C’est le cas de l’Association de protection du lac Brompton (APLB), qui a investi environ 750 000 $ depuis le début de ses efforts en 2016 pour lutter contre le myriophylle à épis, une espèce exotique envahissante (EEE).
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L’aménagement est prévu pour les embarcations légères (kayak, planche à pagaie, etc.) Or, le marais renferme beaucoup de myriophylle; il est également impossible d’y poser des bâches.
Un document déposé dans le cadre des audiences du BAPE sur l’agrandissement du parc avance qu’en dépit de la forte présence de myriophylle à épis dans le marais, il n’est pas anticipé que «l’offre d’embarcations (…) ait un impact sur la propagation de cette espèce dans le lac Brompton», note un rapport du ministère de l’Environnement cité dans un document déposé dans le cadre des audiences du BAPE.
Une lettre du professeur Claude Lavoie, de l’Université Laval, a été déposée. Ce dernier observe que «la fragmentation naturelle à partir du mois de juillet est si importante que la fragmentation causée par les embarcations, motorisées ou non, est probablement très marginale.»
«Dans mon laboratoire du lac des Abénaquis (Sainte-Aurélie), nous avons récolté en 2020 et 2021 des milliers de fragments de myriophylle, même si les zones où se trouvent les herbiers sont interdits à la navigation, interdiction scrupuleusement respectée par les utilisateurs du lac. Ceinturer avec des bouées les zones avec herbiers denses pour empêcher la circulation est une mesure recommandée, mais elle a davantage un effet de sensibilisation que de prévention», élabore-t-il.
L’aménagement ne prévoit pas de rampe de mise à l’eau, mais une station de lavage doit être aménagée pour les visiteurs qui apportent leur propre embarcation.
«Si les embarcations restent sur place et ne transitent pas d’un lac à un autre, elles n’auront aucun effet sur la dynamique du myriophylle et sur sa propagation interlacs. Il faut évidemment bien les nettoyer à leur arrivée sur place et lors du remisage hivernal», écrit également M. Lavoie.
Un milieu fragile
Le président par intérim de l’APLB, Jean Nadeau, a pris connaissance de l’avis de l’expert.
«Il n’en demeure pas moins que dans l’ensemble, un marais est un milieu fragile et particulier. On est un peu inquiet des effets à long terme… On ne sait pas de quoi demain est fait. Finalement, est-ce qu’on va se rétracter dans cinq ou dix ans?», dit-il en qualifiant le marais de «pouponnière à myriophylle».
L’association a installé des estacades à l’entrée nord du marais afin d’intercepter les fragments de myriophylle arraché.
Bon an mal an, l’association en récolte beaucoup. L’été dernier, 50 livres de myriophylle ont été récupérées.
Selon l’Association, «actuellement 95% de l’inventaire des herbiers ciblés en 2016 sont sous contrôle.» Cet inventaire comprenait les herbiers qui étaient occupés à plus de 70% par le myriophylle à épis.
«De fait, c’est un peu ça qui est questionnable. D’un côté, il y a de l’argent du gouvernement qui nous aide à financer nos activités de lutte contre le myriophylle. De l’autre, on va peut-être bousculer un milieu fragile… En même temps, c’est l’inconnu. M. Lavoie semble dire que ce n’est pas si grave (…) Nous, on tente de faire éviter le secteur depuis des années. On fait tout ce qu’on peut pour que les gens évitent le secteur du marais... je ne crois pas qu’on ait totalement eu tort toutes ces années-là. On ne veut pas entrer dans le syndrome du pas dans ma cour, mais y a-t-il des endroits plus adéquats?» dit-il en se réjouissant de la protection de nombreux km carrés.
L’APLB a aussi émis des doutes sur la présence de quelque 200 sites de camping près du ruisseau Ély, un des tributaires majeurs du lac Brompton.
Directrice de projets au COGESAF, Julie Grenier s’interroge également sur le message envoyé à la population.
«Je trouve que ça envoie un message un peu contradictoire. On met beaucoup d’efforts pour limiter la propagation du myriophylle à épis et les autres EEE. Là, d’entrouvrir la porte dans ce secteur-là, c’est comme si on diminuait un peu l’impact de toute la sensibilisation faite avec le temps, et je trouve que ça repose sur les capacités de discernement des gens… Ça enlève un peu l’importance des efforts de sensibilisation au contrôle du myriophylle… Je ne suis pas certaine que c’est le meilleur choix.»
Julie Grenier a également vu les conclusions de M. Lavoie. «Ce n’est pas tant une question d’étude que d’harmonisation du discours…» estime-t-elle.
Reprise des audiences du BAPE le 3 avril
Les audiences du BAPE concernant l’agrandissement du parc national du Mont-Orford reprendront le 3 avril prochain, en vue de la deuxième partie de l’audience publique.
Les personnes, organismes, groupes ou municipalités peuvent prendre rendez-vous avec la commission jusqu’au 16 mars à 16 h, sur la page web Je donne mon point de vue, située dans l’onglet réservé au dossier sur le site web du BAPE.
Les personnes qui souhaiteraient exprimer spontanément leur opinion sur le projet pourront également le faire «si le temps le permet», précise le BAPE. Un registre d’inscription sera rendu disponible sur place et sur le site web du BAPE.
Par ailleurs, les personnes qui désirent déposer un mémoire à la commission pourront le faire jusqu’au 30 mars à midi sur la page web Je donne mon point de vue sur le site web du BAPE.
Durant la première partie des audiences, du 14 au 16 février dernier, la commission a tenu quatre séances publiques représentant près de 14 heures d’échange. Les audiences reprendront à l’hôtel Chéribourg à Orford.