{"accessibility":"METERED","authors":[{"coverUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm-v2.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F99cf5e4d-a53e-4408-8dd7-0a70c75fbeb8.png&width=1024&stripmeta=true","description":{"fr":"Chroniqueur"},"email":"ilegare@lenouvelliste.qc.ca","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm-v2.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Fd902ca05-064e-4daa-a5d5-cdd72df05f30.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","location":"Trois-Rivières","name":"Isabelle Légaré","source":"Le Nouvelliste","twitter":"isalegare"}],"channel":"Isabelle Légaré","chapters":[{"position":0,"text":"

«Je fais mon social ici. Je viens jaser avec mes clients!»

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Parmi eux, des fidèles qui lui confient leurs cheveux – et bien d’autres choses encore – depuis le tout début de sa carrière, il y a 55 ans.

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«Je ne coiffe pas les femmes», a-t-il cru bon m’informer en me voyant entrer dans le petit commerce devant lequel apparaît, bien en évidence, le poteau de barbier bleu-blanc-rouge.

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L’homme discret a paru surpris de m’entendre lui répondre que je n’étais pas venue le voir pour une mise en plis, mais pour en apprendre sur son parcours qu’il poursuit avec l’enthousiasme de ses 25 ans.

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Idéalement, je lui aurais annoncé ma visite, mais aucun numéro de téléphone n’apparaît au nom du salon Le Favori qui existe encore moins sur les réseaux sociaux. D’où mon arrivée à l’improviste...

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«Je fais seulement du sans-rendez-vous», a-t-il expliqué avant de mentionner que les hommes qui sont mûrs pour une coupe de cheveux savent qu’ils n’ont qu’à passer devant la vitrine pour savoir si le barbier est occupé ou pas.

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«Hier, j’ai eu douze clients en trois heures, mais ce matin, j’en ai fait trois.»

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En me disant cela, l’homme prend place dans sa chaise qu’il tourne dos au miroir afin de pouvoir bavarder tout en jetant un coup d’oeil sur le boulevard Sainte-Madeleine, à Trois-Rivières.

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«Je suis bien placé!», dit-il en parlant de son salon qu’il a acheté le 10 juin 1967. Propriétaire de la bâtisse, Raymond habite juste au-dessus du salon avec son épouse qui n’a pas de problème à ce que son homme tarde à profiter d’un peu de repos après autant d’années au boulot.

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«Elle sait que je suis trop nerveux dans la maison.»

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L’octogénaire n’a qu’à descendre les escaliers pour venir retrouver ses clients.

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«Je n’ai pas besoin d’utiliser mon auto pour aller travailler. Je roule seulement 5000 kilomètres par année.»

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Raymond Larivée avait tout son temps lors de mon passage. D’ordinaire, lorsque c’est plus tranquille, il en profite pour remplir des grilles de mots croisés et prendre soin des nombreuses plantes d’intérieur qui verdissent la place.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"caption":"«C’est mon social que je viens chercher ici!», affirme le barbier Raymond Larivée rencontré dans son salon Le Favori, à Trois-Rivières. ","contentType":"image","credits":"Stéphane Lessard, Le Nouvelliste","position":13,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F98a49855-f12c-4841-a70d-ea7156f9efbb.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},{"position":14,"text":"

Son local n’a pas changé de décor depuis une trentaine d’années. «Je veux que ça reste de même», indique celui qui a cependant remplacé le prélart à trois reprises durant ses cinq décennies à travailler toujours debout.

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Les jambes de Raymond sont infatigables, au même titre que les succès de Paul Daraîche et d’Elvis qui jouent en boucle dans les haut-parleurs. Pour les clients qui se pointent ici le samedi matin, le barbier leur réserve les airs rythmés de Johnny Cash, un autre de ses chanteurs préférés.

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«Il y a du tempo dans sa musique. Quand je mets du Johnny Cash, je prends de la vitesse dans ma job.»

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Le barbier appelle «les gars» ses quelque 400 clients. Chaque semaine, Raymond accueille une quarantaine d’entre eux. Pour la très grande majorité, ils sont âgés de 60 à 90 ans.

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Certains avaient seulement cinq ans lors de leur première visite. Ils reviennent aujourd’hui accompagnés de leurs petits-fils.

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Raymond travaille seul dans son salon qu’il a dû fermer temporairement pour cause de confinement au cours des deux dernières années.

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Le barbier a cependant connu «bien pire» que les effets de la pandémie sur l’affluence dans son commerce. La mode des cheveux longs lancée par les Beatles, au tournant des années 70, a entraîné une diminution drastique de la clientèle pendant cinq ou six mois.

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Mais contrairement à d’autres salons de barbier, Le Favori est demeuré ouvert. Raymond Larivée a su tirer son épingle du jeu en raffinant son art pour les jeunes hommes qui lui demandaient d’égaliser les pointes qui dépassent, sans toucher au toupet et au tour d’oreille.

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En 2022, on fait appel à lui pour ses techniques de rasage au poil et c’est parfait comme ça. Le barbier connaît la tête de ses clients réguliers sur le bout de ses doigts.

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«Je pourrais pratiquement leur faire les cheveux les yeux fermés.»

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N’ayez crainte, il se concentre sur chaque coup de ciseaux sans se laisser distraire par les conversations entre les hommes autour de lui. Les sujets à éviter: la politique, la religion et le hockey, quoique la rivalité Canadiens-Nordiques ne provoque plus de chicanes comme avant entre les gars.

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«Le plus important, c’est le client sur la chaise. Il faut le laisser parler. C’est lui le boss. Des fois, je ne dis pas un mot ou je m’informe de sa famille, de son travail...», raconte Raymond Larivée avant d’ajouter en riant: «Mais ils ne travaillent plus personne!»

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Sauf lui, le sympathique barbier qui n’a pas l’impression de travailler non plus.

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Faire des rencontres, c’est le plus beau métier du monde.

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«Je n’ai pas le temps d’arrêter! J’aime ça!»

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Comme au premier jour.

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