Des ergothérapeutes jugent être «la clé» pour apaiser la COVID longue

Aucun traitement n’existe contre la COVID longue au Canada. Des ergothérapeutes estiment que leurs compétences peuvent aider à apaiser les symptômes.

Des ergothérapeutes réclament une meilleure reconnaissance de leur expertise en ce qui a trait à la COVID longue. En attendant un traitement curatif approuvé au Canada, ces ergothérapeutes jugent que leurs compétences professionnelles peuvent et doivent être mises au profit des personnes affligées par les symptômes post-infectieux de la COVID-19, en plus d’être démocratisées à travers leur profession par un processus de formation.


«En réadaptation, ce que l’on fait souvent s’appelle du développement de capacités fonctionnelles. C’est l’une des interventions que l’on peut faire auprès de nos patients atteints de douleurs chroniques, où l’objectif est d’augmenter leur capacité en augmentant la charge énergétique demandée doucement pour qu’ils puissent reprendre leurs activités», indique Mme Lagueux, qui est aussi professeure agrégée au programme d’ergothérapie de l’Université de Sherbrooke et chercheuse au Centre de recherche du CIUSSS de l’Estrie-CHUS.

«En cas de COVID longue, poursuit-elle, surtout s’il y a des malaises post-efforts, on va nuire au rétablissement des personnes, car il faut toujours rester en dessous de leur seuil d’énergie, il ne faut jamais le dépasser. Dès qu’on le dépasse, on fait reculer la personne.»

Elle donne en exemple sa propre situation, elle qui a contracté la COVID longue en mars 2020. Elle assure avoir vécu plus d’une dizaine de ces «crashs» après avoir tenté trop tôt de réaliser des activités qui demandaient trop d’énergie. Elle a dû prendre un congé maladie de neuf mois et, aujourd’hui encore, est incapable de pratiquer ses activités favorites, comme le vélo de montagne, à la même fréquence.

«Notre travail est donc d’accompagner ces gens-là et de leur apprendre une autogestion des symptômes. Il faut donc identifier les symptômes les plus handicapants et mettre le doigt sur les activités qui les aggravent. Quand on parle d’activités, ça peut être physique, cognitif, émotionnel, bref n’importe quoi», ajoute Mme Litwin.

«Ça semble facile dit comme ça, continue-t-elle, mais il y a beaucoup de deuils à faire. Pour certains, seulement sortir du lit, réaliser leur toilette du matin et s’habiller sera la seule activité dans la journée, car il n’y a plus d’énergie pour le reste. Donc imaginez-vous les sacrifices à faire.»

L’accompagnement par les ergothérapeutes, et ce, très tôt dans le processus, devient alors primordial, selon Dobrochna Litwin, car «si on intervient rapidement, les gens pour la plupart peuvent reprendre le cours normal de leur vie en trois ou quatre mois».

Émilie Lagueux, ergothérapeute et professeure à l’Université de Sherbrooke, a elle-même été affligée par la COVID longue.

Reconnaissance

Mmes Lagueux et Litwin ont ainsi fait paraître mardi une lettre ouverte, signée par trois autres de leurs consœurs, dans l’espoir de faire connaître ces compétences portées par leur profession.

«Ce qu’on fait, avec ce qu’on sait aujourd’hui, c’est le meilleur traitement contre la COVID longue disponible. En accompagnant les gens, on leur donne les outils pour bien gérer les symptômes, ce qui les fait éviter les dangereuses rechutes», estime Dobrochna Litwin, qui ne croit pas que les ergothérapeutes sont reconnus à leur juste valeur dans le combat contre la COVID longue.

Les deux professionnelles de la santé citent le fait que certaines cliniques spécialisées en COVID longue au Québec sont «toujours sans ergothérapeutes», ce qui les désole.

La clinique spécialisée pour les personnes atteintes de COVID longue ou du syndrome post-Lyme du CIUSSS de l’Estrie-CHUS est quant à elle composée de différents experts, dont des ergothérapeutes et des physiothérapeutes.

Ne se disant pas indifférentes aux défis de la main-d’œuvre dans le secteur public, Émilie Lagueux et Dobrachna Litwin maintiennent qu’il faudra former le plus d’ergothérapeutes possible à la réalité des méthodes de traitement de la COVID longue, qui demandent, rappellent-elles, des «changements de paradigmes» dans l’approche curative.

Mme Litwin juge aussi qu’une collaboration entre le public et le privé peut aider à s’attaquer aux problèmes causés par l’affection post-COVID.