Moins de dons et de donateurs, mais plus d’argent

De 2017 à 2021, le nombre de donateurs et de dons corporatifs a chuté de près du tiers, respectivement de 29,2 % et de 31,9 %. Cependant, le montant total des dons est passé de 124,6 millions $ à 170,2 millions $ pendant cette période, en hausse de 36,5 %.

Au cours des cinq dernières années, le nombre de dons et de donateurs a chuté, ou au mieux, il s’est maintenu. Cependant, les sommes amassées au cours des campagnes de financement ont tout de même augmenté.


Il s’agit du constat général qui ressort d’une étude sur l’évolution de la philanthropie au Québec, révélée jeudi et réalisée pour le compte de BNP Performance philanthropique, de Logilys-Prodon, d’Unicause et d’Absolu Communication. Soixante-quinze organismes ont participé à cette analyse à laquelle BMO, l’Association des professionnels en philanthropie (AFP Québec) et l’Association des fondations d’établissements de santé du Québec (AFESAQ-Sancio) ont été des partenaires majeurs.

À la lecture des résultats, on distingue les dons individuels et les corporatifs. La première catégorie représente 93,5 % de l’ensemble des donateurs pour la période s’échelonnant entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2021. La seconde représente 6,5 % des donateurs.

Là où la différence est la plus marquée, c’est pour les dons corporatifs. Au terme de la période de l’étude, le nombre de donateurs et de dons a chuté de près du tiers, respectivement de 29,2 % et de 31,9 %. Cependant, le montant total des dons est passé de 124,6 millions $ à 170,2 millions $ pendant cette période, en hausse de 36,5 %. Par contre, le montant moyen par don a explosé durant ces mêmes cinq années, passant de 2690,30 $ à 5389,40 $ (+ 100,3 %).

Au chapitre des dons individuels, le nombre de donateurs s’est maintenu avec une légère hausse de 1,2 %, mais le nombre de dons a diminué de 2,7 %. L’ensemble des dons est passé de 47,4 millions $ en 2017 à 60,6 millions $ à la fin de 2021, en hausse de 27,8 %. Les gens donnaient en moyenne 48,40 $ par don en 2017, mais ce montant est passé à 63,50 $ en 2021.

Effet de la pandémie

La pandémie a eu un effet dans les dons individuels. Le nombre de donateurs a chuté de 2,6 % et le montant total des dons de 1,1 %, entre 2019 et 2020. Ce sont les dons corporatifs qui ont subi la plus forte baisse du nombre de donateurs et de dons avec près du tiers. Mais le montant du don moyen (près de 60 %) et le montant total (12,2 %) ont connu une forte croissance grâce à des engagements plus importants de la part des entreprises.

Il y a aussi la période entre 2017 et 2018 où il y a eu des baisses tant pour les dons individuels que pour les corporatifs.

«En 2018, il y a eu une baisse qu’on ne comprend pas exactement. On a des hypothèses. Peut-être qu’il y a eu moins de campagnes majeures ou de dons majeurs», explique Christian Bolduc, pdg de BNP Performance Philanthropique et BNP Goldie Canada. «Ce qu’on a remarqué, c’est que le don moyen a augmenté autant chez les individus que dans le corporatif. Ce qui a permis d’atténuer la baisse du nombre de donateurs et de dons du côté corporatif.»

Inégalités dans les causes

Tous ne sont pas égaux dans les élans de générosité des donateurs. Les trois causes qui ont connu la plus forte croissance au cours des cinq dernières années sont les fondations d’établissement de santé (en hausse de 42,5 %), la lutte contre la pauvreté (+ 116,7 %) et la protection de l’environnement (+ 53,5 %). Ces hausses résultent d’une augmentation du nombre de donateurs et des montants moyens.

En contrepartie, les établissements d’enseignement (- 25,8 %), les diffuseurs culturels (- 41,0 %), l’accès à la culture (- 62,8 %) et les institutions muséales (- 23,1 %) ont enregistré les plus fortes baisses. Et même si les établissements d’enseignement ont vu leur nombre de donateurs augmenter (+ 86,6 %), la baisse de 64 % des dons moyens a fait pencher la balance de l’autre côté.

Phénomène générationnel

De plus, l’étude révèle que plus on est âgé, plus on serait généreux. En effet, ce sont les représentants des boomers (nés entre 1946 et 1965) qui sont les plus généreux avec 41 % du nombre des donateurs. Viennent ensuite les matures (nés en 1945 et avant) avec 26 %, la génération X (de 1966 à 1980) avec 17,1 %, la génération Y (de 1981 à 1995) avec 13,6 %. Les membres de la génération Z (nés en 1996 et après) ferment la marche avec 2,2 %. D’ailleurs, l’âge moyen des donateurs est de 62,2 ans.

«Il y a une tendance à la baisse du nombre de donateurs qui peut être inquiétante, reconnaît M. Bolduc. D’autant plus que les boomers et les matures représentent un pourcentage important dans la démographie et les générations qui suivent sont moins nombreuses. D’où l’importance de les emmener à contribuer davantage qu’elles le font actuellement, si on ne veut pas avoir de problèmes dans les prochaines années.»

M. Bolduc avance que les organismes devront adapter leurs démarches de sollicitation pour atteindre les plus jeunes générations. «Mais en même temps, il faut éduquer les nouvelles générations à ce qu’on souhaite, c’est plus qu’une participation spontanée à un don en ligne. […] Si des jeunes bien nantis qui sont multimillionnaires se mettent à seulement donner 500 $ pour encourager quelqu’un, ce n’est pas à la mesure de ce que les organismes ont besoin», dit-il. «Les gens de la prochaine génération devront ajouter quelques zéros de plus à leurs dons quand ils seront dans la mesure de le faire.»

Enfin, les femmes sont plus généreuses que les hommes. Elles représentent 55,8 % des donateurs contre 44,2 % pour les membres du sexe opposé.