Sous un voile de smog, Sherbrooke s’enrage pour le climat

La Grande marche pour le climat de Sherbrooke a clos la semaine de la Rage climatique, qui a organisé des activités partout à travers la province.

Alors que le ciel sherbrookois affichait un smog représentatif de la qualité de l’air avec laquelle la ville a dû composer fréquemment cet été, quelques centaines de citoyens ont pris la rue, vendredi après-midi. Cette grande manifestation se voulait non seulement un appel à l’action climatique, mais aussi un rappel de la justice sociale qui devra gouverner les prochaines décisions en ce sens.


« Les populations vulnérables, dont les personnes à faible revenu, sont déjà en train de subir les conséquences de la crise. La crise climatique met en danger nos droits sociaux, économiques et culturels. On parle de conditions de travail de plus en plus difficiles dans les milieux agricoles, forestiers et industriels. On parle de chaleurs extrêmes, d’inondation, de pollution de l’air, d’îlots de chaleur, d’insécurité alimentaire et de logements insalubres », a prononcé au micro Nellie Quane-Arsenault d’Illusion Emploi Estrie, en interpellant directement le gouvernement Legault et son « parti politique qui ne fait rien et qui ne nous écoute pas ».

Nellie Quane-Arsenault

Deux demandes précises ont été scandées dans le cadre de cette action organisée par le Comité unitaire estrien pour l’environnement, et qui se déroule chaque année à la fin septembre. La première est de bannir les énergies fossiles d’ici 2030, autant en termes de production, de transformation, d’exportation que d’importation tout en assurant d’une transition juste et inclusive.

La Grande marche pour le climat (Vidéaste: Jean Roy Journaliste: Jasmine Rondeau)

On demande également de taxer massivement la richesse et de réinvestir dans le filet social, « afin d’assurer des conditions de vie décentes pour toutes et tous ».

Avec et pour la famille

Toutes les générations étaient représentées.

Dans la foule, Luc Junior Bélisle et Patricia Larcher sont venus s’exprimer haut et fort avec leur petite Maxime. « C’est important en tant que citoyen et citoyenne de profiter de l’opportunité de parler quand on a des choses à dire, croit Mme Larcher, qui étudie en environnement à l’Université de Sherbrooke. J’ai une enfant de 4 ans qui va probablement être vivante longtemps, je l’espère, et si elle se rend jusqu’à 70 ans, ça m’inquiète. J’étudie en science et je le vois bien qu’on s’en va vraiment vers un avenir très peu prometteur. On met le poids sur les citoyens et citoyennes.... c’est vrai que c’est important les actions individuelles, mais il est temps qu’il se passe quelque chose dans le politique. »

« Ma grande de 17 ans me dit “est-ce que je vais pouvoir avoir des enfants ? ” Ça, ça rentre dedans en tant que parent », ajoute M. Bélisle.

La jeunesse en a assez

L’association étudiante du Cégep de Sherbrooke a fait partie de la fête en grand nombre. Leur porte-parole, Alice Rodriguez-Doutreloux, affirme constater une mobilisation environnementale « exponentielle » de la part de la communauté étudiante, qui se relève tranquillement de la pandémie. « On a espoir. Mais on est aussi frustrés et on est tannés. Ça se voit, quand notre génération met ses efforts là-dedans. On a beaucoup de jeunes qui sortent du secondaire et ils en connaissent beaucoup, déjà. On suit le mouvement du Printemps érable et on s’en sert comme référence pour savoir comment faire pour avoir une grande mobilisation. »

Au niveau politique, celle-ci réclame que le Canada se montre plus ferme avec les grandes compagnies productrices de gaz à effet de serre. « À Sherbrooke, on aimerait aussi que le transport en commun soit meilleur et qu’il y ait plus d’espaces piétonniers. »

Un certain vent de mobilisation se fait sentir dans les communautés étudiantes.

Deux classes du Salésien se sont aussi déplacées pour l’occasion, dans le cadre de leur cours de science. Pour Alice Santerre-Vallerand et Emma Gagnon, élèves de quatrième secondaire, il s’agissait d’une première expérience de mobilisation climatique. « Je trouve ça vraiment intéressant. J’aime ça voir toutes les idées écrites sur les pancartes, ça m’inspire beaucoup et j’aimerais ça revenir », lance Emma.

« Pour moi, vu qu’on a pas l’âge de voter, ce que je trouve plus difficile, c’est de ne pas pouvoir changer les choses et voter pour les gens qu’on pense qui peuvent le faire », ajoute Alice. Même chose pour Emma, qui aimerait beaucoup faire sa part de différence, mais qui dit ignorer par où commencer.

Les femmes s’en mêlent

Le Centre de femmes de Memphrémagog a attiré l'attention.

Représentantes d’une autre génération, un groupe du Centre de femmes Memphrémagog a attiré l’attention avec ses écriteaux à saveur écoféministe. Karianne Sauvé, animatrice et intervenante au centre, martèle qu’il existe de grands liens entre la condition féminine et la catastrophe climatique. « Quand l’environnement se dégrade, les conditions des femmes aussi, dénonce-t-elle. C’est sur qu’à l’international, ça se fait plus sentir, mais au Québec, c’est beaucoup la charge mentale des femmes qui est augmentée avec le zéro déchet, les couches lavables, l’achat en vrac, etc. Aussi, souvent, les femmes n’ont pas été impliquées dans les processus décisionnels, alors qu’elles sont toujours plus portées à la protection de l’environnement. »

Mères au front mise également sur l'écoféminisme pour faire changer les choses.

Cette manifestation, qui a semblé rassembler moins de citoyens que dans les années précédentes, a clos de la semaine de la Rage climatique déployée à travers la province.

Depuis le parc Jacques-Cartier, le cortège a progressé par la rue King jusqu’à l’hôtel de ville de Sherbrooke, où celle-ci s’est conclue avec un spectacle du groupe Paire de manches. Plus tôt, l’événement avait également été lancé par un spectacle du violoniste Manolo Grégoire.

Le Comité unitaire estrien pour l’environnement est coordonné par Solidarité populaire Estrie.