Intervenant en soins spirituels : trouver du sens avec les patients en détresse

Stéphane Rivest (debout) enseigne sa profession d’intervenants en soins spirituels à l’Université de Sherbrooke.

Dans la dernière année, l’image du travailleur québécois moyen est devenue celle d’un bureau de télétravail au confort discutable ou encore d’un milieu de santé aseptisé. Or, pendant ce temps œuvraient toujours ces gens qui ont choisi le chemin d’un métier plus singulier. Tous les lundis, La Tribune vous présente le portrait d’Estriens qui pratiquent l’un de ces métiers méconnus et souvent oubliés, qu’ils soient émergents ou plutôt en voie de disparition. Aujourd’hui, rencontrez l’intervenant en soins spirituels Stéphane Rivest.


Quand la maladie frappe, quand la mort s’annonce, certaines personnes vont pleurer. Certaines éprouveront une très grande colère. D’autres vont fuir. Mais plusieurs vont se poser des questions sur le sens à donner à cette nouvelle déroutante. « Pourquoi moi? » « Qu’est-ce qui m’attend après la mort? » « Ma vie a-t-elle encore un sens? » « Est-ce que je dois me battre? »

Tous les jours, Stéphane Rivest entre dans des chambres d’hôpital où se trouvent des gens complètement bouleversés. Il met les pieds dans des chambres où des patients et des familles sont plongés en plein cauchemar.

Il doit établir le contact rapidement, sans détour, et surtout sans préjugés culturels ou religieux.

En sa qualité d’intervenant en soins spirituels, Stéphane Rivest tend une main à ces personnes en détresse.

Mais quel est donc le rôle d’un intervenant en soins spirituels?

L’intervenant en soins spirituels exerce des activités de soutien et d’accompagnement à la vie spirituelle et religieuse des patients, à leur famille ainsi qu’à leurs proches.

 « On rend visite aux patients et on identifie leurs besoins spirituels et religieux. Là où on agit, c’est sur la transcendance. La transcendance, c’est un mot compliqué pour parler de ce qui va au-delà de nos cinq sens. On parle de destins, des liens qui nous unissent, de ce qui nous arrive après la mort, de nos croyances, des questions du sens aux épreuves qu’on traverse », indique-t-il.

Ces intervenants spirituels sont fort appréciés dans le réseau de la santé. « Nous avons un rôle important parce qu’il n’est pas assumé par personne d’autre dans le réseau de la santé », mentionne Stéphane Rivest.

Au Québec, ils sont en effet peu nombreux à occuper cette fonction. En Estrie, ils sont 15 à travailler au CIUSSS de l’Estrie-CHUS. En comparaison, il y a plus de 600 travailleurs sociaux.

La profession est toute récente dans le réseau de la santé. En effet, c’est en 2014 que l’accompagnement des malades a été revu dans l’ensemble des établissements de santé de la province pour placer la spiritualité, et non la religion, au cœur de la démarche d’accompagnement.

Le service est offert autant par des prêtres catholiques — qui sont de moins en moins nombreux — que par les intervenants en soins spirituels, qui sont laïques. Les établissements de santé ont pris ce virage pour respecter les orientations du gouvernement du Québec, qui souhaite voir la laïcité prôner dans ses institutions.

Stéphane Rivest est chargé de cours à l’Université de Sherbrooke où il enseigne sa profession. Car des postes, il y en a beaucoup à combler. Et ce n’est qu’un début.

« C’est une profession d’autant plus intéressante pour les jeunes qu’elle est en pleine évolution. Elle n’est plus attachée à la religion. Il y a un renouvellement des effectifs qui s’opère. C’est une professionnalisation d’un travail qui se faisait déjà, qui était déjà là, mais qui est reconnu maintenant. On fait maintenant des notes dans les dossiers des patients, comme le font les travailleurs sociaux par exemple. »

« Il y a aussi beaucoup d’intérêt en recherche sur l’importance de la spiritualité. On comprend maintenant que la maladie n’affecte pas que le corps, mais toute la sphère biopsychosociale, dans une approche holistique de la personne. Maintenant, on sait qu’il ne faut pas seulement s’occuper de la maladie mais bien de la personne dans son ensemble », indique-t-il.

« On peut voir par exemple des patients qui n’ont plus le goût de vivre parce que la vie n’a plus de sens pour eux, parce qu’ils se sentent un poids pour leurs proches, ou encore on va voir des gens qui ont peur de mourir. C’est dans ces cas-là que je peux intervenir », dit-il.

« On nous associe beaucoup à la fin de vie, et c’est vrai que ces rites sont importants pour beaucoup de personnes. Cependant, nous pouvons intervenir dans toute la trajectoire de la maladie et parfois jusqu’à la fin de vie. »

Et dans cette quête de sens, les patients pourraient être accompagnés d’intervenants en soins spirituels. 

« Nous sommes beaucoup associés à la religion, mais nous on ne demande pas aux gens s’ils sont croyants ou non. Les annonces médicales ont un impact sur la dimension spirituelle, sur la question du sens, sur les croyances, peu importe quelles sont les croyances, que ce soit en Dieu, en l’énergie des pierres, aux médecines douces… » indique-t-il.

Pour choisir cette profession, il faut assurément avoir un cœur généreux.

« Pour être intervenant spirituel, il faut aimer les gens, il faut avoir une personnalité bienveillante, avoir envie de prendre soin des autres », explique Stéphane Rivest, qui s’est lui-même réorienté vers cette profession après avoir enseigné à des adolescents au secondaire pendant 14 ans et qui est aussi un spécialiste de la méditation pleine conscience.