Même si, lors des discussions, ils ont déposé un amendement visant à repousser de six mois la démarche, celui-ci a été rejeté. Au terme d’un long débat, tous les élus de Sherbrooke Citoyen, Claude Charron et Christelle Lefèvre ont voté pour l’adoption du plan, alors qu’Annie Godbout, Danielle Berthold, Hélène Dauphinais, Nancy Robichaud et Paul Gingues s’y sont opposés.
Dans un communiqué paru plus tôt dans la journée, ils qualifiaient la cible de 45 % de protection des milieux naturels incluse dans le Plan nature comme « très ambitieu[se] », mais en même temps « irréaliste ».
« Nous sommes d’accord avec la protection de milieux boisés, mais pas sur 45 % de notre territoire. Probablement même pas à 30 %, qui est la nouvelle norme internationale, car nous sommes un milieu urbanisé, qui vise l’installation de citoyens, que ce soit pour le travail ou les études », a ainsi argumenté Hélène Dauphinais.
Mme Berthold a finalement voté contre l’amendement, disant vouloir aller de l’avant avec le règlement de contrôle intérimaire, qui vient freiner temporairement le développement dans les zones identifiées pour la conservation. Elle demeure cependant contre le processus ayant mené à l’adoption du Plan nature, disant avoir eu l’impression de « travailler en catimini ».
Report de six mois
Les indépendants ont insisté sur l’importance de prendre le temps de tenir des consultations auprès de la population, d’où leur demande de délai de six mois. Compte tenu des « impacts majeurs » qu’aurait le Plan nature, il faut en effet mieux écouter les citoyens et « les parties prenantes », ont-ils exprimé.
Les élus dissidents ont assuré être en accord avec la protection des milieux naturels et se sont montré irrités que les élus de Sherbrooke Citoyen tentent selon eux de les faire « passer pour des gens pour qui l’environnement, ce n’est pas important », a jugé l’indépendante Annie Godbout.
« Ce projet [doit être] porté par l’ensemble des Sherbrookoises et des Sherbrookois, et non seulement par une formation politique », a-t-elle écrit.
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La conseillère Nancy Robichaud a aussi plaidé pour la nécessité d’atteindre l’acceptabilité sociale dans ce dossier. « C’est ce que nous demandons à nos promoteurs, alors il faudrait commencer par montrer l’exemple. […] Si les gens veulent 45 % [de cible de protection], tant mieux, ce sera un vrai choix citoyen, un vrai choix de société », a-t-elle observé.
Pour la mairesse Évelyne Beaudin, « aller en bas de ça [45 %], ce n’est pas recommandé par la science », a-t-elle répondu en séance, un argument repris par plusieurs élues mardi soir pour témoigner de l’objectivité et de la rigueur de la démarche.
La conseillère Geneviève La Roche a pour sa part parlé d’un « pas de géant » et d’un « geste fort et signifiant » qui pourrait paver la voie à la création d’un « nouveau parc » dans un horizon de cinq ans du côté du boisé Ascot-Lennox, un projet qui lui est cher.
« Il faut prendre des décisions fortes avant qu’il ne soit trop tard » a de son côté exprimé l’indépendante Christelle Lefèvre, évoquant aussi l’ampleur de la crise climatique.
Études environnementales… et économiques?
Les indépendants avaient toutefois un autre grand absent à déplorer autour du Plan nature : l’angle économique. « J’ai vu des études rigoureuses au niveau de l’environnement, mais rien au niveau économique », a soulevé Paul Gingues.
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Ses collègues et lui s’inquiètent particulièrement des contraintes supplémentaires imposées au développement immobilier, qui provoqueront inévitablement un effet de rareté des logements en période de crise, selon eux. « On ne peut pas regarder le dossier avec une seule lunette [celle environnementale] », a ainsi averti Mme Godbout, évoquant aussi les besoins criants en habitation.
Les sommes nécessaires pour la mise en place du plan d’action, incluant les acquisitions de terrain, ne sont pas non plus définies, ont déploré quelques élus.
Paul Gingues a carrément jugé qu’il s’agissait d’une « intrusion relativement agressive au droit de propriété » qui ouvrait donc la porte à des poursuites. Évoquant des précédents à Montréal, Hélène Dauphinais s’inquiète que Sherbrooke finisse par « s’enliser dans des procès sans fin qui vontnous coûter les yeux de la tête juste pour nous défendre ».
Sur ce point, la mairesse a balayé l’argument du revers de la main en répondant que « les menaces de poursuites, ça ne devrait pas nous freiner de faire ce qui est nécessaire, ce qui est juste », reconnaissant malgré tout que le risque zéro n’existe pas. Un accompagnement juridique a néanmoins été assuré tout au long du processus, a-t-elle assuré.
À l’inverse, les opposants au Plan nature « minimisent cruellement les risques associés au statu quo », a-t-elle exprimé, une posture aussi avancée plus tôt par la conseillère Laure Letarte-Lavoie, pour qui l’inaction coûtera « ô combien plus cher » que la mise en œuvre des mesures du Plan nature.
« Le fardeau de la preuve, il est à ceux qui défendent le statu quo, qui défendent l’immobilisme, alors que tout autour de nous nous crie qu’il faut agir », a ajouté la mairesse.
Il fallait par ailleurs agir maintenant pour adopter le plan parce qu’un report, même de six mois, viendrait mettre à risque de disparition des milieux naturels, a par ailleurs fait remarquer Mme La Roche.