{"accessibility":"METERED","authors":[{"coverUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm-v2.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F8c6b4f48-b826-4fbb-916d-36ffe20676d4.png&width=1024&stripmeta=true","description":{"fr":"Chroniqueur"},"email":"mmoisan@lesoleil.com","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm-v2.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F2d22abfa-71c4-407b-b6e3-c70f964e34fd.png&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","location":"Québec","name":"Mylène Moisan","source":"Le Soleil","twitter":"mylenemoisan"}],"channel":"Mylène Moisan","chapters":[{"position":0,"text":"

Je suis attendue.

C’est Andréane, la blonde de son petit-fils, qui m’a écrit un courriel pour me parler de lui. «Acrobate, musicien, bûcheron, syndicaliste, attaché politique, je ressens dans son histoire la vivacité de son esprit, mais aussi la difficulté à accepter que cette époque est révolue et qu’il doit maintenant s’en tenir à des occupations si loin de cet univers. Des occupations d’un homme de 92 ans, qui a toute sa tête, mais des jambes fragiles, avec une voix qui s’efface, mais tellement d’histoires à raconter.»

J’ai eu le goût de l’écouter.

Il s’est d’abord excusé pour cette voix affaiblie par un cancer aux cordes vocales il y a une trentaine d’années, puis il m’a montré un cadre avec un certificat, une reconnaissance reçue en 2017 pour son implication à Entraide Les Saules. Il s’est levé, m’a montré une petite horloge sur pied reçue en cadeau pour l’occasion.

Il a pris son iPad, a ouvert une photo d’Andréane.

Il est né l’année de la Grande Dépression, en 1929, époque où, pour les hommes, tout était possible et où, dira-t-il, «les mamans n’avaient pas droit à la contraception. La contraception, c’était l’allaitement.» Lui regardait son père travailler dans le garage, il a appris à démonter et à remonter un moteur.

Il a travaillé avec lui un hiver comme charbonnier, «on avait tout le nez noir».

Maxime a tellement de choses à dire, il ne veut tellement pas en oublier, qu’il s’est fait un petit plan, à la main, de ce dont il veut me parler. Il a aussi imprimé deux copies de son CV, une pour lui et une pour moi, pour que je puisse mieux suivre.

Il a été aux premières loges du syndicalisme dans les années 50, avant la Révolution tranquille, alors que les méthodes de recrutement relevaient davantage de scènes de films que de jeux de coulisses. «J’étais allé pour une campagne de recrutement à Dolbeau. J’avais une petite choupette Volkswagen, on a soulevé la barrière et j’ai pu passer en dessous. La SQ est arrivée, il y avait 200 hommes… la police s’est sauvée!»

Il y a eu cette autre fois où il s’est faufilé sur un chantier forestier, caché dans le coffre d’une auto.

La meilleure? «Une fois, j’ai loué un hélicoptère! J’avais donné rendez-vous à Guy Hamel qui écrivait pour l’Action catholique et on s’est rendus dans la Cour du moulin de l’aciérie à Beauport. On les a syndiqués et après, on a donné la convention à la CSN, c’était plus dans leur domaine.»

Un hélicoptère passe au même moment.

Il me raconte un jour de janvier 1952, le 22, alors qu’il travaillait comme bûcheron. «Il arrive un snowmobile, c’était le matin après déjeuner, l’abbé Chazelle était avec eux. Il m’a dit : “ta mère ne va pas bien”. Il était déjà trop tard. J’avais 22 ans.»

Il s’est marié un 22 aussi, en juin 57.

«Il faut que je vous parle du groupe d’acrobates…» Du quoi? Début des années 50, «au Collège de Lévis, les frères Dionne sont venus donner un spectacle d’acrobaties, ça m’avait fasciné. Alors, avec mes frères et mes cousins, on s’est parti une troupe d’acrobates et de musiciens. On s’appelait les acrobates Plamondon et leur troupe, on a donné 82 spectacles en cinq ans. Je me servais de ma troupe pour attirer du monde à l’UPA, j’étais maître de cérémonie, conférencier et acrobate!»

Et musicien. «J’ai appris à jouer des instruments à l’oreille : le piano, la guitare, l’accordéon, la mandoline, l’harmonica et l’accordéon-piano.»

J’ai appris qu’il y avait deux sortes d’accordéons.

De sa pile de documents, il tire quelques photos en noir et blanc, dont celle où les 11 garçons font une pyramide. Aussi une page jaunie de journal, on annonce un spectacle de la troupe le 3 juillet 1955 à la plage Tanguay de Saint-Léon-de-Standon.

C’est l’année où il s’est installé dans sa maison dans le quartier Les Saules. «Je suis le premier à avoir eu un permis de construire.»

Une vie ponctuée de bons souvenirs

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"caption":"Les acrobates Plamondon","contentType":"image","credits":"Fournie par Maxime Plamondon","position":1,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F038eae0a-bb77-4c9d-b0b2-610aae799e8e.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},{"position":2,"text":"

Il caressait un autre rêve, celui de faire des études. Il les a faites sur le tard, mais il les a faites quand même. «Peu de gens le savent, mais jusqu’à 44 ans, j’avais juste un diplôme de première année.» Il a décroché, en 1975, un diplôme en sciences politiques à la Commission scolaire Chauveau. «Je m’appelle un autodidacte.»

C’est là qu’il est entré au cabinet du ministre des Terres et Forêts, sous le gouvernement libéral de Bourassa, qu’il est allé à un congrès de foresterie en Espagne. «Il y avait une dame à qui je devais remettre un drapeau, je lui ai remis, elle l’a mis sur ses épaules et elle m’a serré dans ses bras. C’est un beau souvenir.»

Sa vie est ponctuée comme ça, de bons souvenirs.

Fait rare à l’époque, il est passé, après l’élection du PQ en 1976, d’un cabinet libéral à un cabinet péquiste. «Je n’ai jamais eu de carte de membre d’un parti. Je me suis toujours gardé cette liberté-là. J’ai été attaché de [Yves] Duhaime, je leur ai dit “j’arrive du parti libéral” et ils m’ont dit : “c’est beau, on te connaît”.»

Maxime a toujours gardé un pied dans le bois, il a poursuivi sa carrière au Département d’aide à la forêt privée où il a travaillé jusqu’à sa retraite comme agent de développement socioéconomique. «J’ai toujours été du genre négociateur, et aussi diplomate. C’était ma carte forte!»

L’humour, aussi. Il garde toujours avec lui un petit calepin de notes dans lequel il écrit des réflexions et des blagues, parfois de son cru, parfois non.

Cent soixante-quatre fois par année, il s’assoit et appelle une personne pour lui souhaiter bonne fête, il a toujours aimé souligner les fêtes des gens. «J’ai 164 noms de personnes dont c’est l’anniversaire et je les appelle tous! On en profite pour se donner des nouvelles, c’est une occasion pour jaser. Quand j’étais à l’Aide à la forêt privée, on célébrait tous les anniversaires avec des beignes.»

Ce qu’il célébrera le 22 juin, c’est son 65e anniversaire de mariage avec sa Lucette. «Si je n’avais pas eu mon épouse, je n’aurais jamais pu faire ce que j’ai fait. Combien de soirées, de fins de semaine où je n’étais pas à la maison?»

Elle était là, avec leurs quatre enfants.

Maxime est un homme de son époque, où on battait les sentiers plutôt que d’en sortir. Andréane, 40 ans, ne se lasse pas de revisiter ce passé avec lui. «J’ai toujours été fascinée par cette façon qu’il a de traîner son passé avec lui, lui pour qui chaque petit bout de corde a une histoire et peut encore servir. […] Je vois aussi et surtout en lui ce désir si fort de laisser une trace. De ne pas avoir vécu pour rien. Que les autres se souviennent de ce qu’il a accompli, de ce qu’il a été et de ce qu’il est d’ailleurs toujours.»

Et je ne vous ai pas tout raconté.

En ceci, l’histoire de Maxime est universelle, nous sommes la somme des chemins que nous empruntons, des gens pour qui nous faisons une différence.

Des traces que nous laissons.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]}],"creationDate":"2022-05-27T19:24:50.901Z","externalIds":{},"firstPublicationDate":"2022-05-28T07:00:00.000Z","free":false,"id":"bf5dc2e27ff8b70537eb6997bf010d7f","lead":"CHRONIQUE / Sur la table de la cuisine, devant lui, Maxime Plamondon a posé une petite pile de documents.","locales":["fr"],"metadata":{},"modificationDate":"2022-05-28T08:01:09.616Z","publications":[{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"chroniques/mylene-moisan"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"chroniques/mylene-moisan"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"chroniques/mylene-moisan"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"latribune","sectionKey":"chroniques/mylene-moisan"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"ledroit","sectionKey":"chroniques/mylene-moisan"},{"canonical":false,"editionKey":"site","organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"chroniques"},{"canonical":true,"editionKey":"site","organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"chroniques/mylene-moisan"},{"canonical":false,"organizationKey":"lesoleil","sectionKey":"actualites"},{"canonical":false,"organizationKey":"lenouvelliste","sectionKey":"opinions"},{"canonical":false,"organizationKey":"lequotidien","sectionKey":"opinions"},{"canonical":false,"organizationKey":"lavoixdelest","sectionKey":"actualites"}],"slug":"2022/05/28/quand-il-fallait-battre-les-sentiers-bf5dc2e27ff8b70537eb6997bf010d7f","tags":["Performing Arts"],"templateName":"article_columnist","title":"Quand il fallait battre les sentiers","type":"article","url":"global/contents/bf5dc2e27ff8b70537eb6997bf010d7f.json","visual":{"caption":{"fr":"Acrobate, musicien, bûcheron, syndicaliste, attaché politique, Maxime Plamondon a gardé plusieurs bons souvenirs."},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Soleil, Patrice Laroche"},"position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F16cfac52-85fa-4d23-9930-82e4938df1e4.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},"adTargetSectionKeys":["chroniques","chroniques/mylene-moisan"],"canonicalSiteCompositeKey":"lesoleil/site","color":"#7f8fde","displayedSection":{"color":"#7f8fde","id":"4037","key":"chroniques/mylene-moisan","name":"Mylène Moisan","position":0,"sectionId":"4037","slug":"chroniques/mylene-moisan","url":"site/sections/chroniques/mylene-moisan.json","isRoot":false},"mainVisual":{"caption":"Acrobate, musicien, bûcheron, syndicaliste, attaché politique, Maxime Plamondon a gardé plusieurs bons souvenirs.","contentType":"image","credits":"Le Soleil, Patrice Laroche","position":0,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F16cfac52-85fa-4d23-9930-82e4938df1e4.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},"section":{"color":"#7f8fde","id":"92","key":"chroniques","name":"Chroniques réseau","position":7,"sectionId":"92","slug":"chroniques","url":"site/sections/chroniques.json","isRoot":true},"subSection":{"color":"#7f8fde","id":"4037","key":"chroniques/mylene-moisan","name":"Mylène Moisan","position":0,"sectionId":"4037","slug":"chroniques/mylene-moisan","url":"site/sections/chroniques/mylene-moisan.json","isRoot":false},"thumbnailVisual":{"url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F16cfac52-85fa-4d23-9930-82e4938df1e4.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"}}