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Les Sénateurs ont-ils besoin d’un Jacques Martin?

Techniquement, D.J. Smith est sous contrat jusqu’en 2025. Le pacte pourrait cependant être résilié, par l’équipe, avant la saison 2024-25.

CHRONIQUE / On ne parle pas assez du rôle crucial qu’a joué Jacques Martin, à Kanata, au beau milieu des années 1990.


C’est comme si on avait déjà oublié.

Pourtant...

Les Sénateurs avaient un beau petit groupe de joueurs, au milieu des années 1990. Ils avaient mangé leur pain noir dans la cave du classement, pendant quatre saisons. Ils avaient bien utilisé leurs choix, au repêchage. L’avenir était prometteur.

Daniel Alfredsson, Mike Fisher, Martin Havlat, Marian Hossa, Chris Phillips et Wade Redden ne manquaient pas de talent, mais ils ne formaient pas encore une équipe.

C’est là que Martin est arrivé avec son expérience, son vécu, sa notoriété. Il s’est installé dans le bureau de l’entraîneur-chef avec son air stoïque. Avec entêtement, il a montré à un groupe souvent immature qu’il fallait parfois jouer du hockey ennuyeux pour gagner, dans la Ligue nationale de hockey.

Les Sénateurs n’auraient peut-être pas fait partie de l’élite de la LNH pendant une décennie, sans lui.

Jacques Martin

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Les Sénateurs des années 2020 attendent-ils la venue de «leur» Jacques Martin?

Je pourrais poursuivre cette chronique en écrivant qu’il n’est pas nécessaire d’aller chercher une copie carbone. Le «vrai» Martin, la version originale, est disponible. Il ne travaille pas à temps complet. Il se contente d’un petit boulot occasionnel, comme conseiller spécial d’une formation de la Ligue de l’Ontario.

Le «vrai» Martin a quand même célébré son 70e anniversaire de naissance, le mois dernier. Il n’a peut-être plus envie de se présenter au bureau, à sept heures du matin, six ou sept jours par semaine, pendant huit, neuf ou même 10 mois.

Au terme d’un voyage éclair en Floride, durant lequel les Sénateurs ont fort mal paru, on peut quand même se demander si les gens qui sont en place, présentement, détiennent les solutions.

D.J. Smith avait l’air un peu abattu, mardi soir, après le revers à Tampa.

Depuis le début, on apprécie son approche directe, son honnêteté. Quand il dit qu’il s’agit probablement de la performance la plus «décevante» des Sénateurs depuis son arrivée à Ottawa, on peut le croire.

Quand on lui demande si les mêmes erreurs commises à répétition commencent à l’inquiéter, il n’a pas besoin de s’éterniser. «Oui», répond-t-il avec franchise.

Ça en dit long.

Techniquement, Smith est sous contrat jusqu’en 2025. Le pacte pourrait cependant être résilié, par l’équipe, avant la saison 2024-25.

Donc, Smith entre dans une période où il est vulnérable. Si la direction de l’équipe décidait d’apporter un changement, derrière le banc, elle n’aurait pas besoin de payer deux hommes de façon concurrente, bien longtemps.

Jacques Martin n’est peut-être plus l’homme de la situation. D’autres entraîneurs compétents attendent quand même, patiemment, qu’on leur accorde une nouvelle chance de travailler.

À défaut de miser sur Martin, les Sénateurs ont besoin d’un type qui lui ressemble, du moins un peu.

S’ils décident de changer, en plein cœur d’une saison, aussi bien faire l’embauche d’un type qui a déjà fait ses preuves. Un gagnant qui travaille dans les ligues majeures du sport depuis longtemps n’aurait pas besoin de travailler aussi fort, à son arrivée dans le vestiaire, pour établir sa crédibilité.

Les sept derniers hommes qui ont dirigé les Sénateurs ont un point en commun. Après leur congédiement, John Paddock, Craig Hartsburg, Cory Clouston, Paul MacLean, Dave Cameron, Guy Boucher et Marc Crawford n’ont pas été capables de se dénicher un autre poste équivalent, dans la LNH.

Sous Eugene Melnyk, Ottawa est devenu une de ces villes où on donne systématiquement une chance à la relève. On ne l’a jamais expliqué, en termes clairs, mais on peut facilement s’imaginer qu’un entraîneur recrue coûte moins cher qu’un entraîneur d’expérience.

Les choses ont commencé à changer, dans la dernière année. Le directeur général Pierre Dorion a obtenu un budget un peu plus important, pour faire l’embauche de joueurs de talent.

Il serait agréable qu’on lui offre la même opportunité, lorsque vient le temps de faire de nouvelles embauches au sein de son équipe de direction.

On lance un nom, comme ça: Claude Julien.

Il a gagné la coupe Stanley. Il a gagné le Trophée des présidents. Il a gagné la médaille d’or aux Jeux olympiques.

Claude Julien

On a déjà gravé son nom sur le trophée Jack-Adams.

Il est âgé dans la jeune soixantaine et il a toujours envie de travailler. Il était prêt à se rendre jusqu’au bout du monde, l’hiver dernier, pour diriger une formation composée de joueurs des ligues mineures, aux Jeux olympiques de Pékin.

Si on lui offre la possibilité de diriger un groupe de jeunes vedettes émergentes de la Ligue nationale, et si le contrat est à la hauteur de sa réputation, il n’oserait certainement pas refuser.

L’an dernier, Julien nous disait qu’il était prêt à retourner dans la LNH, mais pas à n’importe quel prix. Il fallait que la situation soit bonne, pour lui, comme pour sa famille. Il voulait s’entourer de gens avec qui il va bien s’entendre.

Pierre Dorion et lui sont amis, depuis très longtemps.