Le milieu communautaire craint toutefois qu’il ne soit en péril au profit d’une autre enveloppe gouvernementale, le programme d’habitation abordable Québec, qui fait cependant « plus de place au privé », selon Rosalie Dupont, coordonnatrice de la Table d’action contre l’appauvrissement de l’Estrie, qui parle ainsi d’un « glissement dangereux ».
Mario Mercier, porte-parole de l’Association des locataires de Sherbrooke, réclame ainsi du gouvernement Legault qu’il réinvestisse dans le programme AccèsLogis au lieu de le laisser « vivoter pendant deux ans » avant d’être remplacé, comme il anticipe. Le sous-financement chronique revient par ailleurs « aux gouvernements qui se sont succédé » au cours des 40 dernières années et qui ont investi des « miettes » dans le programme, a critiqué M. Mercier.
Le premier appel d’offres a toutefois été annulé en novembre dernier puisque les soumissions reçues dépassaient largement le budget prévu.
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Programme d’habitation « abordable »
Comme son nom l’indique, le nouveau programme cible davantage le logement « abordable », une notion de plus en plus contestée, a aussi souligné Mme Dupont. Dans son discours livré sur place, elle a d’ailleurs fait le lien avec le barème fixé par le gouvernement pour déterminer le seuil de la pauvreté, un « choix politique » là aussi discutable, selon la coordonnatrice de la Table d’action contre l’appauvrissement de l’Estrie.
Elle a ainsi rapporté qu’une personne travaillant à temps plein au salaire minimum ou une personne aînée recevant le supplément de revenu garanti arrive à peine à franchir ce seuil. Dans ce contexte, se targuer de sortir des citoyens de la pauvreté par cette simple logique mathématique revient à « capitaliser sur la misère du monde », a-t-elle déploré.
« Pour nous, sortir de la pauvreté, ça veut dire avoir le pouvoir de faire des choix. […] Ne pas calculer à la cenne près, ne pas vivre avec le stress constant de vivre au bord du gouffre », a exprimé Rosalie Dupont. Pendant ce temps, les personnes qui reçoivent l’aide sociale n’obtiennent que « 49 % de ce qu’on considère comme le minimum vital », a-t-elle aussi souligné.
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Revitalisation et embourgeoisement
L’action de mardi s’est amorcée devant le chantier de l’Espace Centro, sur la rue Wellington Sud, et Rosalie Dupont a d’ailleurs critiqué au passage la démarche de « revitalisation » en cours au centre-ville, une réalité qui va « changer le visage » du quartier, a-t-elle affirmé. « Quand ils parlent d’augmenter le revenu moyen des gens au centre-ville, on parle de mettre dehors les gens qui ont un revenu moyen insuffisant à leurs yeux et de rentrer des personnes avec un revenu plus élevé », a-t-elle accusé.
Une situation particulièrement problématique alors que la « recherche de logement se passe très difficilement » cette année, ajoute Mme Dupont.
« On a des besoins en logement, c’est criant », a rappelé la coordonnatrice de la Table d’action contre l’appauvrissement de l’Estrie, qui remarque que « d’autres gros projets de vie municipale qui ne répondent pas aux besoins de la population sont poussés » pendant ce temps. Elle tient toutefois à spécifier que, seul, « le municipal ne peut pas supporter l’entièreté » de l’effort à réaliser en logement et qu’il faut que « tous les paliers de gouvernement s’investissent ».