{"accessibility":"METERED","authors":[{"coverUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F32d78de9-715d-4e38-ac9e-829d9f25590f.png&width=1024&stripmeta=true","description":{"fr":"Journaliste et chroniqueuse "},"email":"ktremblay@latribune.qc.ca","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Feb0b7a9e-c0d8-4b3e-a772-a81f5f461178.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","location":"Sherbrooke","name":"Karine Tremblay","source":"La Tribune","twitter":"tremblayk"}],"channel":"Guerre en Ukraine","chapters":[{"position":0,"text":"

Oleg Koleboshyn nous accueille chez lui, en banlieue de Montréal. On est émus en frappant à la porte.

La dernière fois qu’on s’est vus, c’était en mars dernier, à Bucarest.

Il allait bientôt pouvoir rentrer chez lui avec sa belle-mère, tandis qu’avec mon collègue photographe du Droit, Simon Séguin-Bertrand, j’allais poursuivre ma route vers la Pologne, où les Ukrainiens arrivaient chaque jour par milliers.

Avec Oleg, on s’était rendu à la frontière de la Roumanie et de l’Ukraine, on avait visité les centres d’accueil pour réfugiés, on avait patienté au Bureau du centre de réception des demandes de visas. Partout, on avait recueilli les témoignages difficiles à entendre, mais importants à transmettre.

Les au revoir avaient été chargés d’émotions. Oleg venait de passer trois semaines à aider ses concitoyens ukrainiens à obtenir leur visa pour fuir la guerre. Il était fatigué, il pensait pouvoir tourner la page et retrouver une vie à peu près normale une fois de retour dans son Québec d’adoption.

La vérité, c’est que la page a été impossible à tourner, nous raconte-t-il aujourd’hui.

La vie normale est différente, elle est maintenant hantée par les violences qui continuent de déchirer l’Ukraine, 10 mois après le début de l’invasion russe.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"caption":"Rencontre avec Oleg Koleboshyn. Oleg et sa fille Michelle","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":1,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F84d95f44-093c-4ba1-a8d7-7caf2f35eb17.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},{"position":2,"text":"

Contre l’insensé de la guerre, on ne peut pas grand-chose. Mais agir, même à toute petite échelle, c’est une façon de résister.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"author":"Oleg Koleboshyn","position":3,"text":"

Qu’est-ce que je pourrais faire d’autre que rester dans l’action? J’ai vite réalisé que ne rien faire, ce n’est pas une option, parce que ce qui se passe dans mon pays natal, c’est toujours présent dans ma tête, dans mon cœur. Alors comme d’autres, avec mes proches, je fais tout ce que je peux, et je vais continuer à le faire, tant que je peux. On essaie de préserver la vie de famille tout en continuant d’aider. On y arrive, je pense, mais c’est un exercice d’équilibriste.

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Dans le salon de sa maison, ça ressemble à Noël. Il y a des lumignons, des guirlandes, un sapin et ses trois filles qui nous accueillent comme des amis. Avec des Ferrero Rocher, un sourire grand comme ça, et avec leur grand-maman maternelle, Lidia, qu’on avait déjà rencontrée à Bucarest. Main sur le cœur, accolade sentie. Les retrouvailles sont aussi heureuses que précieuses.

Ça ressemble à Noël, oui. Mais les lumières qui habillent la pièce ne suffisent pas à éclipser l’ombre qui plane, de l’autre côté de l’Atlantique.

«On a décoré l’arbre au début du mois de décembre. Mais c’est la première fois qu’on l’allume ce soir, pour être honnête», nous avoue Oleg.

C’est le temps des Fêtes, mais les raisons de célébrer sont moins évidentes cette année.

Pas besoin de demander pourquoi.

Parce que la guerre.

«Les médias en parlent maintenant beaucoup moins, de la guerre, mais on sait qu’elle est encore là. J’ai peur que les gens s’y habituent, comme parfois on se fait aux choses qui sont pourtant insensées», résume Sofiya, la plus vieille des frangines Koleboshyn.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"caption":"Les filles d’Oleg, Nicole, Sofiya et Michelle avec leur grand-mère maternelle, Lidia, qui habite avec la famille Koleboshyn depuis le début de la guerre.","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":5,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Ffb253355-4c31-4501-9e2f-21dca2ed0450.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},{"position":6,"text":"

Entre elle et ses deux jeunes sœurs, Nicole et Michelle, il y a cette complicité de tous les instants qui saute aux yeux. Avec leur papa, elles rigolent toutes les trois en enchaînant les anecdotes familiales, elles parlent de leurs jeux de société préférés, elles évoquent leurs projets de vacances. Du ski, de l’escalade, des films. Et le plus important, le retour attendu de leur maman, avant le Nouvel An.

«Ce serait magique, hein, si maman était emballée sous le sapin le 25? T’imagines? Dans un gros paquet, au milieu de la pièce», dit la petite Michelle en riant. Ses deux sœurs embarquent dans son histoire, rêvent la scène avec elle.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"contents":[{"accessibility":"METERED","authors":[{"coverUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F32d78de9-715d-4e38-ac9e-829d9f25590f.png&width=1024&stripmeta=true","description":{"fr":"Journaliste et chroniqueuse "},"email":"ktremblay@latribune.qc.ca","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Feb0b7a9e-c0d8-4b3e-a772-a81f5f461178.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","location":"Sherbrooke","name":"Karine Tremblay","source":"La Tribune","twitter":"tremblayk"},{"description":{"fr":"Photographe"},"email":"sbertrand@ledroit.com","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fa2c19d4b-4609-48eb-ab28-dc7a4c63ce93.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","name":"Simon Séguin-Bertrand - Photographe","source":"Le Droit","twitter":"SimonSB"}],"channel":"Aux frontières de la guerre","chapters":[{"position":0,"text":{"fr":"

L’Ukrainienne de 78 ans a elle-même cuisiné cette spécialité de chez elle. Elle nous sert un généreux bol, ajoute une lampée de crème sure et insiste plusieurs fois : il faut manger pendant que la soupe est chaude. L’entrevue peut attendre.

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Oleg Koleboshyn aide sa belle-mère derrière les fourneaux en traduisant chacun de ses mots.

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Il nous racontera plus tard que les deux dernières semaines ont été difficiles pour elle. Après les premiers bombardements, il y a eu le choc du départ précipité, la longue traversée des frontières, la guerre qui déchire tout. Et par-dessus tout ça, il y a maintenant l’attente. L’interminable attente qui n’en finit pas pour ce visa tant espéré qui lui ouvrira enfin les portes du Canada. La matriarche rêve du jour où elle pourra à nouveau serrer sa fille et ses petites-filles dans ses bras.

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«Aujourd’hui, c’est une meilleure journée pour elle. Avant ça, elle n’avait pas le moral, elle ne sortait pas», nous explique le citoyen canadien d’origine ukrainienne établi au Québec depuis maintenant 12 ans.

C’est pour venir chercher la mère de sa conjointe qu’il a pris l’avion vers Bucarest, le 25 février dernier. Lidia était alors encore en Ukraine.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"La belle-mère d'Oleg Koleboshyn, Lidia Samylina."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":6,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fd4f4ced8-0c50-4bbd-8993-171bf3105bb9.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":7,"text":{"fr":"

Il était à la frontière de la Roumanie lorsqu’elle a enfin franchi la ligne avec Olena, une amie à lui, et le fils de cette dernière, Yaroslav. Depuis, il multiplie les démarches pour accélérer le processus d’entrée au pays de sa belle-maman ainsi que celui de Olena et Yaroslav, qui espèrent aussi pouvoir s’établir au Canada.

"},"type":"paragraph"},{"position":8,"text":{"fr":"

«Je suis venu ici avec un tout petit bagage, raconte celui qui est éducateur spécialisé dans une école de LaSalle. Je pensais qu’on aurait tout complété en quelques jours.»

"},"type":"paragraph"},{"position":9,"text":{"fr":"

Sauf que le séjour s’éternise. L’appartement où Oleg nous accueille est le sixième qu’il loue depuis son arrivée en Roumanie. L’endroit a les allures d’un petit quartier général où les jours s’écoulent dans un autre espace-temps, pétri de doutes, d’incertitude et de démarches plurielles pour aider les réfugiés ukrainiens avec la paperasse canadienne.

«La dernière fois que j’avais versé une larme, c’était à l’époque de ma jeunesse, remarque Oleg. Depuis que je suis ici, je pleure chaque nuit. Tout ce qui se passe, ça mine le moral, ça joue sur les émotions. J’entends des histoires terribles. Je pense à cette femme dont le visage était enflé par les pleurs : en un jour, elle avait perdu un fils et son mari…»

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Et il y a la fatigue, aussi.

«Je ne dors pas beaucoup. Pendant que je suis ici, j’essaie de faire le maximum pour donner un coup de main. Aider les autres, ça nous aide nous-mêmes à traverser les épreuves... J’ai dû remplir entre 40 et 50 demandes de visas canadiens. Tous des gens qui veulent venir au pays», dit Oleg.

Il ne le cache pas : il désespère devant la lenteur du gouvernement canadien à ouvrir les vannes pour faciliter l’entrée des réfugiés ukrainiens.

«Le gouvernement dit qu’il va faciliter les choses, mais c’est terriblement long, insiste-t-il. Les Ukrainiens ne savent pas si et quand ils auront une réponse. Ils se découragent et je les comprends, parce que les pays européens ont déjà mis en place toutes les mesures qu’il faut pour les accueillir. Au Canada, on voit que la population souhaite la venue des réfugiés et met en place des réseaux d’entraide. Il faut que l’appareil gouvernemental bouge.»

"},"type":"paragraph"},{"position":12,"text":{"fr":"

Plusieurs de ceux qui espèrent pouvoir bientôt traverser l’Atlantique ont déjà de la famille ou des amis en sol canadien. Certains sont habités par d’autres motifs que celui des retrouvailles.

C’est le cas d’Olena, qui voit le Canada comme une terre d’accueil où l’avenir peut se conjuguer avec la quiétude d’esprit.

«Mon fils a 16 ans. Je craignais que l’armée ukrainienne décide de recruter les jeunes hommes de moins de 18 ans. C’est pour ça que je suis partie avec lui, parce que je ne pouvais pas envisager qu’il soit en danger. C’est mon seul enfant. Je vais tout faire pour assurer sa sécurité», exprime celle qui préfère taire son nom de famille jusqu’à ce qu’elle sache de quoi demain sera fait.

Quand Oleg lui a parlé de sortir de l’Ukraine avec sa belle-mère, elle n’a pas hésité.

"},"type":"paragraph"},{"author":{"fr":"Olena"},"position":13,"text":{"fr":"

On a rempli une valise, on a fait un câlin au chat, on s’est mis en route.

"},"type":"quote"},{"position":14,"text":{"fr":"

«On a rempli une valise, on a fait un câlin au chat, on s’est mis en route», souligne celle qui travaillait dans une boutique hors-taxes de l’aéroport jusqu’à ce que tout éclate, au matin du 24 février.

«Les bombardements ont commencé à 4h30. Sur l’ensemble du territoire. Tous, on s’est réveillé avec ces bruits assourdissants, sans savoir ce qui se passait.»

"},"type":"paragraph"},{"position":15,"text":{"fr":"

Ce matin-là, Anastasia Popova a aussi tremblé devant les bombes. L’Ukrainienne est une amie d’enfance d’Oleg, qu’elle a retrouvé à Bucarest. La décision de quitter s’est prise en une seconde.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"L'Ukrainienne Anastasia Popova s'est réfugiée en Roumanie avec son fils de 12 ans."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":16,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F407a838a-3d7e-4370-85c8-c9aff19a313d.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":17,"text":{"fr":"

«C’est mon mari qui a insisté pour qu’on parte… Pour notre fils, Miron. On a mis notre passeport et quelques vêtements dans un sac à dos. Et on a pris la route», résume Anastasia.

Quitter était une déchirure. Les larmes chatouillent son œil lorsqu’elle ajoute qu’il fallait penser au futur.

L’avancée s’est faite sous un ciel d’encre. À la marche. Dans un champ. Le petit groupe était tout près de la frontière lorsqu’il a vu les soldats ukrainiens pointer leurs fusils vers eux en leur disant de courir ailleurs.

«Mais derrière, il y avait des coups de feu. On ne voyait rien, on ne pouvait aller nulle part.»

Ils ont poussé un soupir de soulagement quand ils ont finalement eu le signal d’avancer.

«On a appris plus tard que c’était un drone militaire ukrainien qui survolait l’endroit où on se trouvait. On n’était finalement pas en danger, mais on a eu très peur.»

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Le fils d'Anastasia Popova, Miron."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":18,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F86b64f59-f407-4c7d-9bb4-f43628e2c970.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":19,"text":{"fr":"

Autour de la table, chacun a son cellulaire en main. C’est le fil qui les relie à leur monde d’avant, un monde cisaillé par la guerre.

«Jusqu’à maintenant, et sauf pour certaines régions, c’est assez facile de rester en contact avec les gens en Ukraine», explique Oleg.

Le jeune Miron a lui aussi son appareil. Il s’anime en me pointant quelques mots français sur l’application Duolingo.

Et puis il lance cette phrase, qui dit tout ce que, à 12 ans, il a déjà compris : «Il y a deux semaines, c’était ce genre de vidéo-là qui était populaire sur les réseaux.»

"},"type":"paragraph"},{"position":20,"text":{"fr":"

Ce qu’il nous montre en souriant, c’est une captation maison où on voit sa perruche picorer dans une tasse de café. Il nous parle un peu de Harry, son ami à plumes resté derrière. De ses copains qui sont un peu partout en Europe, maintenant. De l’école qui reprendra lundi, à distance. Avec des élèves en Italie, d’autres en Allemagne, et d’autres, comme lui, à Bucarest.

Le retour des cours ne l’emballe pas tant que ça, mais la perspective de revoir ses compagnons à travers l’écran est une joie.

«Les enfants ukrainiens ont eu de l’école autrement, ces dernières semaines. Lorsqu’ils ont dû quitter, sans attendre, c’était comme un cours d’éducation physique. Après ça, ils ont appris la géographie en traversant le territoire. Ils ont eu des leçons de langue en débarquant dans un pays où ils ne comprenaient pas un mot. Et depuis, ils travaillent constamment de nouvelles compétences sociales», image Oleg.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Oleg Koleboshyn multiplie les démarches pour aider les réfugiés ukrainiens."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":21,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fe69b7ee0-0b8a-4931-aae4-ce2e537d18f5.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":22,"text":{"fr":"

Lui-même se dit parfois qu’il pourrait faire le chemin inverse et aller se poser un tout petit temps de l’autre côté de la frontière ukrainienne, là où se trouvent toujours ses deux frères, son père et sa mère.

«Mes parents vivent dans le lycée où mon père était directeur. Parce que les murs y sont épais, c’est plus sécuritaire en cas de bombardement. J’aurais l’idée d’aller les voir. Je pourrais le faire et ressortir du pays puisque j’ai mon passeport canadien. Je resterais quelques heures seulement. Juste pour passer un moment avec eux. Parce que ce serait peut-être le dernier.»

Il y a l’évocation du pire dans ces quelques mots prononcés. Parce que le pire, tout le monde y pense.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Lidia Samylina espère pouvoir bientôt s'établir au Canada."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":23,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Ff13dac9f-ab5e-4789-b9d7-1be00194770d.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":24,"text":{"fr":"

«Mais il y a aussi l’autre versant de la guerre. Celui qui nous fait du bien parce qu’il montre le meilleur de l’humain. J’ai vu des élans de solidarité incroyables, de grands gestes d’entraide. Ça fait réaliser que s’il y a quelqu’un prêt à tuer, il y a aussi quelqu’un prêt à donner sa vie pour te sauver. C’est le côté noir, le côté blanc. Ce côté-là est lumineux.»

Et réconfortant. Comme un bol de bortsch cuisiné par une grand-maman ukrainienne.

"},"type":"paragraph"},{"position":25,"text":{"fr":"

Ce reportage a été réalisé grâce à une bourse du Fonds québécois en journalisme international.

"},"type":"paragraph"}],"creationDate":"2022-03-14T01:00:04.894Z","externalIds":{},"firstPublicationDate":"2022-03-14T01:36:03.199Z","free":false,"id":"9c1a986d16621f39e16e528deb1bb0ae","lead":"BUCAREST — À peine a-t-on mis le pied dans l’appartement que Lidia Samylina nous entraîne vers la cuisine. Là, sur le feu, mijote une casserole fumante d’où s’échappe le réconfortant parfum d’un bortsch. ","locales":["fr"],"metadata":{},"modificationDate":"2022-03-15T12:16:16.862Z","publications":[{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":true,"editionKey":"site","organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"guerre-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"guerre-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"guerre-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"guerre-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"guerre-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"guerre-en-ukraine"},{"canonical":false,"organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"ledroit","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"latribune","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":false,"organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"actualites"}],"slug":"2022/03/14/du-bortsch-des-larmes-et-du-coeur-photos--video-9c1a986d16621f39e16e528deb1bb0ae","tags":[],"templateName":"article1","title":"Du bortsch, des larmes et du coeur [PHOTOS + VIDÉO]","type":"article","url":"global/contents/9c1a986d16621f39e16e528deb1bb0ae.json","visual":{"caption":{"fr":"La belle-mère d'Oleg Koleboshyn, Lidia Samylina, sert la soupe, dans un appartement de Bucarest."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F790f01a4-9e21-4942-b9fa-e61e581bbf95.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},"color":null,"mainVisual":{"caption":"La belle-mère d'Oleg Koleboshyn, Lidia Samylina, sert la soupe, dans un appartement de Bucarest.","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F790f01a4-9e21-4942-b9fa-e61e581bbf95.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},"thumbnailVisual":{"url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F790f01a4-9e21-4942-b9fa-e61e581bbf95.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"}}],"position":7,"type":"content_block","photos":[]},{"position":8,"text":"

C’est le 28 décembre, finalement, que Nataliia a pu revenir de son séjour en Ukraine. Elle était partie là-bas en novembre, après avoir fabriqué un immense calendrier de l’avent pour ses filles, raconte Oleg. Les soins dentaires tellement moins coûteux là-bas justifiaient le voyage qu’elle devait y faire. Parce que la guerre, elle aurait peut-être pu envisager de décaler le voyage. Mais parce que la guerre, justement, elle avait peut-être davantage envie encore de retourner fouler la terre de ses racines.

Dans le paysage qui l’a vu grandir, elle a chaque jour constaté à quel point le quotidien est difficile.

«Elle a vu la grande fatigue des gens qui vivent la guerre. L’électricité est rare. Dans la maison où elle se trouvait, les interruptions de courant étaient de 18 heures par jour», explique Oleg.

Les Russes bombardent les infrastructures, affament le peuple ukrainien. L’hiver s’annonce compliqué.

On ne peut pas empêcher les missiles d’être lancés, de détruire les sources d’énergie. On peut tenter d’amoindrir les contrecoups des frappes. Oleg multiplie donc les campagnes de financement pour envoyer des génératrices à la population. Quatre ont franchi les frontières européennes il y a quelques jours.

«Elles devraient arriver bientôt en Ukraine. Ça aura pris un mois, quand même. C’est long, mais ça vaut le coup. Ça fait une réelle différence pour la population.»

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"caption":"L’hiver s’annonce difficile pour l’Ukraine. Les frappes russes sur les infrastructures énergétiques font en sorte que plusieurs Ukrainiens n’ont pas d’électricité. Oleg Koleboshyn a lancé une campagne GoFundMe pour l’achat de génératrices envoyées au peuple ukrainien.","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":9,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F82f5d8b4-6199-4d90-9f48-cf00e751c26d.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},{"position":10,"text":"

Entre les démarches qu’il multiplie pour aider l’Ukraine, celui qui est éducateur spécialisé en milieu scolaire pense aussi à celles et ceux qui se sont posés au Québec au cours de la dernière année.

«Nos traditions ont changé depuis qu’on vit ici. Dans les anciens pays de l’Union soviétique, c’est le Noël orthodoxe qui est célébré, le 7 janvier, mais pour nous, il n’y a pas de côté religieux. Les fêtes de Noël, c’est la famille. Et cette année, la famille s’agrandit, parce qu’on va organiser une fête avec les Ukrainiens qui vivent maintenant ici.»

Lidia sourit à cette idée. Entourée de ses petites-filles, là, maintenant, elle est heureuse. Mais elle s’ennuie de son pays, elle s’inquiète pour son peuple. Elle s’informe chaque jour en suivant les nouvelles ukrainiennes sur le web, elle rêve de retourner à Odessa où elle a des amis, où elle avait sa vie, où il lui reste une sœur.

«En cinq ans seulement, j’ai perdu 4 de mes sœurs. Nous ne sommes maintenant plus que deux», souligne-t-elle dans sa langue natale.

C’est Sofiya qui traduit pour nous les mots de sa grand-mère. Avec une aisance qui impressionne.

«Je suis née en Ukraine, j’avais quatre ans lorsqu’on a immigré au Québec», explique-t-elle.

Elle y est retournée en 2018, avec son père et sa sœur Nicole.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"caption":"Oleg Koleboshyn et ses grandes filles de 16 et 12 ans, Sofiya et Nicole.","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":11,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F846281a8-964e-47e3-a8c2-005487214f2e.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},{"position":12,"text":"

Les jeunes filles se souviennent de la rue principale, d’un parc où elles allaient marcher, d’une rotonde magnifique, de cerises dégustées sur le haut balcon de la maison de leur grand-mère. Elles pouffent de rire en se rappelant qu’elles s’amusaient à lancer les noyaux… et qu’elles n’avaient pas remarqué que la voisine d’en bas faisait sécher ses draps blancs au grand air. Et qu’ils étaient maintenant constellés d’éclats rubis.

«Moi, j’étais trop petite pour faire le voyage, en 2018. J’étais restée au Québec avec maman. J’ai hâte de visiter l’Ukraine à mon tour. Mais je ne souhaiterais pas y être maintenant. Je ne veux pas voir les maisons détruites.»

«On va y aller après la victoire, Michelle», souligne Oleg.

«On ne dit plus “après la guerre”, mais plutôt “après la victoire”, me précise-t-il. Parce qu’on sait que l’Ukraine va gagner. Mais à quel prix humain?»

Vêtue d’un t-shirt illustrant la résistance ukrainienne, Sofiya soupire, opine: «C’est tellement un grand problème, la guerre, et ça touche tellement de gens! On a l’impression qu’on peut toujours faire plus. Parce qu’il y a toujours à faire.»

C’est un peu pour ça qu’Oleg ne baisse pas les bras, malgré sa lassitude.

L’été dernier, il a couru l’équivalent d’un ultra-marathon afin d’amasser des fonds pour l’Ukraine. Après six petites semaines de préparation, il se lançait dans les 126 km de course qu’il s’était promis de compléter.

«Je visais amasser 10 $ par kilomètres. Ça faisait 1260 $. On a finalement presque atteint le 5000 $.»

Avec ce montant, des tablettes ont été achetées pour que les enfants ukrainiens dont les écoles ont été détruites puissent continuer leur apprentissage à distance.

En ce moment, ce sont des génératrices dont la population a besoin.

«J’ai relancé une campagne GoFundMe pour ça. Je continue de m’impliquer, je ne peux tout simplement pas ne rien faire. Même si je suis vraiment exténué.»

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Son regard se détend. Un peu. «Les bruits me mettent sur le qui-vive, explique-t-elle. J’ai encore l’impression d’entendre les explosions.»

La mère de famille vient de franchir le poste frontalier d’Isaccea avec ses quatre enfants âgés de 2 mois, 3 ans, 8 ans et 15 ans. En tout, il leur aura fallu 48 heures de route pour atteindre la Roumanie. Les hot dog mayo-ketchup que leur sert un organisme de bienfaisance à l’entrée accrochent un premier sourire sur le minois des enfants.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Yana a mis 48 heures pour arriver au poste frontalier d'Isaccea, en Roumanie."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":1,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F5b8d8abe-125e-4f44-adc6-201c35f70811.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":2,"text":{"fr":"

«On est parti de Mykolaïv. C’était difficile, très difficile. C’est la première fois de toute ma vie que je sors de l’Ukraine. J’aurais aimé que ce soit dans d’autres circonstances. Je suis peinée quand je pense à tout ce qu’on a laissé derrière. Et je ne sais pas encore où on va aller. Je vais devoir réfléchir. Mais on n’avait pas le choix. Soit on mourait là-bas, soit on essayait de venir jusqu’ici.»

"},"type":"paragraph"},{"position":3,"text":{"fr":"

Elle s'est enfuie au bon moment. Son taxi démarrait quand le quartier a commencé à être bombardé. «Avant ça, je me trouvais dans un immeuble de cinq étages où tout le monde s’était réfugié au sous-sol. Quand les frappes se sont intensifiées, on s’est demandé si ce sous-sol n’allait pas devenir notre tombeau à tous.»

La fatigue se lit sur son visage comme sur celui de tous ceux qui arrivent.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"La grande majorité des personnes réfugiées sont des femmes accompagnées de leurs enfants."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":4,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F8e32170f-c1d6-4cce-a5d9-7ffe3d3f8f1a.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":5,"text":{"fr":"

Enfin, de toutes celles qui arrivent, devrait-on plutôt écrire. Parce que la très grande majorité des personnes qui déferlent à la frontière sont des femmes. Et leurs enfants. Comme cette maman et sa petite fille de 1 an et 7 mois, qui ont fait la route depuis Odessa avec chien, chats, valises. Elle ne nous dira que le nom de sa fillette : Mira.

«Ça veut dire paix…»

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Mira"},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":6,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F42de3bb5-5484-4eeb-ab4d-0bdb6f636862.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":7,"text":{"fr":"

Le mot résonne comme une prière. Un vœu. Un espoir. Parce qu’elle a vu «ce qui est impensable, surréaliste, inhumain.» Tout ce qu’entraîne la guerre.

«Si seulement mon mari avait pu venir avec nous… J’ai peur, vous savez, poursuit-elle. Je vis des émotions contradictoires. J’ai l’esprit plus tranquille d’être maintenant dans un endroit sécuritaire. Mais j’ai le goût de pleurer quand je pense à ceux qui sont restés au front, à tout ce que les gens ont perdu. Je suis tellement, tellement triste…»

Son regard se perd dans le vide. Une larme s’esquisse. Elle est incapable d’en dire davantage. Elle a de toute façon déjà tout dit.

L’accablement qui la traverse est presque palpable. Et il est généralisé. Cette ombre qui voile son œil, on la remarque chez les uns, chez les autres.

"},"type":"paragraph"},{"position":9,"text":{"fr":"

De l’autre côté du Danube, s’ils regardent l’horizon, ils voient les contours de l’Ukraine. Là où ils vivaient encore paisiblement il n’y a même pas trois semaines.

Le jour va bientôt tomber, mais de nouveaux réfugiés franchissent encore les guérites à la marche, l’air à la fois hébété et soulagé.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Les personnes réfugiées arrivent avec seulement un petit bagage."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":10,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F9c745081-dd1a-488d-8dde-e79fc9775cc1.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":11,"text":{"fr":"

Pour tout bagage, ils n’ont souvent qu’un minuscule sac à dos sur les épaules. Parfois, ils amènent avec eux un chat ou un chien. Une fillette avance en sautillant, un toutou précieusement collé sur son cœur. C’est le seul jouet qu’elle a pu emporter.

"},"type":"paragraph"},{"position":12,"text":{"fr":"

Sous les tentes chauffées, les bénévoles accueillent au mieux ces nouveaux arrivants. Quelques lits de fortune, des chaises et des bancs ainsi qu’une aire de jeux improvisée à l’aide de tapis de mousse et de bean bags colorés composent le décor de fortune dans lequel les gens se déposent. En attendant la suite. Certains prendront le bus qui va vers Bucarest, d’où il est possible d’aller ailleurs en Europe. D’autres n’ont pas encore de plan.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Une aire de jeux pour les enfants, à l'intérieur de la tente."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":13,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F7324655a-e6d1-4de3-9521-a2c99195ffd4.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":14,"text":{"fr":"

Sofia a 19 ans. Elle vient d’arriver avec sa mère, son petit frère de cinq ans, sa sœur de 12 ans. Dans un anglais sommaire, elle raconte le trajet depuis Odessa, où ils ont pris le bateau qui les a menés jusqu’ici. Elle ne sait pas ce qui les attend demain. Se rendre ici, c’était le but du voyage.

"},"type":"paragraph"},{"position":15,"text":{"fr":"

Avant de filer se réchauffer, elle passe devant la poignée de kiosques où les réfugiés peuvent se procurer gratuitement quelques items. De la nourriture, de la soupe chaude, du thé et du café, bien sûr. Mais aussi des vêtements, des jouets, des livres pour enfants, du savon, des couches, du lait en poudre, des produits sanitaires de toutes sortes.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Adriana Susma et Sofia."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":16,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F712090ca-fcac-421a-8a04-b0d0c60710ee.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":17,"text":{"fr":"

C’est devant cet étalage que Sofia s’arrête. Tout ce qu’elle veut, en ce moment, c’est du dentifrice.

«Les gens pensent que c’est la nourriture dont les réfugiés ont besoin. Et bien sûr, il leur faut manger. Mais ce qu’ils recherchent ensuite en arrivant ici, ce sont les produits d’hygiène. Parce que c’est lié à la dignité», me dit la bénévole roumaine Adriana Susma.

La veille, me raconte-t-elle encore, elle a pleuré.

«Une femme est arrivée ici tard le soir. Elle cherchait des serviettes hygiéniques. D’ordinaire, on en a, mais si tard dans la journée, nos réserves étaient épuisées, parce que beaucoup de femmes arrivent chaque jour. Je me suis rappelé que j’avais laissé une boîte dans l’une des salles de bain. J’ai pu lui en donner. Elle m’a serrée dans ses bras et s’est mise à pleurer. J’étais tellement émue. Vous imaginez ce que ça veut dire quand une chose si simple devient aussi précieuse?»

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"La bénévole Adriana Susma est là tous les jours, du matin jusqu'au soir."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":18,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fc5382e00-2e3b-4609-8e95-129ca7baa74b.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":19,"text":{"fr":"

La jeune femme fait partie des bénévoles qui sont à pied d’œuvre de l’aube jusqu’au soir. Chaque jour. Dans des conditions parfois difficiles.

«Aujourd’hui, il fait beau, mais hier, c’était vraiment très froid, souligne-t-elle. Avec le vent, la température ressentie était de moins 17 degrés. J’ai les mains craquelées par le froid. Mais je reste quand même lorsque c’est plus pénible. Je sais que tous ces gens qui arrivent, ils ont eu froid aussi. Et ce qu’ils ont vécu est innommable. Je suis ici parce que j’ai du temps. Et je ne vois pas de façon plus utile de l’employer.»

"},"type":"paragraph"},{"position":20,"text":{"fr":"

Miruna Maria Rahin est aussi bénévole, pour la Croix-Rouge. Elle est postée à l’orée du poste frontalier, là où les réfugiés patientent avant d’avancer vers l’installation temporaire où ils pourront se reposer.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Miruna Maria Rahin bénévole pour la Croix-Rouge embrasse la petite Irena, 2 ans, qui vient d'arriver avec sa maman Anna."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":21,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fde1f3764-29dc-4175-b736-210b99752bff.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":22,"text":{"fr":"

«On les accueille avec des couvertures, des objets de première nécessité, des médicaments. Depuis le début, on a été témoin de toutes sortes de choses. Plusieurs femmes ont accouché ici, sous la tente. On a dû les transporter rapidement à l’hôpital. Une dame âgée qui avait fait le trajet toute seule, à pied, est décédée en arrivant, probablement parce que le voyage avait été trop difficile pour elle. Il se passe des choses heureuses, d’autres très tristes.»

"},"type":"paragraph"},{"position":23,"text":{"fr":"

Oleg Odesa est aussi venu prêter main-forte. Vêtu de son dossard jaune d’interprète, l’Ukrainien raconte que c’est sa façon à lui d’être utile. Aux abords de la clôture, la conversation s’étire.

"},"type":"paragraph"},{"position":24,"text":{"fr":"

«Ça me fait du bien de parler. C’est ma femme qui m’a convaincu de rester ici. Si elle et nos filles n’avaient pas été là, je serais de l’autre côté de la frontière. J’ai voulu y retourner. Elle m’a dit que s’il m’arrivait quelque chose, la guerre ferait d’autres victimes. Autrement. Parce qu’elle se retrouverait seule pour subvenir aux besoins de nos enfants.»

Il confie pleurer devant les vidéos où on voit des civils parmi les victimes. Parce qu’il y a ce sentiment d’impuissance, terrible, qui lui vrille le cœur.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{},"contentType":"jw","credits":{"fr":"LeDroit, Simon Séguin-Bertrand"},"monetizationEnabled":true,"position":25,"thumbnailUrl":"https://cdn.jwplayer.com/thumbs/HTYUgUmk-1280.jpg","type":"video","url":"https://cdn.jwplayer.com/manifests/HTYUgUmk.m3u8","videoUrl":"https://cdn.jwplayer.com/manifests/HTYUgUmk.m3u8"},{"position":26,"text":{"fr":"

«Je n’ai jamais été croyant, jamais. Mais maintenant, je me surprends à prier. C’est la seule chose que je peux faire.»

Et c’est la paix qu’il invite dans ses prières. Comme un vœu, comme un espoir.

"},"type":"paragraph"},{"position":27,"text":{"fr":"

Ce reportage a été réalisé grâce à une bourse du Fonds québécois en journalisme international.

"},"type":"paragraph"}],"creationDate":"2022-03-15T21:38:37.178Z","externalIds":{},"firstPublicationDate":"2022-03-15T22:02:01.496Z","free":false,"id":"b6e8785f87854b76af4f4b64de3d423f","lead":"POSTE FRONTALIER D’ISACCEA – Le grincement d’une valise sur le sol rocailleux alarme Yana. L’Ukrainienne lève les yeux vers le ciel, cherche une menace qu’elle ne trouve pas. Ici, les bombes ne tombent plus.","locales":["fr"],"metadata":{},"modificationDate":"2022-03-16T01:20:57.776Z","publications":[{"canonical":false,"organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"ledroit","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"latribune","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":false,"organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"actualites"},{"canonical":true,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"actualites"}],"slug":"2022/03/15/ici-les-bombes-ne-tombent-plus-photos-et-video-b6e8785f87854b76af4f4b64de3d423f","tags":[],"templateName":"article1","title":"Ici, les bombes ne tombent plus [PHOTOS et VIDÉO]","type":"article","url":"global/contents/b6e8785f87854b76af4f4b64de3d423f.json","visual":{"caption":{"fr":"Yana et sa fille Anna."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F9376c9c5-949b-47e6-bab6-0f91b0e24939.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},"color":null,"mainVisual":{"caption":"Yana et sa fille Anna.","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F9376c9c5-949b-47e6-bab6-0f91b0e24939.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},"thumbnailVisual":{"url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F9376c9c5-949b-47e6-bab6-0f91b0e24939.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"}}],"position":13,"type":"content_block","photos":[]},{"position":14,"text":"

Son épuisement, on le sent. On le comprend aussi.

Cette grande fatigue-là n’est pas nouvelle, mais il la connaît mieux, il voit à reconnaître les potentiels signaux d’alarme.

«J’ai été en arrêt de travail pendant quelques semaines, au retour de la Roumanie, en avril dernier. Tout ce que j’avais entendu, toutes ces histoires terribles et inimaginables, elles s’étaient frayé un chemin dans ma tête. La guerre, ça semble irréaliste, au départ. On n’imagine pas. Et soudain, quand les gens racontent ce qu’ils ont vu, ou traversé, elle devient horriblement concrète.»

Il sait donc qu’il n’est pas à l’abri d’un glissement vers le surmenage.

« C’est que le stress est constant. Les préoccupations ne prennent pas congé. Tous les bénévoles qui œuvrent pour aider l’Ukraine ressentent la même chose, je crois. Je parlais avec un ami d’enfance qui habite en France et qui fait aussi tout ce qu’il peut. On est au même point. Je me suis endetté pour faire tout ça. Je me sens un peu comme un proche aidant. Je pense qu’il faudrait de l’aide pour ceux qui aident. Parce que ça finit par peser. »

Heureusement, il y a aussi du lumineux.

«Les violences gratuites sont terribles, mais à côté de l’horreur, on voit aussi de la grandeur, l’immense générosité et la gentillesse des gens.»

Les gestes de bonté sont un baume. Chaque fois. Une inspiration, aussi.

«Ma mère est venue passer l’été à la maison, avant de retourner en Ukraine. J’ai trouvé son départ difficile, comme j’ai trouvé difficile la décision de mon frère d’aller au front. On a 10 ans de différence. Je l’ai bercé lorsqu’il était bébé. Ça me déchire. Même si le temps passe, je le considère toujours comme mon petit frère.»

Il a coupé ses cheveux lorsqu’il a su. Dans son t-shirt vert foncé, il a un petit air de Zelensky.

Comme lui, il souhaiterait que l’armée russe capitule et quitte le territoire ukrainien. Il voudrait aussi qu’on démilitarise la Russie et que Poutine (qu’on devrait écrire avec un petit p, souligne-t-il) paie pour ses crimes.

«Je souhaiterais que tous les enfants puissent être avec leurs parents, et qu’ils aient tous la chance de devenir adultes.»

Dans cette seule phrase, il y a toute l’idée d’un avenir possible, d’un avenir heureux. Il y a surtout l’essentiel de ce qu’on peut souhaiter, à l’orée de la nouvelle année.

Les filles l’ont résumé, avant de filer au lit et de nous laisser jaser, autour de la table de cuisine.

«Notre souhait, ce qu’on voudrait le plus pour l’année qui vient, c’est simple. C’est la victoire de l’Ukraine. C’est la paix. Pour tous.»

Et ce moment-là, quand il arrivera, peu importe le jour de l’année, ce sera un peu Noël. Et peut-être aussi le Nouvel An, avec tout ce qu’il dessine de possibles, de promesses.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"contents":[{"accessibility":"METERED","authors":[{"coverUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F32d78de9-715d-4e38-ac9e-829d9f25590f.png&width=1024&stripmeta=true","description":{"fr":"Journaliste et chroniqueuse "},"email":"ktremblay@latribune.qc.ca","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Feb0b7a9e-c0d8-4b3e-a772-a81f5f461178.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","location":"Sherbrooke","name":"Karine Tremblay","source":"La Tribune","twitter":"tremblayk"},{"description":{"fr":"Photographe"},"email":"sbertrand@ledroit.com","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fa2c19d4b-4609-48eb-ab28-dc7a4c63ce93.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","name":"Simon Séguin-Bertrand - Photographe","source":"Le Droit","twitter":"SimonSB"}],"channel":" NOTRE ÉQUIPE AUX FRONTIÈRES DE LA GUERRE","chapters":[{"position":0,"text":{"fr":"

«Ça vous dirait d’aller à la frontière d’Isaccea, demain?»

"},"type":"paragraph"},{"position":1,"text":{"fr":"

Évidemment qu’on a dit oui!

"},"type":"paragraph"},{"position":2,"text":{"fr":"

Oleg Koleboshyn nous réserve des places dans la voiture de deux Ukrainiens qu’il a croisés quelques jours plus tôt. Départ en matinée pour une livraison de l’autre côté de la frontière. En Ukraine, oui. Là où les militaires manquent de tout.

"},"type":"paragraph"},{"position":3,"text":{"fr":"

«Le ravitaillement servira aux soldats, mais il n’y aura pas d’armes dans la cargaison», précise le Québécois d’origine ukrainienne.

"},"type":"paragraph"},{"position":4,"text":{"fr":"

Ça nous va. Nous arrêterons notre course avant le passage de la guérite. Pour rester en sol roumain et pour voir comment s’orchestre l’accueil des réfugiés.

"},"type":"paragraph"},{"position":5,"text":{"fr":"

Lendemain matin, petit pépin. Le moteur de la voiture fait des caprices. Départ décalé. On rejoint nos chauffeurs au garage, où l’auto se fait rafistoler.

"},"type":"paragraph"},{"position":6,"text":{"fr":"

Roman et Eugène Morozyuk marchent vers nous. À leur carrure et leur allure, on sait que ce sont deux frangins. Même démarche, même coupe de cheveux, même regard bleu. C’est simple: on a l’impression d’avoir devant soi des jumeaux qui ne seraient pas du même âge.

"},"type":"paragraph"},{"position":7,"text":{"fr":"

Ils ont un sourire grand comme ça lorsqu’ils nous montrent le précieux paquet qu’ils s’en vont livrer à ceux qui résistent, dans leur pays natal.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Un paysage capté lors du trajet vers la ville de Isaccea, en Roumanie."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":8,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F1d42366a-7f03-43fa-b6ac-4608e99fdc01.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":9,"text":{"fr":"

Au creux de la banale boîte brune, dort un contenu qui vaut de l’or. Parce qu’il peut faire la différence entre la vie et la mort. Des gilets pare-balles, des casques de combat, des batteries, des genouillères et des jumelles sont entassés dans le paquet.

"},"type":"paragraph"},{"position":10,"text":{"fr":"

«Les gilets pare-balles sont devenus une rareté. Ils sont donc très prisés.»

"},"type":"paragraph"},{"position":11,"text":{"fr":"

Roman et Eugène referment le colis avec satisfaction. Ce n’est pas leur première livraison, ce ne sera pas leur dernière non plus. Un peu partout, près des frontières, d’autres Ukrainiens font le même genre d’expédition.

"},"type":"paragraph"},{"position":12,"text":{"fr":"

«On jasera dans l’auto, on a plein d’histoires à raconter», nous disent-ils en anglais.

"},"type":"paragraph"},{"position":13,"text":{"fr":"

Dans leur Toyota Camry qui fonctionne au propane, on apprendra qu’ils sont natifs de Kyiv. Et que Roman peut traverser la frontière à sa guise.

"},"type":"paragraph"},{"position":14,"text":{"fr":"

«Parce que j’ai quatre enfants. Dans les familles où il y a plus de trois enfants, les hommes ne sont pas obligés de s’enrôler», explique-t-il.

"},"type":"paragraph"},{"position":15,"text":{"fr":"

Eugene, lui, a fui le pays au tout premier jour de la guerre. Le 24 février. En toute légalité.

"},"type":"paragraph"},{"position":16,"text":{"fr":"

«Quand les bombardements ont commencé, à l’aube, j’ai compris que je devais mettre ma famille à l’abri. Sans tarder. J’ai deux enfants, un de 4 ans, un autre de 5 mois. Je savais que l’invasion des Russes signifiait la guerre.»

"},"type":"paragraph"},{"position":17,"text":{"fr":"

Il a conduit vite jusqu’aux limites du pays et il s’en est fallu de peu pour qu’il ne puisse pas passer.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Deux frère Ukrainiens, Roman et Eugene"},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":18,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F9bd40740-b12c-409d-ad03-26185e97399d.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":19,"text":{"fr":"

«On a atteint le poste frontalier à 14h, mais il y avait beaucoup de monde. On a franchi la ligne à 18h30 seulement.»

"},"type":"paragraph"},{"position":20,"text":{"fr":"

À 20h, les hommes âgés de 18 à 60 ans n’étaient plus autorisés à quitter l’Ukraine.

"},"type":"paragraph"},{"position":21,"text":{"fr":"

À défaut d’être sur le champ de bataille, Eugène mène un autre genre de combat. Amasser du matériel et en orchestrer la livraison avec son frère, c’est sa façon de lutter. En restant près des siens.

"},"type":"paragraph"},{"position":22,"text":{"fr":"

Et les deux frérots ont d’autres idées dans leur cabas.

"},"type":"paragraph"},{"position":23,"text":{"fr":"

«En raison de la propagande, les Russes ont une totale incompréhension de ce qui se passe. Il faut le leur dire», expliquent Roman et Eugene.

"},"type":"paragraph"},{"position":24,"text":{"fr":"

Pour contrecarrer la désinformation, ils visent le web. Avec une «armée» inattendue: les adolescents.

"},"type":"paragraph"},{"position":25,"text":{"fr":"

«Tous, ils ont du temps. Et tous, ils ont un téléphone. C’est un moyen de communication qui peut devenir redoutable s’il est utilisé par un très grand nombre, dans un même but. J’ai travaillé dans l’innovation et la cybersécurité. On voudrait créer un réseau capable de déjouer les cyberbarrières de la Russie. Pour diffuser la vérité sur toutes les plateformes possibles. Même dans les critiques de restos en ligne, s’il le faut.»

"},"type":"paragraph"},{"position":26,"text":{"fr":"

Le mouvement en est à ses débuts. Il faudra du financement et du temps pour le mettre sur rails.

"},"type":"paragraph"},{"position":27,"text":{"fr":"

«Après ça, mon analyse, c’est qu’il faudrait un coup d’État pour sortir Poutine de son siège. Il n’y a que ça pour l’arrêter. Et si on ne le fait pas, il va poursuivre sa marche sur les autres pays des Balkans.»

"},"type":"paragraph"},{"caption":{},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":28,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F4697b6c9-d500-4f5f-87b0-7dc3f24a6045.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":29,"text":{"fr":"

Pour Roman, l’ombre d’une Troisième Guerre mondiale n’est pas à écarter. Ni la possibilité que Poutine en vienne à provoquer un incident nucléaire. «Ce serait catastrophique. Pour tout le monde.»

"},"type":"paragraph"},{"position":30,"text":{"fr":"

Le paysage défile vite. Trop vite, même. Pressé d’arriver à bon port et multipliant les dépassements, Roman appuie sur l’accélérateur avec beaucoup trop d’enthousiasme. L’odomètre frôle des limites que je ne peux pas écrire ici, ça inquiéterait ma mère. Mais je dois être un peu trop blême sous mon teint déjà blanc.

"},"type":"paragraph"},{"position":31,"text":{"fr":"

«Je suis un conducteur d’expérience, je ne prends aucun risque inutile. Mais je peux ralentir un peu, si vous préférez.»

"},"type":"paragraph"},{"position":32,"text":{"fr":"

Oui, on préférerait. Un peu. Svp.

"},"type":"paragraph"},{"position":33,"text":{"fr":"

À une vitesse un yen plus raisonnable, le sympathique duo profite des quatre heures de route pour nous raconter l’histoire imbriquée (et compliquée!) de la Russie et de l’Ukraine.

"},"type":"paragraph"},{"position":34,"text":{"fr":"

«Les tensions, ça fait longtemps qu’il y en a», constate Eugene.

"},"type":"paragraph"},{"position":35,"text":{"fr":"

La route devient plus sinueuse et traverse des vallons où fleurissent de typiques villages.

"},"type":"paragraph"},{"position":36,"text":{"fr":"

Au détour d’un virage, on aperçoit le Danube. Et les contours de l’Ukraine. On débarque à Isaccea. Roman ne reviendra que dans la nuit, on ne pourra pas attendre son retour pour filer vers Bucarest.

"},"type":"paragraph"},{"position":37,"text":{"fr":"

Au camp, on sera soufflé par l’immensité de la perte et de la peine qui habitent les femmes qui traversent la frontière, en tenant leurs enfants par la main, et avec toute leur vie qui tient dans un mini sac à dos.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":38,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fa6d970e5-b0b3-4afc-8e13-8ffea88fd41e.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":39,"text":{"fr":"

On y repensera, le soir, sur le chemin du retour. On y repensera les jours suivants aussi.

"},"type":"paragraph"},{"position":40,"text":{"fr":"

Le lendemain du périple, Oleg nous dira que nos places libérées leur ont permis de ramener à Bucarest deux femmes réfugiées et leur enfant, à chacune. On se dira alors, nous, qu’on a bien fait de partir plus tôt.

"},"type":"paragraph"},{"position":41,"text":{"fr":"

Ce reportage a été réalisé grâce à une bourse du Fonds québécois en journalisme international.

"},"type":"paragraph"}],"creationDate":"2022-03-18T14:58:47.985Z","externalIds":{"newscycle":"5D438BD5-1292-4D00-B94D-73E29146D185"},"firstPublicationDate":"2022-03-18T21:00:00.000Z","free":false,"id":"3462e561139b12fd8a09adaff2bd88ae","lead":"ROUMANIE — C’est un imprévu dans l’itinéraire, une porte ouverte qu’on n’attendait pas. C’est surtout le genre d’invitation qui ne se refuse pas.","locales":["fr"],"metadata":{},"modificationDate":"2022-03-19T14:09:40.700Z","publications":[{"canonical":true,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"latribune","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":false,"organizationKey":"ledroit","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"ledroitfranco","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"actualites"}],"slug":"2022/03/18/rouler-trop-vite-sur-la-route-disaccea-photos-3462e561139b12fd8a09adaff2bd88ae","tags":[],"templateName":"article1","title":"Rouler trop vite sur la route d’Isaccea [PHOTOS]","type":"article","url":"global/contents/3462e561139b12fd8a09adaff2bd88ae.json","visual":{"caption":{"fr":"En route vers Isaccea en Roumanie avec deux frères ukrainiens, Roman et Eugene."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F06a23dd1-a2e0-4f81-b59f-6f7be696ed4d.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},"color":null,"mainVisual":{"caption":"En route vers Isaccea en Roumanie avec deux frères ukrainiens, Roman et Eugene.","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F06a23dd1-a2e0-4f81-b59f-6f7be696ed4d.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},"thumbnailVisual":{"url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F06a23dd1-a2e0-4f81-b59f-6f7be696ed4d.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"}},{"accessibility":"METERED","authors":[{"coverUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F32d78de9-715d-4e38-ac9e-829d9f25590f.png&width=1024&stripmeta=true","description":{"fr":"Journaliste et chroniqueuse "},"email":"ktremblay@latribune.qc.ca","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Feb0b7a9e-c0d8-4b3e-a772-a81f5f461178.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","location":"Sherbrooke","name":"Karine Tremblay","source":"La Tribune","twitter":"tremblayk"},{"description":{"fr":"Photographe"},"email":"sbertrand@ledroit.com","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fa2c19d4b-4609-48eb-ab28-dc7a4c63ce93.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","name":"Simon Séguin-Bertrand - Photographe","source":"Le Droit","twitter":"SimonSB"}],"channel":"Guerre en Ukraine ","chapters":[{"position":0,"text":{"fr":"

«On a reçu l’invitation mardi matin. J’étais content, je me suis présenté tout de suite au Bureau du centre de réception des demandes de visas, avec les passeports. Je pensais qu’on pourrait peut-être partir dès cette semaine, mais on m’a dit ici que ce serait étonnant que ça aille si vite», remarque l’éducateur spécialisé natif d’Ukraine, qui vit au Québec depuis plusieurs années.

L’émission du précieux document est maintenant entre les mains de l’ambassade, lui a-t-on dit.

«C’est encourageant, parce qu’on a maintenant la confirmation que tout le monde pourra s’en venir au pays. L’incertitude est terminée, mais pas l’attente. J’avoue que j’aurais aimé savoir quand on aura enfin les papiers pour décoller», mentionne Oleg Koleboshyn.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Des passeports ukrainiens"},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":1,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F8da5169b-7e99-4e8b-88b0-387b6b4e39a7.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":2,"text":{"fr":"

D’autres réfugiés ukrainiens qu’il a aidés dans leurs démarches ont aussi reçu la précieuse invitation.

«Ça bouge enfin, on dirait, souligne Oleg Koleboshyn. Le Canada a aussi annoncé, pour le 17 mars, un assouplissement des conditions d’entrée au pays pour les Ukrainiens. Ça aussi, ça devrait faciliter les choses. Après ça, j’espère qu’une aide sera apportée aux gens pour payer le vol d’avion. Ça coûte cher, et les Ukrainiens ont tout laissé derrière eux, ils n’ont pas nécessairement les sous pour des billets aériens.»

"},"type":"paragraph"}],"creationDate":"2022-03-15T23:33:17.936Z","externalIds":{},"firstPublicationDate":"2022-03-15T23:54:35.025Z","free":false,"id":"f02028d4d6344285e11a44b352f4fce5","lead":"BUCAREST - Après des jours d’attente, Oleg Koleboshyn a enfin reçu la confirmation qu’il espérait. Sa belle-mère, Lidia, ainsi que son amie Olena et le fils de cette dernière, Yaroslav, pourront venir s’établir au Québec. Les papiers pour l’obtention du visa de chacun sont en préparation.","locales":["fr"],"metadata":{},"modificationDate":"2022-03-16T14:21:19.785Z","publications":[{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"ledroit","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"latribune","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":true,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"}],"slug":"2022/03/15/enfin-des-visas-f02028d4d6344285e11a44b352f4fce5","tags":[],"templateName":"article3","title":"Enfin, des visas","type":"article","url":"global/contents/f02028d4d6344285e11a44b352f4fce5.json","visual":{"caption":{"fr":"Oleg Koleboshyn devant le Bureau du centre de réception des demandes de visas."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F296d2b45-068b-4dda-b061-32486e1a27a5.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},"color":null,"mainVisual":{"caption":"Oleg Koleboshyn devant le Bureau du centre de réception des demandes de visas.","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F296d2b45-068b-4dda-b061-32486e1a27a5.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},"thumbnailVisual":{"url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F296d2b45-068b-4dda-b061-32486e1a27a5.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"}},{"accessibility":"METERED","authors":[{"coverUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F32d78de9-715d-4e38-ac9e-829d9f25590f.png&width=1024&stripmeta=true","description":{"fr":"Journaliste et chroniqueuse "},"email":"ktremblay@latribune.qc.ca","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Feb0b7a9e-c0d8-4b3e-a772-a81f5f461178.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","location":"Sherbrooke","name":"Karine Tremblay","source":"La Tribune","twitter":"tremblayk"},{"description":{"fr":"Photographe"},"email":"sbertrand@ledroit.com","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fa2c19d4b-4609-48eb-ab28-dc7a4c63ce93.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","name":"Simon Séguin-Bertrand - Photographe","source":"Le Droit","twitter":"SimonSB"}],"channel":"Guerre en UKraine","chapters":[{"position":0,"text":{"fr":"

Sur tous les murs, il y a des papiers collés avec des pictogrammes et des mots en ukrainien. Dans le hall d’entrée, pas de secrétariat, mais une flopée de bénévoles qui papillonnent.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"L'école Ferdinand à Bucarest"},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":1,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F0f47a73e-7f65-46d8-8bac-a2cd5c54c2a7.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":2,"text":{"fr":"

Ce qui se passe ici est névralgique. Depuis la fin du mois de février, l’école Ferdinand de Bucarest a en quelque sorte été transformée en camp de réfugiés.

C’est ici que peuvent venir se poser pour quelques jours les Ukrainiens qui ont fui leur pays défiguré par la guerre.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Alexandra Chirila, mairesse adjointe pour le secteur deux de Bucarest."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":3,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F29e7a7d2-b4d5-44c1-99ea-f0af361892b8.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":4,"text":{"fr":"

Alexandra Chirila est mairesse adjointe pour le secteur deux de Bucarest. Elle nous fait visiter l’endroit aménagé en lieu d’accueil dans un temps record.

«C’était une école désaffectée, parce qu’elle devait être rénovée. On a tout mis en place très rapidement et on a dû s’ajuster au fur et à mesure parce qu’on n’avait pas d’expertise là-dedans. La dernière fois qu’on avait accueilli des réfugiés sur notre territoire, c’était pendant la Deuxième Guerre mondiale», expose-t-elle.

Un bruit de xylophone nous parvient du gymnase, où une poignée d’enfants jouent ensemble au badminton. Des adultes sont assis sur de petits sofas. Sur une table, des boîtes-repas, une caisse de fruits, des bouteilles d’eau, du thé et du café sont à la disposition des résidents temporaires.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Le gymnase de l'école sert de salle communautaire et d'aire de jeux."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":5,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F3c448bc6-a537-45e7-b3fe-d6abb1935620.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":6,"text":{"fr":"

«Ça, c’est la salle communautaire», résume Mme Chirila en expliquant que la municipalité assume une partie des frais, offre le logement et trois repas par jour aux réfugiés. Les dons des citoyens s’ajoutent et permettent d’acheter ce qui manque.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Alexandra Chirila devant la pharmacie."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":7,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fada7048e-08ff-45c3-8b9f-0c78c9072dc3.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":8,"text":{"fr":"

Au deuxième étage, les vêtements de toutes tailles sont empilés. Des couches, du lait en poudre, du savon, de la nourriture pour animaux, du déodorant et différents produits d’hygiène débordent des tablettes. Des médicaments de base sont entreposés dans une armoire qui fait office de pharmacie.

«Le conflit a débuté le 24 février, et cinq ou six jours plus tard, on accueillait déjà les premières personnes ici», illustre Mme Chirila.

Il a fallu faire vite. Et bien.

«Ce qui est assez remarquable, c’est le mouvement collectif qui s’est mis en place, poursuit-elle. Les bénévoles se sont multipliés, les dons aussi. Des traducteurs sont venus prêter main-forte. Des représentants de tous les partis politiques ont travaillé ensemble. C’est assez rare, ça, en Roumanie.»

Le lieu de passage peut accueillir 300 personnes.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Une mère et son garçon circulent dans l'école."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":9,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F42115690-7ba4-45c8-a93b-229752f00816.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":10,"text":{"fr":"

«On appelle ça un centre de transition parce que les gens ne font souvent que passer, remarque Mme Chirila. Ils se posent ici pour un jour ou deux, avant de filer ailleurs en Europe, où ils ont parfois de la famille prête à les accueillir le temps qu’il faudra.»

Ceux qui n’ont nulle part où aller sont redirigés vers un établissement où tout est prévu pour des séjours plus longs.

«C’est déchirant de voir arriver les gens avec, parfois, un petit sac de plastique pour tout bagage. On sait que personne n’est ici par choix. Mais on fait de notre mieux pour que ce soit accueillant. Hier, par exemple, les bénévoles ont improvisé une petite fête pour l’anniversaire d’un enfant.»

Des enfants, justement, il y en a beaucoup. Ils jouent, rient, pleurent, se font des amis. Ils continuent leur vie d’enfant, en somme. Pour ajouter de la normalité à cette situation d’exception, il faudra bientôt trouver une façon de leur permettre de reprendre l’école.

«C’est l’un des grands défis qu’on voit se dessiner, parce qu’il n’y a pas assez de professeurs parlant l’ukrainien pour répondre aux besoins», dit Mme Chirila.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Les classes servent de chambres."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":11,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fe1223b9c-40f0-4d03-bc42-f5129ce9eee3.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":12,"text":{"fr":"

Dans le pavillon adjacent, les classes servent de chambres. Sous des murales fatiguées où brillent les princesses de Disney, des lits de camp et des matelas ont été déposés sur le sol.

Nikitina Liubov est au centre depuis quatre jours avec ses deux enfants de 6 et 8 ans, Lev et Marianna. Il lui a fallu prendre sept bus pour arriver jusqu’ici.

"},"type":"paragraph"},{"position":14,"text":{"fr":"

«C’était vraiment très long. Et ce n’était pas facile. J’ai l’impression que toutes les journées sont mélangées. Il n’y a rien de normal», mentionne la mère de famille.

Elle pensait pouvoir aller chez une tante, en Italie, mais son petit garçon est malade. Une infection à l’estomac qui bouscule les plans.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Lev, le fils de Nikitina Liubov souffre d'une infection à l'estomac."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":15,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F896078f4-c0fb-49ed-9869-51d2ea63dfd9.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":16,"text":{"fr":"

«Il faut attendre qu’il aille mieux avant de pouvoir partir», explique-t-elle.

À côté de nous, sa fille et une autre fillette crayonnent au pastel. Sur le papier blanc, des chats colorés prennent forment. Peut-être l’animal de compagnie qu’elles ont dû laisser à la maison.

Larissa partage la même «classe-chambre» que Nikitina. Elle ne veut d’abord pas nous parler.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Larissa discute avec la journaliste Karine Tremblay."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":17,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F6bb4a84f-acda-4554-90ea-dc7e57a71845.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":18,"text":{"fr":"

«Ce qui se passe là-bas, c’est innommable. J’ai vu les avions passer au-dessus de nos toits et bombarder la maison juste à côté. Il y a des cadavres partout. Et imaginez seulement: un homme âgé dont la fille et la petite-fille sont mortes n’est pas en mesure de les enterrer dignement. Il les garde dans le frigo en ce moment. En attendant.»

Il y a de la colère dans la voix de Larissa. Et une fronde franche contre tout ce que fait éclater la guerre.

"},"type":"paragraph"},{"position":19,"text":{"fr":"

«J’ai vu toutes sortes de choses. Les soldats russes brûlent leurs morts, assure-t-elle. Pour ne pas qu’il y ait de preuve quant au nombre de pertes humaines dans leurs rangs. Et ils font comme les nazis, vous savez. Leurs soldats doivent avancer vers le champ de bataille. S’ils veulent faire demi-tour ou déserter, les bataillons derrière eux les exécutent.»

Pendant que sa mère raconte l’épouvantable et le tragique des derniers jours, Nick «discute» avec Simon, mon collègue photographe.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Nick traduit en russe sur son téléphone pour le photographe Simon Séguin-Bertrand"},"contentType":"image","credits":{"fr":"Courtoisie, Oleg Koleboshyn"},"position":20,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F1c0f734c-1843-4d90-80c0-9e8512356e7a.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":21,"text":{"fr":"

Le jeune garçon de 11 ans parle russe. Mais son application de traduction permet une conversation à l’écran.

«Nous sommes venus ici en bus, nous avons été obligés de quitter la ville pour être en sécurité», écrit-il.

«Notre ville a été bombardée. Un village a été détruit. Nous sommes montés dans le bus lundi et nous sommes arrivés hier», poursuit-il.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Nick utilise son téléphone intelligent pour traduire son témoignage."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":22,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F39bf31b5-95c1-40f2-9076-2bae5c0961d0.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":23,"text":{"fr":"

Dans son œil, une gravité. Dans ses mots, de la reconnaissance : «Nous sommes très heureux d’être venus dans cette ville. Nous nous sentons chez nous. Ici, les gens sont très gentils.»

De l’extérieur, oui, l’établissement Ferdinand ressemble à n’importe quelle école. On y croise des fillettes avec des tresses, on admire des dessins de chats.

Et on apprend de petites leçons d’humanité.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Marianna montre un dessin de chat à sa mère."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":24,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F95405d3c-b8e3-4f91-ab57-666c1949f6c1.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":25,"text":{"fr":"

Ce reportage a été réalisé grâce à une bourse du Fonds québécois en journalisme international.

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CHRONIQUE / Je cherche encore un peu comment atterrir. Même si ça fait déjà quelques jours que j'écris dans les contours connus de ma maison.

C’est peut-être justement ça le petit nœud à dénouer, la patente à apprivoiser : la maison. L’enveloppant cocon où je me dépose. Avec tout le doux de la famille et des amis autour.

C’est heureux, c’est la vie habitée comme avant.

Seulement, il y a ça : je sais que c’est un avant que tant d’Ukrainiens ne retrouveront pas…

Sur les routes de la Roumanie et de la Pologne, pendant deux semaines, on a croisé celles et ceux pour qui l’idée d’un chez soi n’existe plus.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Le drapeau de l'Ukraine est collé sur la valise d'une famille quittant le poste frontalier de Siret."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":1,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Ffed44436-abb2-478d-8336-e9ac882c0668.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":2,"text":{"fr":"

Celles et ceux qui n’ont pas eu d’autres choix que celui d’embrasser l’exil.

Celles et ceux qui ont glissé toute leur vie dans un sac à dos avant de filer vers la frontière la plus proche. Ou la plus sûre.

Souvent en tenant la main de leurs bambins. Fort et précieusement. Parce que toute l’espérance d’un avenir possible tenait entre leurs doigts entrelacés.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Une fillette ukrainienne attend à la gare de Przemysl en Pologne."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":3,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F048d2bb7-1940-45c4-84f4-e863392ecd94.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":4,"text":{"fr":"

À l’orée des lignes frontalières, dans la chaleur relative des tentes de fortune, dans les camps comme dans les centres d’hébergement, on a lu le même soulagement sur le visage des uns, des autres: enfin, ce soir, le ciel ne s’embraserait pas, la nuit serait sans sirène d’alarme.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Des enfants courent en direction de la Roumanie au poste frontalier d'Isaccea."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":5,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F5060eb68-731a-4c80-9e84-ba09d24c3b7e.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":6,"text":{"fr":"

Mais on a lu aussi une tristesse qui dépasse l’entendement.

Parce que dans toute fuite, le réflexe du cœur, des racines et du plus profond de soi, c’est de ne pas laisser la famille derrière. Quand on peut.

Et en Ukraine, en ce moment, on ne peut pas tout le temps.

Dans un pays où la loi martiale existe, où les hommes de 18 à 60 ans doivent rester pour prendre les armes, les adieux sont inévitables. Ils infligent des blessures aussi profondes qu’invisibles.

Toutes ces femmes qui franchissaient les frontières nous parlaient sans trembler, sans fléchir.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Anna fond en larme en nous parlant de ses proches restés en Ukraine."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":7,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fed871e66-fae5-4f83-9dae-41898abc7162.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":8,"text":{"fr":"

Sauf lorsqu’arrivait ce moment où leurs pensées pointaient vers tous ceux restés là-bas. Les hommes de leur vie. Les amies qui ne s’étaient pas résignées à quitter le pays. Les parents qui ne pouvaient pas faire le chemin. Les proches ou les connaissances qui étaient tombés sous la pluie des tirs ennemis.

Chaque fois, devant nous, c’était la même lame de fond qui avalait tout. Avec ce torrent dans le regard. L’armure qui se fissure. Et une déchirure qui fait mal à voir, à entendre. Chaque fois.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Sur les routes de la Roumanie et de la Pologne, pendant deux semaines, on a croisé celles et ceux pour qui l’idée d’un chez soi n’existe plus."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":9,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F3916217b-9330-46cc-9089-3297299cf3c3.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":10,"text":{"fr":"

Aller à la rencontre des réfugiés qui avaient fui les bombes et les balles, c’était s’approcher d’une souffrance à grande échelle qu’on n’a pas l’habitude de côtoyer.

Ils, elles ont eu la générosité de trouver les mots pour dire, confier, témoigner de l’histoire qui s’écrit en ce moment.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Lidia, dans un appartement de Bucarest avant de partir pour le Canada."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":11,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F0ee64461-36cd-4530-8082-ba55effb70d5.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":12,"text":{"fr":"

On a écouté leurs voix pour pouvoir ensuite vous raconter. À chaque nouvelle rencontre, on a mesuré l’ampleur de la perte, de la peine. Et du pire qui grandit depuis ce 24 février où la Russie a commencé à piétiner l’Ukraine sous son pas militaire.

On a été secoué par tout ce que cisaille la guerre.

On revient habité par le récit de tous ces gens croisés. Leur parole, c’est une parcelle de ce que vivent déjà plus de 3,5 millions de réfugiés.

On revient aussi le cœur plein d’avoir vu toutes ces mains tendues. Celles qui consolent, qui réconfortent, qui montrent le chemin vers plus d’humanité.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Oleg Koleboshyn divertit les petits dans le camp au poste frontalier d'Isaccea."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":13,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F054bd105-31cd-4eeb-ad37-93e2a46af7a1.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":14,"text":{"fr":"

Il y a tous ces bénévoles, ces gens venus de loin, parfois, qui ont, un geste à la fois, ajouté une maille à l’immense filet d’entraide qui se tricote de jour en jour pour aider le peuple ukrainien à s’accrocher.

Il y a cet élan de bonté qui arrive de partout et qui instille une certaine beauté, de la grandeur. Qui montre surtout qu’une armée qui se déploie peut également être faite de bras capables de bercer l’autre.

Le pire existe. Mais le meilleur se peut. Aussi.

***

"},"type":"paragraph"},{"caption":{},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":15,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fc30df71a-190c-4bea-8036-93afe557a364.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":16,"text":{"fr":"

Je cherche donc encore un peu comment atterrir. Dans la vie habitée comme avant, il y a la famille, les amis, tout ce qui fait le cocon doux de la maison. Et il y a les liens tissés avec les gens de l’autre côté de l’Atlantique, de Bucarest à Varsovie, toutes les histoires qu’on vous a racontées, celles qui continuent de s’écrire là-bas. Ces visages qu’on n’oubliera pas. Certains qui ont un nom, et d’autres pas.

Oleg, Nataliia, Sorin, Elena, Lidia, Sean, Miron, Anastasia, Volodymyr, Valentina, Yaroslav, Adriana, Yann-Patrick, Mira, Claudia, Alexandre, Roman, Eugene, Agnieszka, Adriana, Yana, Sofia, Mircea, Roberto, Paulina, Irina, Claudia, Hadas, Anna et tant d’autres, on vous dit merci.

Comme vous, on espère la paix.

"},"type":"paragraph"},{"position":18,"text":{"fr":"

Ce reportage a été réalisé grâce à une bourse du Fonds québécois en journalisme international.

"},"type":"paragraph"}],"creationDate":"2022-04-01T10:38:45.579Z","externalIds":{},"firstPublicationDate":"2022-04-02T07:00:00.000Z","free":false,"id":"8ad9d411f63e50003ce4a424db11f83c","lead":"Dans toute zone de conflit, le bien se faufile et trouve une place jusque dans les fissures du mal. - Kim Thύy, Em","locales":["fr"],"metadata":{},"modificationDate":"2023-01-12T01:35:36.726Z","publications":[{"canonical":false,"organizationKey":"ledroit","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"latribune","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"guerre-en-ukraine/notre-envoye-special-en-ukraine"},{"canonical":false,"organizationKey":"ledroit","sectionKey":"ma-region"},{"canonical":false,"organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"actualites/le-fil-groupe-capitales-medias"},{"canonical":true,"organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"latribune","sectionKey":"ma-region"}],"slug":"2022/04/02/atterrir-et-esperer-la-paix-photos-8ad9d411f63e50003ce4a424db11f83c","tags":[],"templateName":"article1","title":"Atterrir et espérer la paix [PHOTOS]","type":"article","url":"global/contents/8ad9d411f63e50003ce4a424db11f83c.json","visual":{"caption":{"fr":"Une famille traverse la frontière entre l'Ukraine et la Roumanie."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand"},"position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F2124279b-db51-46ff-957e-625673afd533.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},"color":null,"mainVisual":{"caption":"Une famille traverse la frontière entre l'Ukraine et la Roumanie.","contentType":"image","credits":"Le Droit, Simon Séguin-Bertrand","position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F2124279b-db51-46ff-957e-625673afd533.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},"thumbnailVisual":{"url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F2124279b-db51-46ff-957e-625673afd533.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"}}],"position":15,"type":"content_block","photos":[]}],"creationDate":"2022-12-30T21:01:48.981Z","externalIds":{},"firstPublicationDate":"2022-12-31T08:00:00.000Z","free":false,"id":"e2d5923684fc62947bb5a0da82d1dae9","lead":"CHRONIQUE / À la fenêtre, on aperçoit le drapeau ukrainien collé dans la vitrine. 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