Chronique|

Contemplation au nord de Vancouver

Le phare de Point Atkinson, au nord de Vancouver, est considéré comme un monument historique par le gouvernement du Canada.

CHRONIQUE / Elle est où la prise USB dans la voiture de location? C’est la question que je me suis posée, dans le garage sombre du Hertz centre-ville, à Vancouver. Et j’ai abandonné. C’est le résultat de l’impatience de partir à l’aventure, après avoir attendu sagement le traitement anti-COVID réservé aux véhicules que d’autres clients venaient juste de rapporter. Parce que je n’y voyais rien. Parce que je pensais m’en sortir sans GPS.


Mais non! C’est un pont au sud de Vancouver que j’ai traversé en premier avant de réaliser que Whistler et ses montagnes se trouvaient dans l’autre direction. Bon roadtrip Champion!

La bagnole pas si technologique que ça a traversé le fameux parc Stanley, véritable Central Park britanno-colombien, offrant une perspective complètement différente en son cœur que dans les sentiers longeant la rive.

Quelques kilomètres plus au nord, à pas plus de 30 minutes des gratte-ciel, je me garais au parc du pont suspendu de Capilano. Tout guide touristique vous le dira : il s’agit d’un incontournable pour quiconque visite Vancouver. Ce qu’on contournerait, c’est le prix du billet, fixé à 55 $ pour un adulte.

L’attraction, ici, c’est le pont suspendu de 137 mètres de long qui surplombe la rivière Capilano à 70 mètres de hauteur. Il est à peine plus court que celui de Coaticook, dans les Cantons-de-l’Est, mais est perché une vingtaine de centimètres plus haut. On y a aussi la démarche plus houleuse, mais on apprécie que la structure originale, construite de cordes et de planches de bois en 1889, ait été renforcée en remplaçant les cordes par des câbles en acier. Aujourd’hui, 97 éléphants pourraient semble-t-il la traverser simultanément sans qu’il s’effondre.

Pas de danger, donc, alors que le nombre de visiteurs admis sur le pont est limité, je vous le donne en mille, à cause de la pandémie. On le parcourt dans une direction à la fois, en alternance. Et à mon grand désarroi, il est interdit de sauter pour qu’il s’agite comme s’il avait été secoué par une bourrasque. Le gamin en moi a boudé pendant la traversée. L’adulte en moi a bougonné que c’était moins cher et plus beau chez nous, à Coaticook. Et après, il a pris le temps de s’extasier quand même. De la trouver belle, cette nature, et génial, ce point de vue à vol d’oiseau.

La vérité, c’est que le parc du pont suspendu de Capilano mise sur les expériences inusitées de courte durée et le contact avec la nature. Plus que le pont, c’est la Treetops Adventure, une série de passerelles suspendues entre huit sapins de Douglas de 250 ans, qui m’a convaincu d’avoir bien investi mes économies. Les plateformes sont attachées parfois jusqu’à 30 mètres dans les airs sans qu’on ait planté la moindre vis dans les troncs. Un système de collets fait tout le travail pour ne pas endommager les arbres et leur permettre de poursuivre leur croissance.

Dans une foule dense, probablement que le parcours à hauteur d’écureuil m’aurait moins plu. Mais en se retrouvant seul, entre le sol et la canopée, on ressent toute l’énergie que dégagent ces géants d’un autre siècle. On apprécie, aussi, que d’autres n’aient pas choisi de tout raser pour y construire de chics condos. Et pendant qu’on y est, on respire un grand coup l’odeur boisée.

Le pont suspendu de Capilano est plus court, mais plus haut, que celui de Coaticook, dans les Cantons-de-l’Est.

Pour peu qu’on ait envie de lire, quelques panneaux nous renseignent sur la végétation, sur l’âge vénérable de certains arbres qui nous dominent. Une autre boucle nous propose une courte marche pour nous rapprocher de la rivière avant de revenir vers le pont suspendu.

Avoir survécu à la traversée aller-retour immunisera sans doute ceux souffrant du vertige pour la dernière portion du parcours proposé aux visiteurs. La Cliffwalk, qu’on pourrait traduire littéralement par marche à flanc de falaise, nous emmène sur une promenade elle aussi suspendue, accrochée qu’elle est à la falaise de granit. Moins zen que la marche en forêt, ce parcours offre sans doute les points de vue les plus intéressants, ne serait-ce que parce que les structures sont particulièrement impressionnantes.

Parce que je ne crois jamais ce qu’on me dit, j’ai soupiré quand on m’a assuré qu’il fallait prévoir entre deux et trois heures dans le parc pour tout voir. Vrai qu’on reste un peu sur notre faim de constater que les sentiers ne nous permettent pas de nous perdre plus profondément en nature, mais vrai aussi que deux bonnes heures passent sans qu’on s’en aperçoive. Apparemment que Lynn Canyon, pas particulièrement loin de là, propose lui aussi un pont suspendu, mais tout à fait gratuitement. Je n’ai malheureusement pas réussi à comparer les deux.

Moins d’une demi-heure après mon départ, après avoir finalement et heureusement pu activer le GPS, j’ai ziguezagué jusqu’au phare de Point Atkinson. On stationne la voiture gratuitement sous un bouquet de conifères, on suit le sentier rectiligne jusqu’à la côte et... on est déçu par le point de vue indiqué par un gros panneau « View point on the lighthouse ». On n’y aperçoit que des arbres et un petit toit rouge.

Mais la persévérance paye si on s’aventure tout à fait légalement jusqu’à la maison du gardien du phare ou, un peu plus bas sur la grève, où on peut voir l’ouest de Vancouver au loin. Le phare, monument historique reconnu par le gouvernement du Canada, se tient là, sur sa péninsule, dans le lointain.

Construit en 1912, d’une hauteur de 18 m, le phare est un des premiers en son genre, avec une tour hexagonale, et possède une puissante lumière pour guider les navires. Sa structure de béton, innovante pour l’époque, remplaçait la construction originale en bois, qui datait de 1875.

Le site est parfait pour un pique-nique ou pour prendre congé de l’action urbaine. Avec plus de temps, on peut explorer les sentiers du parc de 75 hectares.

Mais pour moi, la journée ne faisait que commencer. J’avais rendez-vous avec les montagnes plus au nord. En empruntant l’autoroute Sea-to-Sky, je n’ai pas tardé à avoir des montagnes plein les yeux...