Les Drs Marcel Émond et Francis Gill cherchaient une façon d’augmenter la capacité de protection des équipes médicales lorsqu’elles doivent intuber un patient infecté par la COVID-19, une procédure risquée parce qu’elle peut entraîner la projection de gouttelettes provenant des voies respiratoires, explique le Dr Julien Clément, directeur des services professionnels adjoint pour le CHU de Québec et spécialiste en traumatologie.
«Quand on intube quelqu’un, on va directement dans les voies aériennes. […] Ça [la boîte] protège contre les aérosols et les gouttelettes», précise le Dr Clément. Placée par-dessus la tête du patient, la boîte, transparente, a été conçue «afin de permettre le passage des mains pour que la personne puisse travailler», explique-t-il.
Selon le Dr Clément, le CHU de Québec aurait reçu ses premiers «exemplaires» en fin de journée, mardi. «On m’a dit qu’on en avait utilisé une [boîte] cette nuit», rapporte le directeur des services professionnels adjoint de l’établissement.
Le concept lui-même n’est pas nouveau puisqu’on trouve déjà des prototypes similaires sur internet, indique le Dr Clément.
«Mais la beauté du produit, c’est qu’il a été adapté pour la taille des civières qu’on a et pour que ce soit utile pour nous. Il est en plus fabriqué par un manufacturier de la ville de Québec, de sorte qu’on peut s’approvisionner rapidement», souligne le médecin. Le processus d’acquisition, dit-il, s’est fait à une vitesse accélérée.
«La protection et la sécurité des membres du personnel, c’est une priorité pour le réseau de la santé. On ne peut pas se permettre d’avoir des professionnels de la santé et des médecins qui tombent malades. Il faut prendre les mesures nécessaires pour réduire les risques», insiste le Dr Clément. Le produit est non seulement peu dispendieux, mais «le rapport coût-bénéfice est excellent», estime-t-il. Selon lui, tous les hôpitaux du CHU de Québec devraient être pourvus de ces boîtes d’ici «quelques jours».
Joint par Le Soleil, le président de Multifab, Jean-François Bouchard, a indiqué que son équipe avait déjà fabriqué 25 boîtes de protection pour le CHU de Québec, qui n’avait toutefois pas encore passé formellement sa commande au moment d’écrire ces lignes, jeudi après-midi.
Les Drs Émond et Gill auraient contacté Multifab lundi pour savoir si l’entreprise était en mesure de fabriquer la fameuse boîte vue sur Internet, rapporte M. Bouchard.
«On a fait quelque chose de plus ergonomique et de stérilisable. En 24 heures, on a fait trois versions. Ils [les Drs Émond et Gill] ont fait des tests sur mannequin pour s’assurer que le geste médical soit faisable et soit fait vite. Après la troisième version, c’était parfait. On a commencé à produire hier [mercredi], et la commande [de 25 boîtes] a été complétée», indique le président de Multifab.
Selon lui, l’entreprise du quartier Saint-Sauveur, «très robotisée», serait en mesure de produire plusieurs dizaines de boîtes de protection par jour. «On pourrait suffire à la demande québécoise ou pancanadienne en l’espace de quelques jours», calcule Jean-François Bouchard.
Actuellement, les demandes viendraient de Montréal, de Gatineau, de Thetford Mines et de La Pocatière, énumère M. Bouchard, dont l’entreprise enverra aussi les dessins de son produit et les méthodes de fabrication en France.
Multifab a aussi fabriqué en quelques jours plus de 1000 panneaux de protection pour les caissiers de la chaîne Couche-Tard. «Grâce à nos équipements, nous parvenons à produire les boîtiers et toute autre commande essentielle avec seulement cinq employés en poste, alors que nous sommes une quarantaine généralement, et tout en respectant les normes de distanciation et autres mesures de protection», souligne son président.