Sherbrooke cible 84 km de routes locales à réparer; la moitié des 183 km nécessaires

Il faudrait 70 M$ pour réparer les rues locales les plus prioritaires identifiées par le service des infrastructures urbaines de la Ville de Sherbrooke, mais seuls 3,2 M$ y ont été consacrés au plus récent budget.

Il faudrait 70 M$ pour réparer les rues locales les plus prioritaires identifiées par le service des infrastructures urbaines de la Ville de Sherbrooke, mais seuls 3,2 M$ y ont été consacrés au plus récent budget.


Issu d’une nouvelle méthode de priorisation, ce nouveau portrait cible pourtant les interventions les plus nécessaires, soit 84 kilomètres sur l’ensemble des 635 kilomètres de routes locales asphaltées. La sélection est cependant encore plus restreinte que les 183 km qui « nécessitent une intervention immédiate », révèle la plus récente analyse du service des infrastructures urbaines.

En plus des critères déjà établis comme le risque de sécurité, le confort de roulement, l’état de la surface et le risque de mobilité, on a voulu renforcer l’importance accordée à la dégradation réelle constatée dans les rues en rajoutant un critère à cet effet, a expliqué mardi à l’hôtel de ville Patrice Grondin, chef de la division de l’ingénierie au service des infrastructures urbaines.

En plus des critères déjà établis comme le risque de sécurité, le confort de roulement, l’état de la surface et le risque de mobilité, on a voulu renforcer l’importance accordée à la dégradation réelle constatée dans les rues en rajoutant un critère à cet effet.

Les propositions de rues à sélectionner pour réfection dans les trois prochaines années seront ensuite présentées en arrondissement pour recevoir l’approbation des élus. Celles qui se verront décerner un peu du budget devront donc se retrouver parmi celles identifiées comme prioritaires.

Quand son tour ne vient jamais…

M. Grondin a reconnu que la nouvelle méthode permet d’intégrer des rues à la « chaussée fortement dégradée » qui autrement n’auraient jamais été priorisées. C’est précisément ce que soulevait l’an dernier le conseiller Paul Gingues en donnant l’exemple de la « situation catastrophique » sur Albéric-Dussault, a-t-il tenu à rappeler ce mardi.

Il a également lancé un appel clair à investir davantage dans les rues locales lors du prochain exercice budgétaire, jugeant « ridicules » les sommes prévues pour les trois prochaines années. Après une moyenne de 7 M$ par année entre 2020 et 2022, le réseau local ne reçoit plus que 3,2 M$ en 2023 et la tendance est semblable pour les deux années suivantes, a en effet informé M. Grondin. Un « recul », a aussi commenté l’élue Hélène Dauphinais.

Le conseiller Paul Gingues.

Le chef de la vision de l’ingénierie a évalué qu’il faudrait pourtant mettre au moins 10 M$ supplémentaires [dans tout le réseau, pas uniquement le local] pour arriver à un maintien des actifs. « On creuse notre déficit, encore », a établi Patrice Grondin en parlant du rythme d’investissement actuel. À cette vitesse, il faudrait au moins 20 ans pour réparer les routes identifiées comme prioritaires, a évalué Caroline Gravel, directrice du service des infrastructures urbaines.

À prendre avec un grain de sel

La mairesse Évelyne Beaudin a réagi en rappelant qu’il ne s’agit que d’un seul élément parmi tous les actifs municipaux. « Ça fait quarante ans qu’on la creuse notre tombe », a-t-elle imagé en parlant du déficit d’entretien global. « [Les rues locales], c’est juste un petit morceau dans l’océan de problèmes qu’on a en matière de gestion d’actifs », a-t-elle commenté.

Invitée à préciser si les investissements dans le réseau local resteraient à la même hauteur dans les prochaines années, la mairesse a convenu que la stratégie visée actuellement est de « maximiser les programmes de subventions ». Les rues locales ne sont par contre pas couvertes par les aides financières des autres paliers de gouvernement.

La mairesse Évelyne Beaudin a réagi en rappelant qu’il ne s’agit que d’un seul élément parmi tous les actifs municipaux.

Revenant sur le montant de 3,2 M$ accordé au budget 2023, elle a aussi indiqué que « ces chiffres-là sont à prendre avec un gros, gros grain de sel » parce qu’il ne s’agit que d’une seule ligne du budget. Les projets de réfection d’aqueduc et d’égouts, par exemple, impliquent aussi d’autres investissement et entraînent évidemment une réfection de la chaussée.

Tout en se refusant à augmenter les taxes au-delà du 3 % convenu, Mme Beaudin constate néanmoins que « la charge fiscale actuelle ne permet pas de prendre soin des rues ».

Les rues, un « gouffre financier »

La conseillère Laure Letarte-Lavoie est allée plus loin en jugeant illogique « d’investir dans l’asphalte, dans l’automobile » dans un contexte d’urgence climatique, d’autant plus qu’il s’agit d’un « gouffre financier », a-t-elle affirmé.

La mairesse et elle ont également avancé l’idée de ne pas réasphalter systématiquement les rues arrivées en fin de vie, par exemple les routes rurales, dans l’idée de réduire nos actifs.

La conseillère Laure Letarte-Lavoie est allée plus loin en jugeant illogique « d’investir dans l’asphalte, dans l’automobile » dans un contexte d’urgence climatique.

Nancy Robichaud, élue du district du Lac-Magog, a de son côté dénoncé un « écart assez faramineux sur l’état des chaussées entre les arrondissements », constatant, chiffres à l’appui, que le sien [Brompton-Rock Forest-Saint-Élie-Deauville] est définitivement le pire. Elle appelait ainsi à plus d’équité.

Le conseiller Marc Denault a pour sa part soulevé que l’outil de priorisation était particulièrement utile pour faire en sorte que les réfections de rues ne soient pas une décision politique. « Le choix politique, c’est le montant qu’on y donne », a-t-il néanmoins ajouté.

La mairesse Beaudin a toutefois insisté pour accorder une plus grande indépendance aux élus dans le choix des interventions. « Des fois, ça va trop loin et ça attache les mains des élus », a-t-elle commenté en parlant d’outils d’aide à la prise à la décision comme cette priorisation.