Pour une fois, j’étais heureux de ne pas partager la route avec un ou plusieurs passagers dans le véhicule. Ils se seraient extasiés à grands coups d’exclamations sans que je puisse profiter pleinement du même spectacle qu’eux. Supplice! Tout de même, le coup d’œil sur ces géantes montagnes qui se trempent les pieds dans la baie m’a incité à m’arrêter dès qu’on annonçait une halte pour observer la vue. Il n’y en a pas des tonnes, de ces haltes, entre Vancouver et Squamish, et celles que je choisissais ne me paraissaient pas particulièrement bien placées en comparaison des images qui se lançaient dans le pare-brise directement sur la route, où il m’était impossible de m’immobiliser.
J’ai pris des notes mentales chaque fois que je traversais une petite communauté, que j’apercevais une plage, pour des arrêts futurs que je n’aurais pas le temps de faire sur le chemin du retour.
Dans la baie, à Squamish, le ciel se colorait des grands cerfs-volants des kitesurfers, rassemblés par centaines pour profiter des conditions éoliennes idéales à la pratique de leur sport. C’était, du même coup, le symbole parfait pour illustrer l’attraction principale de cette petite ville et de ses environs : le plein air.
Pour ceux, comme moi, qui ont passé la journée à vaquer à d’autres occupations et qui n’ont enfilé les bottes de marche qu’à moitié, la populaire Sea to Sky Gondola constitue un compromis parfait pour relier le bas de la route et le sommet des montagnes. Si les hauteurs ne vous donnent pas le vertige, le prix de la remontée, à 54 $ pour un achat en ligne, pourrait vous faire plier les genoux un brin. Mais parce qu’on est là, qu’on n’a jamais encore vu la Colombie-Britannique d’en haut, dans mon cas, on sort la carte de crédit.
Avoir voulu suer un peu, prolonger le plaisir et payer le double du prix, j’aurais pu monter sur le pouvoir de mes mollets, avec la Via Ferrata. Mais l’aller-retour, seul dans une gondole pouvant accueillir huit personnes, me souriait davantage. En tout juste dix minutes, on se retrouve à 885 mètres au-dessus de la baie de Howe et on sent bien le vent qui faisait le plaisir des kitesurfers sur la grande flaque.
Parce que c’est dans le ton, visiblement, dans la province de l’ouest, on peut s’élancer sur un pont suspendu d’une centaine de mètres de longueur. De là, on voit plus loin, à 360 degrés, que ce que nous offrait le pont de Capilano, un peu plus au sud. En temps de COVID, il a été décrété qu’on ne pouvait l’emprunter que dans une seule direction. Le port du masque, dans la gondole, le restaurant du sommet et sur le pont, est aussi obligatoire depuis peu.
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L’intérêt de prendre la gondole, c’est aussi de s’offrir des marches ou des randonnées, de difficultés variables, à partir du sommet de la montagne. Avant de partir, il faut tenir compte de l’heure à laquelle le remonte-pente cesse ses activités. Mais la bonne nouvelle, c’est qu’on peut prendre avec un grain de sel les temps de marche indiqués sur la carte des sentiers.
Je n’ai évidemment pas été en mesure de tester tous les trajets proposés, mais on m’avait suggéré le sentier du Panorama, un tracé facile de 1,3 kilomètre avec une dénivellation faible. L’intérêt, ici, c’est la plateforme qui donne l’impression de s’avancer dans le vide et qui donne envie de s’attarder. Elle a judicieusement été construite à mi-chemin dans la boucle qui nous reconduit vers l’arrivée des gondoles. On suggère de prévoir au plus une heure et demie pour cette petite marche de santé très adaptée pour les familles, en précisant que les plus rapides auront rallié la ligne de départ-arrivée en une heure.
Même avec les deux pieds dans la même bottine et des arrêts pour des photos, sans entraînement olympique et sans la stature d’un coureur de sentiers, il m’a fallu moins d’une demi-heure pour me mettre à la recherche d’un autre défi. Nuance : si on prend le temps de lire les panneaux d’interprétation de la nature, on s’en trouvera forcément un peu plus ralentis.
En fait, les temps suggérés varient entre les panneaux d’affichage, sur la montagne, et ceux indiqués sur le site internet de la gondole. L’information en ligne paraît d’emblée plus réaliste.
Plus agréable pour ceux qui veulent rentabiliser leurs godasses, le sentier Highline ne fait qu’un peu plus d’un kilomètre et s’adresse à un public intermédiaire, paraît-il. C’est qu’on nous y fait lentement monter sur une paroi rocheuse, de laquelle on descendra la section la plus abrupte en posant la main sur une corde. On est loin de l’escalade, bien sûr, mais on a l’impression de travailler un peu plus pour atteindre un point de vue qui se respecte. Du point le plus élevé, on aperçoit la ville de Squamish et la baie de Howe, mais aussi des montagnes qui s’éloignent dans l’autre direction.
Seul au monde sur ce sentier, à voir les neiges qui, en plein mois d’août, tenaient bon sur d’autres sommets, j’ai eu l’impression un instant de participer à une aventure enlevante comme dans le film Wild, de Jean-Marc Vallée. Ça n’avait rien à voir, évidemment. Mais le calme de la nature s’imposait, comme le constat qu’il y a tellement plus grand que soi. Ça valait quelques grandes lampées d’air pur. Vivement l’apaisement.
En fin de parcours, le soleil commençait à décliner subtilement, comme un signe qu’il voulait se réapproprier sa montagne. Allez ouste! On redescend.
Il ne restait plus qu’à explorer Squamish pour casser la croûte avant de marquer une pause dans l’expédition. Là, les touristes ne s’étaient pas éloignés de l’autoroute pour chercher leur repas. À travers les rues presque désertes aux commerces déjà fermés, il y avait néanmoins bien un ou deux restaurants au menu plus élaboré que celui des fast-foods d’autoroute.