{"accessibility":"METERED","authors":[{"coverUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Ff000d5c9-cbcc-4fbb-8762-0af4d599f908.jpg&width=1024&stripmeta=true","description":{},"email":"aabonn@latribune.qc.ca","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F7caaf0cb-6c2d-4609-8e0f-ac944764bfbb.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","name":"Ariane Aubert Bonn, INITIATIVE DE JOURNALISME LOCAL","source":"La Tribune"}],"channel":"Estrie et régions","chapters":[{"position":0,"text":"

Propriétaire depuis 1988, M. Dupont souhaite quitter pour d’autres projets. «J’ai 57 ans. J’avais 23 ans quand j’ai acheté. C’était clair que ça n’intéressait pas nos trois enfants de reprendre le commerce. On a eu envie de vendre durant l’aventure, mais finalement, on a décidé d’attendre, de le vivre jusqu’au bout, mais de vendre avant d’avoir 60 ans. Le temps que ça se fasse, on va être rendus là, à 60 ans. Ce n’est pas une vente qui est si facile, on ne vend pas qu’une bâtisse, il y a aussi de l’équipement, un inventaire…»

Il juge aussi qu’il y a une occasion à saisir. «On sentait que c’était le bon moment pour le faire. Il y a une effervescence à Racine, c’est très dynamique, je suis convaincu que c’est le temps de reprendre le commerce pour en faire ce qu’on veut. La municipalité change vite, il y a beaucoup de nouvelles personnes depuis le début de la pandémie. Ça a eu des répercussions, nos ventes ont augmenté.»

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Une histoire plus que centenaire

Les souvenirs sont nombreux pour M. Dupont, qui raconte que le commerce cumule plus de 150 ans d’existence. «Quand j’ai acheté ici, c’était vraiment un magasin général des années 50 qui n’avait pas bougé dans le temps. La caisse était au fond, et près de l’entrée, c’étaient des personnes âgées qui venaient jaser et jouer aux cartes, aux dames. C’étaient exclusivement des hommes, ils venaient ‘’mémérer’’ au magasin général. Ça fumait à l’intérieur, ce qui est inconcevable aujourd’hui. Les murs étaient complètement jaunis par la fumée de cigarette. C’était très intimidant pour une femme d’entrer ici, il fallait absolument passer par la porte de côté… c’était comme ça dans le temps.»

«J’ai fouillé dans les papiers au palais de justice à Granby. Il s’est vendu un commerce en 1872. C’était le bâtiment principal, avant que l’autre partie s’ajoute. Le bâtiment, les équipements et l’inventaire s’étaient vendus pour 3000$, ce qui était énormément d’argent dans ce temps-là. En 1919, la famille Martin est devenue propriétaire pour 7000$. C’est surprenant que presque 50 ans plus tard, ça se soit vendu pas beaucoup plus cher.»

«On a gardé le nom JH Martin et fils. C’est la famille Martin qui a eu le commerce des années 20 aux années 70. Et eux, c’étaient les peintres de la compagnie Texaco. Alors l’été, ils allaient peinturer les pompes à essence de Texaco. Selon les photos que j’ai, il y avait une pompe à essence ici dans les années 40. Mais selon les informations que j’ai obtenues, je crois qu’il y a de l’essence ici depuis environ les années 20.»

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L’employé de M. Martin, Louis-Philippe Hébert, avait racheté en 1972. «Il a été ici presque 50 ans. C’était comme une légende, il était extrêmement gentil. Mais il s’était ramassé avec un stock incroyable et totalement désuet. Quand on a racheté en 1988, il y avait des bottines de feutre, des chapeaux haute forme, c’était très spécial! Il y avait tout un ménage à faire.»

Au début, Patrice Dupont a continué à vendre de la quincaillerie, mais c’était compliqué. «Il fallait avoir tout, on ne pouvait pas se contenter d’avoir que des vis. C’était un inventaire très lourd à soutenir en plus du dépanneur. Et ce n’était pas assez grand pour faire tout ça. Alors on a fait le choix d’aller vers une épicerie-dépanneur-station-service.»

Donnant-donnant avec la communauté

En 2000, l’entreprise a traversé une période de crise, se rappelle M. Dupont. «C’est l’année où les égouts ont été refaits, la Ville a été complètement fermée pendant deux ou trois mois. On a cru qu’on allait y rester. Mais ça s’est bien passé, parce que nos concitoyens venaient nous encourager. Les camions de livraison ne se rendaient même pas. Il fallait aller chercher le stock à Valcourt dans les camions avec des pickups. Mais les gens ont été vraiment gentils et ils nous ont appuyés. C’est grâce à eux qu’on est passés au travers. La SAQ a commencé pendant ce temps-là et ç’a été un bon ajout. Je le vois comme un cadeau.»

Et si la communauté a soutenu son commerce, le commerce joue un rôle tout aussi important pour elle, reconnait M. Dupont. «C’est un atout pour le village, en particulier pour ceux qui n’ont pas de véhicule. On a un peu de tout : du pain, du lait, du congelé, le nécessaire pour cuisiner.»

Le sentiment d’appartenance des clients parle également de lui-même, dit M. Martin. «Les filles de M. Martin sont revenues voir le commerce. Elles sont rendues à un certain âge. Elles m’ont donné une photo d’une peinture du bâtiment qui a été faite dans les années 60.»

Il ajoute que les clients, même après une longue absence, reviennent. «Des fois, il y a des clients qui entrent et qui me demandent ‘Me reconnais-tu?’ Ils ont grandi ici et sont partis quand ils avaient 10-12 ans… Ils se nomment et je les replace. C’est certain qu’on en vient à connaitre beaucoup de visages. 1200 personnes, on fait vite le tour, on se reconnait.»

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Espoir d’une suite

S’il souhaite vivement que la vocation de son dépanneur se poursuive, Patrice Dupont sait très bien, cependant, qu’il n’a pas le contrôle sur les projets des autres.

«Je pense qu’il y a des opportunités en ce moment. Depuis deux ou trois ans, on garde ça simple, parce que là où on est rendus, on ne se sentait pas prêts à commencer à développer d’autres créneaux. La personne qui va l’acheter pourra faire comme elle veut. Mais c’est certain que dans notre décision, le maintien du service serait important, surtout après 150 ans. Je ne souhaiterais pas que ça se transforme en restaurant, par exemple. Mais on ne sait jamais.»

Patrice Dupont ajoute que la décision de vente ne se produira pas sans consulter sa principale alliée. «J’ai passé toute ma vie à travailler ici avec mon épouse Isabelle Caron. Il n’y a pas une seule décision qu’on a prise seuls», raconte celui qui a d’ailleurs habité plusieurs années le logement situé au-dessus du commerce avec sa femme et leurs trois enfants.

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