« Les écarts sont plus importants dans les MRC de périphéries en Estrie parce que le point de comparaison est Sherbrooke, qui est une ville avec un profil de scolarité plus imposant par rapport à des MRC plus éloignées », constate Pierre Langlois, économiste et réalisateur de l’étude.
« C’est dans la fréquentation collégiale qu’on est capable d’aller chercher de grands gains en littératie. C’est pour ça qu’on s’est concentré sur les MRC où l’offre collégiale n’est pas complète ou absente », indique M. Langlois.
L’économiste souligne que la ville de Sherbrooke est un point de comparaison solide, en raison de son centre universitaire. L’étude se penche sur les parcours scolaires des adolescents au 2e cycle du secondaire et des jeunes travailleurs de moins de 25 ans. Au total, 39 MRC ne sont pas desservies par de l’enseignement collégial au Québec.
En Estrie, cinq MRC ont été analysées selon la proportion de personnes qui terminent leur secondaire, qui ont terminé des études professionnelles et les diplômés collégiaux. Dans la MRC de Coaticook, où le cégep le plus près se situe à Sherbrooke, un écart de scolarité de 12 % est observable avec Sherbrooke. La quasi-totalité des 39 MRC sans offre collégiale affiche un profil scolaire plus faible que leur voisine qui en possède, à l’exception de la MRC de Brome-Missisquoi, qui elle est affiche un taux de scolarité supérieure à la MRC de Haute-Yamaska, qui possède un cégep.
« Ça s’explique par le fait qu’il y a eu une explosion immobilière et les gens de l’extérieur sont venus s’installer », souligne Pierre Langlois.
Selon lui, l’offre inégale quant à l’enseignement collégial entre les MRC fait en sorte que des parcours scolaires différents sont pris par les élèves du secondaire. Ceux-ci choisiront dans une plus grande proportion de ne pas poursuivre d’études postsecondaires ou seront plus nombreux à opter pour la formation professionnelle si l’établissement collégial n’est pas à proximité.
La province de Québec est plus faible que ses voisines
Il y a actuellement plus de personnes sans diplôme au Québec que dans les provinces voisines. L’économiste explique cet écart par les parcours scolaires différents qu’offrent les autres provinces. En Ontario et au Nouveau-Brunswick, la fréquentation scolaire est obligatoire jusqu’à 18 ans, tandis qu’au Québec, c’est 16 ans. Les taux de réussite scolaire sont en moyenne de plus de 90 % en Ontario et au Nouveau-Brunswick, contre 80 % au Québec.
« Il faut garder en tête que ces jeunes qui diplôment de façon plus importante au Nouveau-Brunswick et en Ontario font une année de plus. Il y a une douzième année, pour l’équivalent d’un secondaire 6. Ici, un jeune en secondaire 4 qui éprouve des difficultés, on va peut-être le pousser a prendre le chemin du professionnel, alors qu’en Ontario et au Nouveau-Brunswick, il va rester au secondaire jusqu’à 18 ans », explique M. Langlois.
Des pistes de solutions
Deux solutions sont proposées pour contrer l’écart de littératie observable au Québec D’une part, compléter le réseau des centres d’études collégiales (CEC). Le réseau des cégeps prévoit ouvrir des CEC sur l’ensemble des territoires du Québec.
« Il y en a un a Mégantic. C’est un excellent modèle, c’est un peu le modèle des “mini-cégeps”. [...] Compléter ce réseau-là manifestement donne des résultats », explique M. Langlois.
D’une autre part, M. Langlois propose d’accompagner davantage les jeunes qui prennent le cheminement des études professionnelles.
« Souvent, le jeune à 16 ans peut aller au professionnel. Il s’inscrit dans un parcours ou une discipline très technique, donc c’est sûr que l’enseignement de la littératie il n’en a plus. Alors que d’autres provinces, telles que le Nouveau-Brunswick et l’Ontario, accompagnent de façon plus prononcée les élèves qui vont au professionnel et au technique » souligne Pierre Langlois.
Il souhaite que les écarts de scolarité entre les différentes MRC soient davantage réduits. Dans un monde utopique, que l’ensemble des Québécois possèderaient minimalement un diplôme d’études collégiales.
« Pour justement que ce ne soit pas notre lieu de résidence ou notre lieu d’étude qui définisse notre parcours scolaire. Ce c’est pas parce que quelqu’un naît dans le Haut-Saint-François que son parcours scolaire doit être influencé par la région. Il doit avoir accès comme un autre qui est né à Sherbrooke au même réseau et au même parcours collégial », conclut-il.