« On dit souvent que les entreprises d’économie sociale offrent un emploi qui a du sens, en référence à la mission et aux valeurs qui y sont centrales. Mais il y a plus. En septembre dernier, le premier Indice entrepreneurial québécois en économie sociale a fait un constat qui ne nous a pas étonnés : les entreprises d’économie sociale sont innovantes, particulièrement au point de vue organisationnel. Elles ont développé des modes de gestion agiles et basés sur la collaboration. Il va de soi que ces pratiques sont ancrées dans les valeurs de l’économie sociale et émanent d’une certaine vision des organisations », explique Cynthia Collette, directrice générale du Pôle d’entrepreneuriat collectif de l’Estrie.
ÊTRE VRAIMENT À L’ÉCOUTE
Dans le cadre d’une restructuration, ADDERE Service-conseil a invité les employés et deux membres du CA à un lac-à-l’épaule. Tous les aspects de l’organisation ont été revus. « Nous voulions le faire ensemble et en tenant compte de ce que les gens voulaient réellement. Prenons les avantages sociaux : qu’est-ce qui tenait vraiment à cœur nos employés? Parmi eux, la possibilité de s’engager dans des causes qui leur sont chères. Le personnel peut donc être libéré sur ses heures de travail pour faire du bénévolat », explique Valérie Houle, conseillère en stratégie d’écoresponsabilité.
À la Coopérative du Cégep de Sherbrooke, les objectifs annuels sont toujours décidés en équipe et tout au long de l’année, les employés sont informés des résultats. Ils ont aussi eu leur mot à dire dans la dernière planification stratégique. « Cela en fait des employés très engagés. Il faut dire que notre mission les touche : plus la coopérative va bien, plus nous pouvons financer de projets étudiants, verser des commandites dans notre communauté, etc. », explique Karine Lessard, directrice générale.
Chez Sporobole, il n’y a pas que les gestionnaires qui sont à l’écoute : « Dans notre contrat de travail, on a l’obligation de veiller sur nos collègues », précise Éric Desmarais, directeur général. Si les employés sont invités à siéger sur des comités, la direction respecte ceux qui ne veulent pas participer aux décisions stratégiques. « Pour certains, c’est un stress. On les laisse se concentrer sur ce qui les fait triper. »
VALORISER LES COMPÉTENCES
Chez Niska, une coopérative de travailleurs, il n’y a ni hiérarchie ni différents statuts. Pas de DG ni de CA, mais six travailleurs engagés dans la réussite de l’entreprise. « Nous sommes à la fois des autogestionnaires et des entrepreneurs collectifs. Les tâches de gestion sont partagées équitablement entre nous, mais les décisions se prennent toujours ensemble », précise Isabelle Mercieca, conseillère en développement collectif. Chaque conseiller a le même objectif financier – et le même salaire. Par contre, c’est l’objectif collectif, qui est la somme des six objectifs individuels, qui est la véritable cible à atteindre. « Nous sommes ainsi à la fois responsables de notre propre horaire et très autonomes dans notre gestion du temps, tout en étant solidaires les uns des autres. Il n’y a aucun esprit compétitif, chacun a ses forces et travaille sur des mandats en lien avec ses intérêts et ses connaissances. »
Chez ADDERE Service-conseil, des comités permettent aux employés de jouer un rôle dans l’essor de l’organisation. Leurs compétences individuelles sont ainsi mises à contribution pour tout le groupe. L’équipe est aussi sollicitée quand vient le temps d’accepter un contrat. « C’est important d’aimer ce qu’on fait, et d’avoir des mandats selon nos intérêts et nos forces », note Valérie Houle.
Sporobole, qui fête ses 50 ans, a par ailleurs évolué avec les gens qui sont entrés dans son équipe. « Ce sont principalement des artistes, donc des gens créatifs, curieux, anticonformistes, et ils nous amènent toujours un peu ailleurs. Ça nous pousse comme gestionnaire à avoir un regard critique, à revoir nos façons de faire. On est un peu comme un grand laboratoire, et cela nous permet de mieux conseiller nos clients par la suite, car nous l’avons nous-mêmes expérimenté », explique Éric Desmarais. Même son de cloche chez Niska. « Il faut donner de l’espace à la créativité pour essayer des choses, c’est ce qui permet à une organisation de grandir et de changer. »
RECONNAÎTRE L’APPORT DU PERSONNEL
Développer un sentiment d’appartenance passe également par des petits gestes qui viennent démontrer à quel point une organisation tient à ses employés.
À la Coop du Cégep de Sherbrooke, on a consigné ses attentions à travers un Plan de reconnaissance. Anniversaire souligné, boîtes cadeaux pour des occasions spéciales (ex. graduation), pique-nique de la rentrée et plusieurs petites douceurs sont offerts aux employés. « Nous avons aussi un gala reconnaissance où chaque gestionnaire vient à l’avant décrire chacun de ses employés, une belle façon de mettre en valeur ce qu’il apporte à l’équipe », mentionne Karine Lessard qui ajoute l’importance de se garder une partie de spontanéité. « Par exemple, notre équipe en cuisine a connu une période très achalandée : pour offrir une petite pause à chacun, on a organisé des massages sur chaise. Ce genre d’attention fait que nos employés se sentent considérés. Et ça contribue à les rendre heureux. Nos clients le remarquent d’ailleurs! »