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D’entrée de jeu, le spécialiste, qui s’intéresse notamment dans le cadre de ses recherches aux enjeux touchant le système alimentaire, établit la différence entre les termes souveraineté alimentaire et autonomie alimentaire. «Je préfère le terme souveraineté alimentaire. [...] L’autonomie alimentaire, pour moi, veut dire indépendance. La souveraineté alimentaire est plus liée à la solidarité. Elle peut mener à la relocalisation des systèmes alimentaires au Québec et ailleurs», mentionne-t-il en ajoutant que les termes peuvent être interprétés de manière divergente.

Le chercheur explique qu’avec la pandémie, plusieurs Québécois se sont tournés vers les aliments locaux au moment de faire leurs emplettes. Il mentionne être au début de ses recherches concernant les impacts de la pandémie sur le système alimentaire au Québec. Cependant, à la suite de discussions avec des fermiers, il souligne que la tendance de l’achat local semble s’atténuer.

«En échangeant des courriels avec un fermier, j’ai compris que cet engouement pour le local diminue. Avec l’inflation, les prix augmentent continuellement et cela fait en sorte que les gens souhaitent réduire les coûts pour l’alimentation. Ils décident de retourner vers les grandes sociétés.»

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Il souligne qu’un changement systémique pourrait être utile au Québec. «On parle d’une fierté pour les aliments du Québec. Les politiciens parlent d’un secteur économique. On oublie parfois que les aliments sont des biens essentiels. Parfois, ils sont seulement considérés comme une denrée destinée à l’accumulation de profits.»

«On ne peut pas atteindre la souveraineté alimentaire si on a un très haut niveau d’insécurité alimentaire», ajoute-t-il.

Le Québec et l’achat local

En mai 2021, une étude réalisée par le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) révélait que 49% des Québécois achetaient plus souvent des aliments produits au Québec depuis le début de la pandémie.

Professeure à l’Université Bishop’s, Jane Morrison voit quant à elle beaucoup d’opportunités en matière de souveraineté alimentaire. «On commence à avoir plus de soutien du gouvernement pour les fonds destinés à la recherche notamment avec le Réseau québécois de recherche en agriculture durable.» Elle ajoute que malgré certaines avancées, plusieurs changements restent à faire notamment sur le plan politique.

Elle croit qu’il est important que les États et les provinces soient prêts à réagir en matière de souveraineté alimentaire dans un contexte où l’insécurité alimentaire augmente en raison des crises comme les changements climatiques ou la guerre en Ukraine.

Le climat québécois, une contrainte?

La souveraineté alimentaire au Québec peut sembler difficile à atteindre en raison du climat. Cependant, le coordonnateur régional du Québec chez Sème l’avenir, Hugo Martorell, rappelle que le Québec a un passé agricole vieux de plusieurs siècles. «On a d’excellents sols et une belle expertise. On peut produire six à huit mois par année. Il faut donc développer des cultivars qui sont résistants au gel, tolérants au froid, précoces plus rapidement et qui ont un meilleur rendement.»

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Jane Morrison rappelle qu’un débat fait rage sur l’utilisation des serres afin de prolonger la période de culture en raison de l’énergie consommée. «Il faut toujours regarder le cycle de vie d’un produit afin de savoir si la production en serre durant l’hiver est mieux pour l’environnement que les importations, tout en considérant l’autosuffisance.»

Bryan Dale est d’avis que l’atteinte de la souveraineté alimentaire n’exclut pas l’importation d’aliments. «On pourrait être souverain sur le plan alimentaire au Québec même avec nos saisons. Ça demanderait un changement de régime. [...] Le supermarché fait en sorte qu’on peut avoir n’importe quel aliment, n’importe quand. En hiver, si on était souverain, on mangerait plus de légumes racines.»

Le professeur estime que le commerce doit être axé davantage sur la solidarité que sur le profit.

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L’initiative, mise sur pied par l’organisme Sème l’avenir, comporte une douzaine de sites de démonstration d’un océan à l’autre. Deux grands groupes de culture seront étudiés à l’Université Bishop’s, soit les pommes de terre écoresponsables et les céréales vivaces.

Les pommes de terre seront plantées le 1er juin à la ferme éducative de Bishop’s. «Elles sont issues du programme de phytogénétique du Consortium de recherche sur la pomme de terre du Québec (CRPTQ) qui est situé à Baie-Comeau. Nous avons reçu des milliers de tubercules qui sont génétiquement différents. Les pommes de terre sont le résultat de croisements pour être mieux adaptées à l’agriculture biologique et pour répondre aux attentes des consommateurs qui veulent des pommes de terre rustiques, mais de bonne qualité», évoque le coordonnateur régional du Québec chez Sème l’avenir, Hugo Martorell.

L’objectif de la collaboration entre le CRPTQ et Sème l’avenir est d’accélérer le développement de variétés de pommes de terre plus résistantes aux maladies et de rendre ces dernières plus performantes sur le plan biologique.

«Concrètement, grâce à ce projet, les maraîchers biologiques et diversifiés pourront avoir accès à de nouvelles pommes de terre, tandis que les producteurs de grandes cultures pourront voir la performance du panic érigé et du kernza dans le sud du Québec», ajoute M. Martorell.

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Le panic érigé et le kernza sont deux cultures pérennes pouvant être utiles pour les producteurs céréaliers désirant diversifier leur rotation de cultures, croit le coordonnateur. «[Il s’agit d’une des] stratégies pour conserver les sols et réduire l’empreinte carbone des entreprises», explique-t-il en ajoutant que ces cultures sont méconnues au Québec. Selon lui, le site de démonstration permettra de mettre en valeur les bienfaits de ces vivaces.

Plusieurs semenciers sont établis en Estrie. Ces derniers œuvrent d’arrache-pied afin de préserver le patrimoine alimentaire canadien. D’ailleurs, avec la pandémie de la COVID-19, certains semenciers ont vu leur demande augmenter.

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Promouvoir le travail effectué

Grâce aux sites de démonstration, le travail novateur de certains producteurs sera mis en lumière. «Les agriculteurs pourront partager leurs connaissances et réseauter avec d’autres acteurs.»

«Depuis des années, il y a des agriculteurs et des semenciers qui conservent des semences, développent des variétés et adaptent des cultivars de céréales et de légumes dans diverses conditions», explique Hugo Martorell.

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Selon l’organisme Sème l’avenir, il est primordial que la production locale soit stimulée par le biais de semences ou d’aliments afin de permettre la vente de nourriture à un prix abordable.

«Les semences sont à la base du système alimentaire. Elles sont souvent peu prises en compte dans la résilience alimentaire sur le territoire. On importe beaucoup de semences et on en produit peu au Québec. Quand on parle d’insécurité alimentaire et de résilience aux changements climatiques, c’est important de pouvoir s’assurer qu’on a une production, des compétences et un approvisionnement stable de semences et de variétés adaptées», souligne-t-il.

Les étudiants des programmes en agriculture et systèmes alimentaires durables de l’Université Bishop’s sont également impliqués dans le projet. «Ça donne un exemple aux étudiants de ce qu’on peut faire pour améliorer notre futur», mentionne la professeure au département d’environnement et de géographie de Bishop’s Jane Morrison.

Agriculture et Agroalimentaire Canada a investi 750 000 $ pour la réalisation de ce projet qui s’étendra sur une période d’environ trois ans.

Pour être en mesure d’élaborer des solutions en matière d’autonomie alimentaire, deux autres sites de démonstration de semences ont été mis sur pied dans la Belle Province, soit à Manseau dans le Centre-du-Québec et à Causapscal dans le Bas-Saint-Laurent.

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Le projet, qui est encore en phase d’élaboration et qui n’est pas constitué sur le plan légal, a entre autres comme mission de protéger la vocation agricole du territoire.

«C’est un endroit de création et de collaboration dans l’esprit du développement écoresponsable et durable», mentionne Claudèle Domingue, l’une des instigatrices du projet. «L’écolieu favorise l’expérimentation et le développement humain. Il est orienté sur le projet social et les défis de l’urgence climatique.»

Mme Domingue espère une collaboration avec les établissements d’enseignement supérieur de la région. «L’intention est de rassembler des acteurs déterminants dans un projet à multiples volets permettant d’expérimenter et de transmettre des savoirs concernant la résilience face aux changements climatiques.»

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Jacques Simard est propriétaire de la terre où prend forme l’écolieu. Il souhaite que sa terre conserve une vocation communautaire, éducative et expérimentale. «Le terrain est exceptionnel sur le bord de la rivière Saint-François. Je le vois très bien devenir un parc communautaire», mentionne-t-il.

Lors du Jour de la Terre en avril dernier, une activité avait été organisée afin d’augmenter la visibilité de l’écolieu. «C’est agricole, mais ç’a beaucoup de potentiel pour développer de l’écotourisme éducatif.» De nouvelles personnes se sont greffées au mouvement depuis le 22 avril.

La dame explique aussi qu’une collaboration entre l’écolieu et l’organisme REVE Nourricier pourrait voir le jour. «On est dans une démarche de simplicité et sobriété volontaires.»

Occuper la terre

Des producteurs sont déjà intéressés à expérimenter leurs pratiques sur le site de l’écolieu notamment en matière de permaculture.

En ce moment, une dizaine d’acres sont occupées par un potager biologique. Pour Jacques Simard, la culture biologique est essentielle pour maintenir la sécurité alimentaire.

«Il reste d’autres parcelles qui pourraient être utilisées pour la culture. C’est aussi un endroit merveilleux pour recevoir des activités de groupe comme une journée verte où des étudiants pourraient venir avec leur vélo et leur boîte à lunch. En hiver, on peut faire du ski de fond ou de la raquette. Il y a un très beau boisé qui doit être aménagé. Il y a la rivière qui est très agréable pour la baignade», souligne-t-il.

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Il est important pour l’homme que la communauté prenne possession de sa terre d’une superficie de 65 acres, et ce, de son vivant.

Les arts vivants ont également une place importante à l’intérieur du projet, indique Claudèle Domingue.

Un projet local

La dame met l’accent sur l’importance que l’émergence de l’écolieu soit portée par des citoyens de Lennoxville. «Je suis éblouie par les synergies dans les intentions et les volontés de se mettre ensemble. Ce sera la clé de travailler avec ce qui existe déjà», mentionne-t-elle en abordant des initiatives comme le marché public et le Square Queen.

Un conseil pourrait être formé dans les prochains mois afin d’encadrer les projets et les objectifs de l’écolieu. Une dizaine de personnes gravitent autour du projet à l’heure actuelle.

Claudèle Domingue évoque qu’un des objectifs derrière le projet est aussi la réconciliation avec la nation Waban-Aki.

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