Les grandes villes contre l’étalement urbain?

Dans nos villes, les tours à appartements y poussent pourtant comme des champignons et on dirait que rien n’y fait: notre société s’urbanise de plus en plus.

POINT DE VUE/  Personne ne semble voir ce grand paradoxe qui s’est subrepticement développé depuis quelques années: les maires des grandes villes qui se font soudain les apôtres les plus motivés de la lutte aux changements climatiques, en s’attaquant publiquement à l’étalement urbain. Comme des propriétaires de boucheries qui feraient la promotion du véganisme!


Dans ces grandes conférences comme celle de l’Union des municipalités du Québec qui s’est tenue cette semaine à Québec, on y parle abondamment de crise du logement. Dans nos villes, les tours à appartements y poussent pourtant comme des champignons et on dirait que rien n’y fait: notre société s’urbanise de plus en plus. 

La pandémie a bien sûr fait s’échapper un peu de pression des marmites urbaines par le biais du télétravail, mais le problème est toujours là et nos villes tentent de s’agrandir par en dedans, en densifiant leurs trames urbaines, en faisant la promotion des transports en commun et en criant «Vade retro satana» en parlant de l’automobile et des autoroutes qui les entourent, qui sont pourtant les veines et les artères qui assurent leur survie.

On se dit peut-être que densifier, c’est vertueux et s’étendre sur le territoire, c’est mal. Mais c’est à mon avis un peu simpliste comme raisonnement. Plus une ville est grosse et dense, plus le coût de s’y loger y monte en flèche et plus on en expulse les citoyens les plus vulnérables économiquement. Plus aussi on y expulse en périphérie les commerces et les industries qui s’y retrouvent un jour à l’étroit et y voient leurs coûts en espace et en taxes exploser. Je choisis un seul exemple pour illustrer le phénomène: la brasserie Molson-Coors, qui a quitté Montréal pour s’installer dans un champ à Longueuil, après plus de 230 années de présence dans la métropole. Est-ce la faute de Longueuil alors si ce n’était plus viable pour Molson-Coors à Montréal, ou est-ce plutôt celle de la densification urbaine à Montréal?

À mon avis, les maires des grandes villes du Québec, Bruno Marchand le premier, devraient prendre un minimum de distance et au moins amorcer une réflexion sur la véritable responsabilité de leurs propres politiques de densification urbaine dans l’étalement urbain dont ils accusent les représentants et les populations de leurs périphéries. Je souhaite même qu’un jour, ils en viennent à s’en excuser, au lieu de se draper dans une chasuble verte et faire la morale écologique aux agglomérations moins denses qui les entourent et qui subissent leurs débordements.