L’un de ces dossiers ayant suscité les critiques a été l’environnement. En réponse à la loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act) adoptée par le gouvernement américain en août dernier, qui comprend des dépenses d’environ 360 milliards sur 10 ans pour des crédits d’impôt pour capter et réduire les émissions de gaz à effet de serre, entre autres, le gouvernement du Canada s’est doté de mesures pour promouvoir l’économie verte.
Ottawa ira donc d’investissements de 80 G$ sur dix ans, qui comprennent notamment 26 G$ pour un crédit d’impôt remboursable de 15% pour les investissements en « électricité propre » et 11 G$ pour un autre crédit d’impôt remboursable, celui-ci atteignant 30% et visant les investissements dans la fabrication de technologies propres.
Pour Pascal Florant, co-coordonnateur de Solidarité populaire Estrie, cette approche n’a que pour seule bénéficiaire l’économie, alors que le gouvernement devrait, selon lui, s’attaquer directement et frontalement aux changements climatiques.
« Partout où on lisait, il n’y avait pas de mesures de réduction ou de plafonnement des gaz à effet de serre. On est encore dans une logique de croissance. Il faut commencer à se poser la question à savoir si on produit trop, si on consomme trop et si on peut faire quelque chose pour remédier à ça », indique-t-il en marge d’une écoute collective du budget tenue mardi à Sherbrooke.
« L’extraction de lithium pour les voitures électriques bénéficiera du crédit d’impôt de 30%, mais ce n’est pas une mesure verte : ce n’est pas viable à long terme, continue M. Florant. L’exploitation des mines de lithium, c’est désastreux, et le transport solo, même électrique, amène sa part de problèmes écologiques. »
Même son de cloche pour le secrétaire général du Conseil central des syndicats nationaux de l’Estrie - CSN, Steve McKay, qui, sans complètement rejeter les investissements en économie verte du gouvernement, se questionne à savoir si « ce sont véritablement des mesures qui vont améliorer le bilan environnemental ou si c’est du greenwashing ».
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Des mesures qui plaisent
Le budget fédéral prévoit 13 G$ sur cinq ans et 4,4 G$ pour les années subséquentes pour l’implantation d’un Régime canadien de soins dentaires. Ce régime s’adressera à tous ceux qui n’ont pas d’assurance et qui ont un revenu annuel inférieur à 90 000$, alors qu’en ce moment seul les enfants y ont accès.
« En 2016, 27% des adultes s’étaient déjà privés de soins dentaires. Malgré les coûts importants que ça engrange, pour nous ce régime est une bonne nouvelle, car d’avoir un système de santé où tu peux te faire soigner gratuitement partout, sauf dans la bouche, ça n’a pas de sens », note la coordonnatrice de l’Association coopérative d’économie familiale de l’Estrie, Sylvie Bonin.
Plusieurs de ses collègues du communautaire, dont Rosalie Dupont de la Table d’action contre l’appauvrissement de l’Estrie, ont abondé dans le même sens, cette dernière signifiant toutefois qu’elle aurait aimé voir des mesures pour les soins oculaires et l’assurance-médicaments.
Autrement, le chèque unique de crédit de TPS pour les personnes à faible revenu, nommé par le gouvernement « remboursement pour l’épicerie » et allant jusqu’à 467$ pour un couple avec deux enfants admissibles et jusqu’à 234$ pour les personnes seules sans enfant, a aussi été bien accueilli en Estrie.
« C’est une bonne nouvelle. On est assez en faveur que, quand l’inflation est haute, il y ait une aide ciblée pour les personnes avec moins de moyens », souligne Mme Bonin.
Ainsi, ce budget, remarque M. Florant, présente « beaucoup de petites choses » pour la « justice fiscale , par exemple « une réforme de l’impôt minimum de remplacement » qui, selon la Chaire en fiscalité et finances publiques de l’Université de Sherbrooke, « vise à réduire la proportion de particuliers à revenus élevés ayant recours à certains avantages fiscaux leur permettant de payer peu ou pas d’impôt ». Celui-ci verra son taux augmenter de 15% à 20,5%, ce qui générerait « des recettes estimées à [3 G$] sur cinq ans, à compter de l’année d’imposition 2024 », lit-on dans le budget.