De concert avec le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), l’Association a réagi dès le lendemain de la séance du conseil municipal où ce nouveau fonctionnement a été présenté et approuvé par les élus. Les deux organismes ont indiqué publiquement s’opposer «avec véhémence» à la mesure, qui est même jugée «particulièrement odieuse».
Les ménages qui devront avoir recours à l’aide d’urgence en raison de la crise du logement devront en effet contribuer à la hauteur du loyer mensuel qu’ils viennent de quitter pour avoir accès aux services d’hébergement temporaire, d’entreposage des biens, de prise en charge des animaux de compagnie et d’autres frais de subsistance comme l’alimentation, tous supportés par la Ville.
Or, la contribution exigée viendrait contrevenir «aux principes de gratuité et d’universalité qui doivent guider l’offre de programmes sociaux», selon le FRAPRU. Le droit au logement serait en effet «dangereusement compromis» pour certains ménages qui risquent de se retrouver «à haut risque d’itinérance», ou du moins dans une situation encore plus précaire avec cette mesure, selon l’organisme.
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Un loyer «symbolique»
«L’aide d’urgence en est une de dernier recours», écrit en effet le FRAPRU dans une publication diffusée mercredi après-midi sur les réseaux sociaux et dans une lettre adressée directement à la mairesse Évelyne Beaudin. Alors que la Ville parlait d’une contribution «symbolique», les organismes de défense des locataires rappellent que plusieurs ménages payent déjà une part «beaucoup trop importante de leur revenu pour se loger», justement en raison de la pénurie de logements qui vient les affecter.
L’ALS indique par ailleurs avoir appris «avec stupéfaction» ce changement d’orientation, alors qu’il s’agit de l’un des partenaires principaux de la Ville dans la gestion de la crise du logement. Si la Ville de Sherbrooke peine à financer son support aux locataires, c’est vers Québec qu’elle doit se tourner, répondent également les deux organismes, qui offrent par la même occasion leur support pour effectuer des représentations en ce sens.
Le FRAPRU se dit également «particulièrement préoccupé» par le précédent qu’une telle mesure pourrait créer. «En plus de 20 ans, aucune Ville n’a adopté une telle logique. Il faut conserver le principe d’un accès gratuit à ce nécessaire soutien de dernier recours», soutient l’organisme.
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Aide insuffisante
Québec a fourni une aide de 136 600$ dans ce contexte, une somme que la mairesse Évelyne Beaudin avait déjà jugée insuffisante par le passé, alors que la question du logement est avant tout de responsabilité provinciale.
Les coûts assumés par la Ville demeurent globalement les mêmes que l’an dernier, soit l’hébergement temporaire, l’entreposage des biens, la nourriture et la prise en charge des animaux de compagnie, par exemple.
La conseillère Hélène Dauphinais avait justement soulevé l’an dernier un questionnement sur la contribution des citoyens accompagnés. Elle s’est donc montrée satisfaite de voir les ménages «participer à l’effort» en 2022.
Il a été impossible pour les services municipaux d’évaluer combien la Ville pourra économiser avec cette nouvelle politique, notamment parce qu’on ignore les loyers des locataires qui devront avoir recours à l’aide d’urgence ainsi que leur nombre.
Le conseiller Raïs Kibonge a voulu rappeler que même si la contribution exigée «envoie le bon message», il ne faudrait pas non plus tomber dans le piège de «propager le préjugé du pauvre fraudeur». Pour avoir vu la situation de près, il assure que «la très grande majorité des gens en a vraiment besoin» et qu’ils ne visent aucunement à «juste profiter du système».
Une autre disposition adoptée mardi viendra faire en sorte qu’une prolongation de l’aide d’urgence pourra être approuvée par la direction générale, alors que le conseil siège moins souvent en période estivale.
Les prolongations risquent en effet d’être inévitables si l’on se fie à la situation connue l’an dernier, et la Ville s’attend à une crise autant, sinon plus critique, en 2022.