« Quand on regarde l’IPC brut, on n’a pas l’impact réel, explique-t-elle en entrevue téléphonique. Si c’est 4 %, c’est pire pour les plus démunis parce que ce qui augmente le plus, c’est le logement et la nourriture et ce sont deux catégories de dépenses qui occupent une part plus importante du panier des plus pauvres. »
L’augmentation pour le logement s’est chiffrée à 5,5 % entre juillet 2020 et juillet 2021 au Québec selon Statistiques Canada et globalement au pays l’indice du coût de remplacement par le propriétaire, qui est lié aux prix des logements neufs, a continué sa tendance à la hausse ; il a augmenté de 13,8 % d’une année à l’autre le mois dernier, ce qui a représenté la croissance annuelle la plus forte depuis octobre 1987.
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Selon une étude de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) parue en 2020, les dépenses alimentaires ont augmenté de 63 % en 20 ans et accaparent, en moyenne, 17 % de l’ensemble des dépenses des plus pauvres contre seulement 12,5 % pour les plus riches. À l’inverse, le recul du prix des loisirs depuis 20 ans sourit aux plus riches qui y consacrent de 7,7 % à 8,2 % de leurs dépenses, comparativement à seulement 4,9 % pour les plus pauvres.
« Depuis 20 ans, l’indice du prix des aliments augmente plus vite que l’IPC, déplore Mme Bonin. C’est grave parce que tous les gens qui ont des prestations gouvernementales comme les aînés ou les personnes sur l’aide sociale sont augmentés à l’IPC. Sauf que les aliments montent plus vite. Ça ne prend pas un grand mathématicien pour comprendre qu’ils devront couper quelque part. »
Toujours selon l’étude L’inégalité face à l’inflation, l’augmentation du coût du panier de consommation type des ménages les plus pauvres a été en 20 ans de près de 27 % plus forte que celle qui affecte le 10 % des familles les plus riches.
Les coûts reliés aux transports (7,6 %) et les soins de santé personnels (5,2 %) sont les deux secteurs les plus en augmentation. Les Québécois paient notamment leur essence 27,9 % plus cher qu’à pareille date l’an dernier. L’essence a d’ailleurs dépassé son niveau prépandémie de plus de 30 points et est à son prix le plus élevé depuis mai 2018.
Le prix des produits de base comme le bois d’œuvre, la hausse des coûts des chaînes d’approvisionnement, les mesures de relance gouvernementales, la demande refoulée et le coût des transports influencent aussi l’IPC à la hausse selon M. Dupuis.
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Spirale inflationniste
Selon M. Dupuis, la normalisation de l’IPC ne s’effectuera pas au plus tôt avant le premier trimestre de 2022.
« L’effet de base devrait s’amenuiser en début d’année 2022, mais selon mes projections, l’inflation pourrait se normaliser à partir d’avril et mai et retrouver une cible de 2 % à partir de juin et juillet 2022 », commente-t-il.
Si la tendance reste à la hausse après ces mois, il y aurait matière à s’inquiéter selon lui.
« Le problème avec l’inflation, c’est quand les gens commencent à l’anticiper et changent leur comportement, explique-t-il. Ce qui se passe, c’est qu’ils négocient des hausses salariales et s’ils font ça, on entre dans une spirale inflationniste. Les entreprises qui donnent de meilleurs salaires doivent afficher un prix plus élevé et ça revient nourrir les employés par rapport à leur salaire. La crainte qu’on a pour l’avenir, c’est que les gens commencent à croire que cette hausse va durer dans le temps. C’est comme une prophétie qui devient autorévélatrice. »
De plus, l’IPC québécois devrait rester supérieur à celui canadien dans les prochains mois selon M. Dupuis.
« L’économie au Québec est beaucoup plus près de fermer l’écart de production et beaucoup plus près d’un retour à ses tendances à long terme que les autres économies du Canada, mentionne-t-il. Je ne serais pas surpris de voir l’inflation au Québec être plus élevée que la moyenne canadienne pour les 12 à 24 prochains mois. »