L ’entreprise STP Rotomachinerie dans le secteur Brompton à Sherbrooke a décidé d’assurer sa relève en distribuant des parts à plusieurs employés clés. STP, qui conçoit et fabrique des équipements de rotomoulage, une technique pour transformer des matières plastiques en pièces creuses, s’est toutefois butée à des règles fiscales très contraignantes.
«Évidemment, ces jeunes-là n’ont pas beaucoup d’argent à investir pour acheter des actions et on ne peut pas les donner parce que sinon la différence devient un avantage imposable, déplore Stéphan Courtois, directeur général. On se dit qu’on va les financer, mais si on leur donne un taux préférentiel, la différence est imposable. Toutes les manières avec lesquelles on voudrait aider deviennent un avantage imposable. C’est difficile à payer pour eux.»
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L’entreprise déplore les «bâtons dans les roues» que lui mettent les deux paliers gouvernementaux en lien avec le mode d’imposition.
«Il faut que ça change au Québec si on veut aider les employés à devenir partenaires, poursuit M. Courtois. Le gouvernement devrait éventuellement regarder comment aider les employés à devenir actionnaires.»
Exigences de conformité
Ces enjeux sont vécus par un nombre grandissant d’entreprises, confirme l’avocat fiscaliste et associé fondateur du cabinet St-Amant & Vien Avocats d’affaires, Marc-Étienne Vien.
Un régime d’option d’actions permet dans des cas semblables un certain report de l’avantage imposable, mais c’est un programme qui est peu accessible.
«Les règles sont très complexes et il peut y avoir une lourdeur administrative, mentionne-t-il. Pour un jeune entrepreneur, ça peut être difficile de s’y retrouver et souvent, ils n’ont pas le réflexe de se tourner vers un fiscaliste. Il y a de plus en plus de conformité et il faut s’entourer des bons professionnels, mais il y a un coût assez important qui peut être associé à cela.»
Ce point de vue est partagé par Pierre Graff, président-directeur général du Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec.
«Même lorsque tu as l’argent, il y a des coûts qui sont liés aux exigences de conformité qui sont aujourd’hui complètement démesurées, déplore celui qui représente 42 jeunes chambres de commerce à travers la province. C’est une barrière de plus à l’entrée.»
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M. Graff estime qu’il est nécessaire de trouver des incitatifs, notamment fiscaux, pour que les employés puissent acheter en partie ou en totalité des entreprises.
«On a fait une étude d’impact économique l’année dernière qui montre que si on exonérait d’impôt sur le revenu les fondateurs de start-up pendant deux ans après la création, ça permettait non seulement la création de 2000 emplois, mais ça avait un impact positif sur le PIB, résume-t-il. Si on applique le même raisonnement aux employés qui veulent acheter des parts, on pourra voir des effets semblables.»
Deux solutions créatives
Serge Bastien, conseiller senior, développement et formation équipe-conseil au Centre de transfert d’entreprise du Québec, fait souvent face à des situations où des entreprises veulent impliquer des employés.
Il décrit deux solutions qui sont souvent utilisées pour réduire l’impact fiscal. La première est un gel de la valeur des actions avec une nouvelle émission aux employés en question.
«Si on prend une entreprise qui vaut 1 million $ par exemple, on transfère les actions ordinaires des propriétaires en actions privilégiées qui valent 1 million $ et on émet de nouvelles actions à par exemple 1 $. On remet ensuite 5 % par exemple à chaque employé qu’on veut impliquer. Si l’année prochaine, la compagnie vaut 1,1 million $, les actions valent 1,10 $ et ainsi de suite.»
L’autre scénario consiste à la vente pure et simple des actions. «Si on reprend les mêmes employés et on transfère 5 % de la valeur de la compagnie, il faut arriver avec la vraie valeur, résume-t-il. Les vendeurs financent les employés avec le taux prescrit selon la loi. Les employés paient leur financement à même les dividendes des actions qu’ils ont reçues. Ce qu’on va avoir fait, c’est de créer une entreprise de gestion pour les employés, on verse les dividendes à la compagnie de gestion et elle fait le paiement aux propriétaires. Il n’y a pas d’impôt sur les dividendes entre les compagnies.»
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