Comme l’accusé n’était plus en état de conduire, les deux personnes ont demandé à l’hôte la permission de dormir sur place, ce qui a été accepté. Or, seulement un lit était disponible pour les deux.
« Ils s’entendent pour dormir dans le même lit, en autant que chacun respecte son côté », a relaté l’avocate de Leblanc, Me Léa Perron.
La plaignante s’est couchée avant l’accusé. « Plus tard, il va monter et se coucher de son côté. À ce moment, c’est flou dans la tête de M. Leblanc en raison de son état d’intoxication avancé. Il se souvient qu’un moment donné, il va se retourner et se rendre compte que sa main est au niveau de la poitrine de [la plaignante] », a expliqué au tribunal Me Perron, indiquant que son client n’a « pas été en mesure de prendre les mesures raisonnables pour s’assurer du consentement de [la victime] ».
La procureure aux poursuites criminelles et pénales Me Véronick Harvey a cependant précisé que la plaignante, dont l’identité est protégée en vertu d’une ordonnance de non-publication, a senti la main de son agresseur lui toucher la poitrine, le ventre et qu’il a tenté de mettre sa main dans son pantalon.
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Pour donner sa sentence, le juge Benoit Gagnon a pris en compte la profession de l’accusé. « Il est enseignant à temps plein au secondaire, il est très impliqué et fait de l’aide aux devoirs. Il est entraîneur au soccer », a énuméré l’avocate de Leblanc.
« Vous avez un avenir plus radieux que celui de vous présenter devant le tribunal, a pour sa part indiqué le juge. On a besoin, comme société, de professeur. Ce n’est donc pas à moi de jouer les autorités à savoir si vous êtes un bon professeur ou non. Je laisse ça aux autorités scolaires », a-t-il commenté avant d’entériner la suggestion commune de la défense et de la Couronne.
La plaignante, elle, ne s’est pas adressée au Tribunal vendredi. « Elle ne souhaite pas que [Leblanc] ait des conséquences à plus long terme, elle veut qu’il comprenne que ç'a eu des impacts sur elle et elle ne veut pas qu’il reproduise ces actions avec personne d’autre. Mais elle veut qu’il puisse avoir une certaine chance de se reprendre et continuer son travail en enseignement », a décrit Me Harvey.
Retiré
En entrevue téléphonique avec La Tribune vendredi après-midi, le secrétaire général et directeur du Service des communications au Centre de services scolaires de la Région-de-Sherbrooke (CSSRS), Donald Landry, a confirmé que Leblanc a été retiré de ses fonctions d’enseignant et de bénévole pour une période indéterminée.
« On va le retirer du travail le temps de prendre connaissance de toute la situation et de prendre nos décisions. »
— Donald Landry
Le CSSRS ne connaissait pas la situation judiciaire de son employé. « Quand on est dans une situation qui concerne les élèves, des mineurs ou l’école, nous sommes toujours en lien avec les policiers. Comme sa situation ne concerne pas d’élèves ou de mineurs, on n’était pas en lien avec les policiers, donc cette situation est différente », a affirmé le directeur, qui prendra connaissance des documents publics et du jugement.
La Tribune a tenté en vain de rejoindre le Syndicat de l’enseignement de l’Estrie, dimanche, pour discuter de sa position sur le dossier.
Problème sociétal
Le geste qu’a posé Leblanc est inacceptable, croit le juge Gagnon. « Je dois vous avouer que d’agresser sexuellement une partenaire, une amie, dans les circonstances qu’on m’a décrites, c’est un geste particulièrement grave, a-t-il assuré. De toucher à la poitrine, au ventre, une amie intoxiquée, que vous le soyez ou non, pour moi, ç'a peu d’importance. »
Et cette agression fait partie d’un problème sociétal, selon lui. « La plaignante n’a pas à se savoir à risque. Et c’est un peu le problème dans notre société. Toute femme peut se retrouver à risque de se faire agresser par un ami alors qu’elle est en état d’ébriété. Ça ne peut pas se passer comme ça dans une société évoluée comme la nôtre! » a scandé le juge Gagnon, estimant que « notre société est basée sur l’égalité entre les genres ».
Le juge admet qu’il « existe des gestes plus graves en matière d’agression sexuelle ». « Je le conçois, mais pour la victime, ce jour-là, c’était un geste qui était assez grave pour qu’elle ressente le besoin de porter plainte », dit-il, saluant le « parcours de combattant » des victimes.
Le magistrat veut envoyer un message aux autres jeunes hommes qui pourraient se retrouver couchés dans le même lit qu’une amie. « S’ils commettent l’irréparable, ils auront des conséquences importantes », a-t-il averti.
Conditions
Leblanc devra respecter plusieurs conditions durant ses deux ans de probation. Il devra entre autres effectuer des suivis en ce qui a trait à sa toxicomanie, ne pourra pas contacter la victime, devra effectuer un quantum de 120 heures de travaux communautaires et donner 1800$ au Centre d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC).
Il a déjà effectué plusieurs heures de travaux communautaires à son école dans la dernière année, pendant que son dossier était pendant. Le CSSRS, lui, ne connaît pas les motifs des enseignants qui font du bénévolat.
Il devra également être inscrit au Registre des délinquants sexuels pour 10 ans.
Par ailleurs, « du soutien psychologique sera offert pour les élèves ou les membres du personnel qui en auraient besoin », confirme le CSSRS dans une lettre qui sera adressée aux parents.