Elle n’a d’ailleurs pas hésité longtemps lorsque les Éditions de l’Homme l’ont approchée pour écrire un bouquin.
«Ça faisait vraiment longtemps que je voulais écrire un livre pour parler de mon univers, mais ce n’était pas plus pressant que ça, explique-t-elle en entrevue avec La Tribune. Je réfléchis beaucoup à la cybercitoyenneté et quand ils m’ont approchée, il y a deux ans, pour écrire un livre, je me suis dit que le timing était parfait pour mettre sur papier ma vision pour la rendre accessible à plus de gens possibles.»
Cette vision de la cybercitoyennenté se résume avec les 4 C de Stéphanie Harvey, c’est-à-dire la cyberdépendance, la cyberintimidation, la cybersécurité et le cyberbien-être. Chacun de ces aspects est abordé de long en large dans le livre.
«On doit s’éduquer parce qu’on n’en parle pas du tout, déplore-t-elle. On est vraiment en retard sur la technologie et notre apprentissage de la cybercitoyenneté. En étant plus proche de notre santé mentale, on se rend compte qu’on n’est vraiment pas outillé pour en faire une utilisation saine. Avec notre retard, on peut se faire beaucoup de mal.»
Difficile d’être en désaccord avec elle lorsqu’on regarde les insultes sexistes ou racistes qui pourrissent internet, les fuites de données, le vol d’identité ou les gens qui ne peuvent lâcher leur cellulaire plus que deux minutes. Pourtant ces actions sont toutes encadrées dans le monde «réel» alors que c’est le Far West complet sur le web.
«Me too»
Le monde des jeux vidéo, on le sait, n’est pas nécessairement accueillant pour les femmes. On peut penser à toute la saga entourant Activition/Blizzard, abordé abondamment dans cette chronique. Stéphanie Harvey décrit d’ailleurs plusieurs situations qu’elle a dû vivre dans cet univers au travers les années. Certaines donnent même froid dans le dos.
«Ce n’est pas mon sujet préféré, admet-elle au bout du fil. J’ai été légère, je n’ai pas raconté les pires histoires ou les pires détails. Le but c’est vraiment de conscientiser le monde qu’il y a encore du chemin à faire et de ne pas se mettre la tête dans le sable. J’ai travaillé avec des gens qui étaient convaincus que ça n’arrivait pas sur nos projets alors que j’étais en train de vivre de la discrimination.»
Stéphanie décrit donc la fois où un homme l’a embrassé sans son consentement devant tout le monde lors de sa dernière journée au travail ou une autre ou un homme a arrêté le monte-charge où il se trouvait avec elle pour lui dire que c’était le meilleur endroit pour coucher ensemble. On imagine donc avec un certain dégoût les situations encore pires que Stéphanie a choisi de ne pas mentionner dans son livre.
Faire une différence
Le livre est à forte saveur autobiographique alors qu’on suit Stéphanie Harvey d’une nuit blanche à jouer à Mario Kart jusqu’à ses projets de retraite de la compétition. Elle aborde aussi les défis de vouloir faire carrière dans le jeu vidéo.
«J’espère que quelqu’un qui ne sait pas trop comment canaliser l’énergie de son enfant dans le jeu vidéo va lire et/ou le donner à son enfant pour que ça devienne une expérience positive, résume-t-elle. Il y a encore tellement de mythes».
Et vu la quasi inexistence de livres québécois sur l’industrie et l’univers du jeu vidéo, il y a fort à parier que le livre de Stéphanie Harvey se retrouvera dans quelques mains qui en ont bien besoin.