«J’étais très fier. J’ai eu la chance d’être le principal étudiant à travailler sur le projet, avec quelques collaborations. C’est très gratifiant pour moi de voir que mes travaux ont eu cet impact», déclare humblement Vincent St-Onge.
Afin de vulgariser à La Voix de l’Est et à ses lecteurs son projet, le chercheur compare d’emblée le polymère à une «chaîne de spaghettis», dont les propriétés peuvent être exploitées pour faire différents matériaux.
«Dans mon projet de doctorat, on a ajouté des défauts à cette chaîne, donc on peut imaginer des poils qui partent à droite et à gauche des spaghettis. Ça nous a permis de régler un gros problème au niveau de l’industrie des batteries, soit remplacer la membrane de polymère liquide par une solide. C’est plus sécuritaire et plus durable — bien qu’il reste encore des tests à faire.»
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Moins de risque d’incendie
En ce moment, la technologie utilisée dans les voitures électriques est la batterie au lithium-ion. «En gros, la fine membrane de polymère intégrée est imbibée de liquide. C’est un liquide inflammable et volatil. Et, un incendie de batterie, c’est très difficile à éteindre. Tant qu’il reste de l’énergie dans la batterie, le feu peut reprendre.» Le polymère solide permet de diminuer significativement ce risque — sans toutefois l’exclure à 100 %, puisque ça reste de la «matière organique».
Beaucoup de cas d’incendie causés par la batterie d’une voiture électrique ont été rapportés depuis l’avènement de la batterie au lithium-ion. On se souvient également de certains cellulaires qui explosaient, soudainement... Bref, la technologie évolue rapidement et il y a toujours place à l’amélioration et aux découvertes. Comme celle de Vincent St-Onge et de son ancien directeur de thèse, Jérôme Claverie, professeur au département de chimie de la Faculté des sciences de l’Université de Sherbrooke.
«Un autre avantage, explique M. St-Onge, est sa “transportabilité”. C’est plus facile de bouger un solide qu’un liquide, ainsi ça diminue les coûts de production et de transports.»
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Mise en marché «envisageable» dans 5 ans
Aujourd’hui, leur découverte se retrouve entre les mains d’Hydro-Québec, qui fera tous les tests nécessaires au niveau de la durabilité, du coût, de la sécurité et des conditions, avant de pouvoir être installée dans une voiture. «C’est impossible de savoir avec certitude, mais je crois qu’il est envisageable que ce soit mis sur le marché dans cinq ans.»
Depuis le dépôt final de son doctorat en chimie des polymères, le 16 novembre 2021, Vincent St-Onge travaille comme professionnel de recherche pour développer une plateforme de caractérisation des polymères. Il raconte avoir eu la piqûre pour la chimie des matériaux et l’étude de la «matière molle» lors de ses études universitaires, notamment grâce à ses professeurs. Tout ce qui touche au développement de l’énergie verte tombe aussi dans ses cordes.
Par ailleurs, le polymère développé par Vincent St-Onge pourrait servir à d’autres usages que les voitures électriques, comme des vêtements donnant des informations sur l’état de santé d’un patient ou d’un sportif.
«J’ai la chance de travailler dans un domaine en plein essor. Tourné vers l’avenir. C’est très motivant.»
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SON AVIS SUR LE RETRAIT DES VOITURES À ESSENCE EN 2035
Pas de doute, le Québec est un «joueur important» dans le domaine du développement des voitures électriques, affirme fièrement Vincent St-Onge.
Le gouvernement du Canada s’est en effet donné comme mandat d’interdire la vente de voitures à essence en 2035.
«D’un point de vue scientifique, c’est réaliste. D’un point de vue économique et politique, j’avoue avoir des réserves. Mais pour que ça puisse fonctionner, ça prend des soutiens financiers, mais aussi le soutien de la population. Si les gens veulent que ça aille là, ça va y aller», commente Vincent St-Onge, originaire de Saint-Alphonse-de-Granby.
Il faut faire attention, nuance-t-il, à ne pas croire qu’il n’y aura plus de voitures à essence sur les routes. «Pour ce qui est de contrer l’effet de serre, le problème n’est pas qu’il y a trop de voitures à essence sur les routes, mais peut-être qu’il y a trop de voitures, point.»
Le lithium, fait-il remarquer, n’est pas une ressource inépuisable. Des experts estiment que la fin de la ressource, si on maintenait notre consommation actuelle, serait vers les années 2050, rapporte le professionnel de recherche.
D’autres avenues technologiques sont explorées, cela dit, comme les batteries au sodium, un produit beaucoup plus abondant sur la terre.
«Les changements climatiques touchent tout le monde. Toutes les sciences, tous secteurs confondus, sont importantes. On a tous un rôle à jouer.» Billie-Anne Leduc