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Perte de services dans nos établissements de santé, l’histoire se répète

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CHRONIQUE / L’annonce récente par le CIUSSS de la fermeture définitive en mai du troisième étage de l’hôpital de Granby, qui abrite notamment le département de gériatrie, rappelle de douloureux souvenirs pour tous ceux et celles, qui comme moi, ont œuvré ou œuvrent encore au comité de vigie santé et services sociaux Memphrémagog (CVSSSM).


Le comité de vigie santé services sociaux Memphrémagog est formé d’une trentaine de personnes issues du milieu communautaire, de personnels en soins de santé, de représentant-es d’organismes locaux, de citoyennes et citoyens et des représentantes et représentants des villes de Magog, Stanstead et Potton et de la MRC Memphrémagog. Ce comité, interlocuteur privilégié avec le CIUSSS, a été source d’inspiration pour plusieurs régions du Québec.

Au moment de la fermeture du service de gériatrie courte durée à Magog, on pouvait mettre cela sur le dos de la réforme de 2015 dans le réseau de la santé et du manque de médecins spécialisés. D’un point de vue purement théorique, le fait de centraliser les services de gériatrie au même endroit, à Sherbrooke, pouvait avoir du sens.



Qu’en est-il du côté humain? Pourquoi faire déplacer les familles et les aidants naturels au lieu de quelques médecins? Selon les représentants du CIUSSS qui tenaient une soirée d’information à Magog le 8 mars, la philosophie tend à changer avec une volonté de rapprocher les services des patients.

Déjà à l’époque, les membres du comité de vigie, qui inclut des médecins, affirmaient qu’avant de prendre de telles décisions, il serait important de consulter toutes les parties prenantes. Les solutions peuvent venir de l’interne, surtout si on se permet de réfléchir un peu à l’extérieur de la boîte. Un tour de force que le comité de vigie, porté par des bénévoles, a réussi à quelques reprises. Entre autres lors de l’annonce de la fermeture d’un GMF à Magog. D’ailleurs, il faudrait revoir le cadre des GMF, qui est invivable.

Une lueur d’espoir, la gestion de proximité

Pratiquement au même moment où le CIUSSS fait cette annonce qui crée une onde de choc à Granby, une annonce plus encourageante se fait dans la MRC Memphrémagog.

L’entrée en poste d’une coordonnatrice opérationnelle locale dans l’établissement de Magog, dont le mandat est de voir à l’harmonisation des services en place au sein du réseau local de services (RLS), c’est un premier pas vers le retour à une gestion de proximité et une gouvernance locale réclamées depuis la création du comité de vigie.



Comment est-ce possible? Grâce à la mobilisation citoyenne, la persévérance des membres du comité ainsi que l’ouverture de la haute direction du CIUSSS.

Espérons que cette personne aura les coudées franches pour faire une différence dans l’établissement! En plus de permettre plus d’agilité dans certaines situations comme le débordement des urgences, peut-être qu’elle pourra optimiser à nouveau l’utilisation de la salle d’opération, ramener des services perdus et peut-être travailler plus étroitement avec la fondation locale.

Selon moi, la gouvernance locale passe également par une voix et un véritable pouvoir au conseil d’administration. À quand une représentativité territoriale au conseil d’administration du CIUSSS de l’Estrie CHUS ?

Problème de communication?

Ceux et celles qui semblent être les plus surpris par l’annonce à Granby sont les employés, la première ligne, nos anges gardiens! Je vous rappelle que tout ceci se passe dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre dans le réseau, plusieurs ayant fui, et malgré les incitatifs du gouvernement, ne veulent pas revenir.

Cela me rappelle ma rencontre avec les représentants de la FIQ lors de la campagne provinciale. Certes les syndicats ont un rôle à jouer pour défendre les intérêts de leurs membres, mais ils ont également le pouls du terrain et plusieurs pistes de solutions. La FIQ proposait trois mesures qui ont du sens : une loi sur les ratios sécuritaires suite à un projet pilote concluant, la fin au temps supplémentaire obligatoire ainsi que l’uniformisation des actes.

Comme les conseils d’administration locaux ont été abolis, il y a beaucoup moins d’implication de la société civile, et je crois donc que chaque établissement devra se doter d’un forum citoyen pour appuyer le conseil d’administration et agir à la fois comme chien de garde et interlocuteur privilégié, comme c’est le cas avec le CVSSSM. C’est un début et ça donne des résultats!



Comment être attractif et développer un sentiment d’appartenance dans le contexte de ces mégas structures impersonnelles? Si nous n’améliorons pas les conditions de travail, toutes les autres mesures ne seront pas efficaces!

Chercher des coupables ou des solutions?

Les coupures à Granby et ailleurs, les points de service en milieu rural qui luttent pour leur survie, les listes d’attente qui s’allongent, les débordements des urgences, le manque de lits, l’épuisement professionnel, c’est de la faute à qui?

Est-ce la réforme, la pénurie de main-d’œuvre, la pandémie, le lobby des médecins, les demandes du personnel soignant, le manque d’écoute du gouvernement ou autre chose ?

On semble souvent plus pressé de pointer du doigt le ou les coupables que de trouver des solutions.

Les propos tenus par le PDG du CIUSSS et la PDG adjointe lors de la soirée d’information sont tout de même encourageants et laissent entrevoir des pistes de solutions. Ils ont une image très claire des problématiques et ne se découragent pas devant l’ampleur de la tâche.

Au lieu d’attendre que le gouvernement règle les problèmes, ils mettent en place des solutions à petite échelle qui semblent faire une différence. En travaillant ensemble, avec l’ensemble des parties prenantes, incluant les organismes communautaires, nous pouvons améliorer de façon considérable la prestation de service.

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