La technique du « juste à temps » qui a été implantée dans plusieurs entreprises québécoises il y a bien des années comme moyen de production réduisant les inventaires a démontré ses limites, alors que nombre de chaînes d’approvisionnement ont été rompues.
« Le just in time, ça fonctionne pourvu qu’il y ait du monde pour travailler et faire fonctionner les usines », lance Sylvain Durocher, directeur général de Sherbrooke Innopole.
« La COVID-19 a montré les faiblesses de ce système. Surtout si tes fournisseurs sont en Chine et ailleurs en Asie. C’est loin pour s’approvisionner en pièces, quand il y a du monde malade. »
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Les entreprises devront apprendre à faire des réserves de matière première pour pouvoir réagir rapidement en cas de panne d’approvisionnement. Aussi, chercher à se tourner vers des fournisseurs se trouvant à proximité au lieu de chercher des coûts plus bas, mais à trop longue distance, ajoute M. Durocher, invité à commenter les deux ans de pandémie.
« On a pris conscience qu’on ne pouvait avoir rapidement des biens de première nécessité. Comme des gants d’hôpitaux par exemple. On en faisait venir de Chine. Mais quand la crise a commencé, on s’est rendu compte que ce n’était pas facile de s’en procurer. Des masques non plus », se souvient-il.
« Le réveil a été brutal dans certains cas. On peut produire moins cher ailleurs, mais il va falloir regarder ce qu’on peut faire ici. On devra penser à des inventaires stratégiques. Ça s’ajoute à la pénurie de main-d’œuvre. Ce phénomène était bien présent avant la pandémie. »
Les entrepreneurs québécois pourront continuer de faire affaire à l’extérieur du pays. C’est même nécessaire, ajoute Sylvain Durocher. « Il faut des échanges commerciaux. Mais c’est peut-être un peu plus compliqué », analyse-t-il.
« Prenons juste le problème des conteneurs. Ce n’est pas qu’il en manque, c’est un problème de distribution. J’ai l’impression que ça va se rééquilibrer. Dans un an ou deux. »
D’autres phénomènes vont émerger. Le télétravail va demeurer, selon lui. On verra des modes de travail hybrides s’installer. Pourquoi se rendre au bureau pour écrire un simple rapport quand on peut le faire à la maison sans prendre sa voiture?» demande le directeur général.
« Le monde du travail est à repenser. On voit par exemple ce qu’on a baptisé la grande démission aux États-Unis. Les gens quittent leur emploi pour trouver un autre mode de vie. Ce n’est pas mieux pour aider au manque de travailleur. »
« C’est comme pour le télétravail. Les gens aiment ne pas perdre deux heures de leur temps dans le trafic pour aller travailler et pour revenir à la maison. C’est plus de temps avec leur famille.»
«Dans notre ADN»
Pour Louise Bourgault, directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie de Sherbrooke, le phénomène de l’achat local est là pour rester. « C’est rendu dans notre ADN », jure-t-elle.
« C’est rendu dans les habitudes de consommation des gens. Ils veulent de plus en plus des produits locaux. Ça va rester je crois. »
Des aides pour les entreprises voulant accroître leur production dédiée à la consommation locale existent. Mme Bourgault invite les gens d’affaires à se renseigner.
Autre phénomène émergeant : l’entraide entre entrepreneurs. « C’est remarquable. Les gens sont en concurrence, mais n’ont pas peur de s’entraider, affirme-t-elle. On a vu des entreprises se prêter des employés pour répondre à un surplus de travail pour livrer un contrat. Ça aussi je pense que ça va continuer. »
« Comme l’économie circulaire. On voit que des déchets pour une entreprise peuvent devenir une matière première pour une autre. C’était commencé, mais on voit que ça peut se développer. »