Former les enseignants de demain à l’ère de la réconciliation

Les étudiants du cours Perspectives autochtones en éducation ont présenté leur travail final sous forme d’exposition par affiches.

Dans le cadre de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, la première cohorte d’étudiants inscrits au cours optionnel Perspectives autochtones en éducation de l’Université de Sherbrooke présentait jeudi midi les différents travaux réalisés lors de la récente session estivale.


Littérature autochtone, immersion dans des communautés, fabrication de panier en frêne, pratiques ancestrales, langues et cultures : peu importe leurs intérêts, les étudiants sont unanimes. « Ce cours m’a transformé à jamais », ont confié plusieurs d’entre eux lors des présentations.

Étudiante au doctorat en éducation, Kara Edward s’estime particulièrement chanceuse d’avoir pu suivre le cours destiné aux étudiants du baccalauréat en enseignement et en adaptation scolaire et sociale.

« J’ai espoir que ce cours deviendra obligatoire pour tous », confie-t-elle d’emblée. « C’est une expérience transformatrice. Il y a un avant et un après. Comme enseignants en situation d’autorité, nous devons absolument être sensibilisés aux différents enjeux des communautés autochtones. »

Dans le cadre de ce cours, Kara Edward s’est intéressée à la littérature jeunesse autochtone et aux dommages que peuvent causer les stéréotypes associés à la culture autochtone dans les romans jeunesse. 

« Même si les dommages sont bien réels, il ne faut rien brûler », lance l’étudiante en faisant référence aux écoles ontariennes qui ont détruit près de 5000 livres jugés discriminatoires. « Ces livres sont de magnifiques outils d’apprentissage. Nous devons apprendre à les utiliser de manière juste. »

Sur sa table, différents romans jeunesse sont annotés soulignant les regards stéréotypés de différents auteurs. Une initiative qu’elle encourage et qu’elle recommande fortement aux enseignants et aux bibliothécaires. 

L’UdeS se serait par ailleurs engagée en ce sens, précise celle qui souhaite développer à long terme des initiatives d’accompagnement pour les enseignants allochtones afin qu’ils puissent inclure les savoirs et les perspectives autochtones à leur enseignement.

L’étudiante au doctorat et membre du comité M8wwa mamu Kara Edward s’est intéressée à la littérature jeunesse autochtone et aux dommages que peuvent causer les stéréotypes associés à la culture autochtone dans les romans jeunesse.

De son côté, Camille Lapierre s’est intéressée aux jeux de rôles. À titre de coordonnatrice de camps de jour dans la région de Lac-Mégantic, la jeune femme n’en pouvait plus d’entendre les enfants jouer aux « cowboys » et aux « Indiens ».

« J’ai vraiment eu une prise de conscience avec ce cours, raconte-t-elle. Et pourquoi ne pas inviter Nicole O’Bomsawin à venir discuter avec les enfants du camp? J’avais envie qu’ils apprennent en s’amusant. »

Nicole O’Bomsawin a répondu positivement à l’invitation de l’étudiante. « Elle a fait de la sensibilisation culturelle avec nous et nous avons fait de la reconnaissance territoriale. C’était magique. Les jeunes étaient captivés... et moi aussi. »

Parcours réflexif

Le cours Perspectives autochtones en éducation à l’UdeS a été construit et réalisé en collaboration avec le Grand Conseil de la Nation Waban-Aki (GCNWA), le Conseil en éducation des Premières Nations (CEPN), l’institut Kiuna et le Centre de services scolaire Kativik.

Les professeures de l’UdeS impliquées dans sa création étaient visiblement ravies de voir l’engouement entourant l’exposition des 26 étudiants jeudi après-midi.

« L’objectif du cours sous forme de parcours réflexif semble avoir été atteint... et apprécié », observe pour sa part Constance Lavoie, professeure en enseignement préscolaire et scolaire. La structure du cours prévoyait notamment que les étudiants « se positionnent » en déconstruisant les mythes et les préjugés associés à la culture autochtone. 

Ils devaient par la suite « s’outiller » en s’intéressant aux diverses ressources et pratiques éducatives autochtones. Les étudiants ont notamment visité le Musée des Abénakis et la communauté abénakise d’Odanak dans le cadre de cet objectif.

Finalement, les étudiants devaient « s’engager personnellement et professionnellement ».

« Ils partaient avec leur baluchon individuel en fonction de leurs intérêts. Et c’était très beau de voir leur engagement. Plusieurs d’entre eux pousseront d’ailleurs l’expérience à un second niveau en effectuant leur dernier stage en enseignement dans une communauté autochtone. »

Sabrina Moisan, Patricia-Anne Blanchet et Constance Lavoie, toutes trois membres du comité M8wwa mamu à l’Université de Sherbrooke.

En pleine refonte de programme en éducation, Constance Lavoie et ses collègues aspirent à ce que le cours Perspectives autochtones en éducation devienne obligatoire au baccalauréat en enseignement. 

« Les choses bougent dans les Universités du Québec entourant les savoirs et perspectives autochtones, mais nous sommes en retard de 30 ans sur les autres universités canadiennes. Le Québec est bon dernier », déplore-t-elle.

« Nous devons en faire plus. »