Technologie 5G: de la vitesse au détriment de la santé ?

Le Dr Paul Héroux a visité Magog et Sherbrooke pour parler des ondes électromagnétiques, dimanche.

L’inquiétude d’une partie de la population envers la technologie 5G et les ondes électromagnétiques en général est partagée par le physicien, professeur à la Faculté de médecine de l’Université McGill et directeur du programme de santé au travail, Paul Héroux. Le chercheur explique que l’ensemble de ces ondes a, depuis des années, des incidences prouvées sur la santé des êtres vivants.


La 5G devrait succéder à la technologie 4G qui est actuellement utilisée dans la majorité des téléphones intelligents. Selon le site web du gouvernement canadien, « la 5G transformera profondément les télécommunications sans fil, en ouvrant la voie au réseau des générations futures qui comprendra plus d’appareils et permettra des communications plus rapides et de plus grandes vitesses. [...] Avec le 4G, la latence est d’environ 50 millisecondes. Pour savoir à quel point cela est rapide, un clin d’œil prend de 0,1 à 0,4 seconde, soit de 100 à 400 millisecondes. Pour la transmission sans fil de données avec le 5G, il faudra encore moins de temps, environ une milliseconde, soit un millième de seconde », peut-on lire. 

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Les ondes électromagnétiques 5G sont relayées par des antennes. 

Santé

« Je ne suis pas un activiste, je suis un professeur à l’Université McGill, précise d’entrée de jeu le Dr Héroux, qui a présenté deux conférences en Estrie, dimanche, à l’invitation du mouvement citoyen Stop 5G Magog-Sherbrooke. J’enseigne, je fais de la recherche et je publie des articles. Les gens de Sherbrooke m’ont demandé de faire une conférence, alors je dis oui. Je ne cherche pas d’occasions de publicité, j’ai beaucoup de choses à faire. »

Que va-t-il se passer si la 5G entre en vigueur ? « Les cancers vont devenir pires [ce qui va] raccourcir la vie utile de la population. D’ailleurs, c’est déjà en cours, car on détériore l’environnement du point de vue chimique et électromagnétique. Actuellement, on investit beaucoup d’argent dans la médecine de précision pour tenter d’éliminer les tumeurs. Avec l’environnement électromagnétique qui va augmenter, on va contrecarrer complètement ce plan », répond le Dr Héroux.

Doutes

Le Dr Héroux fait valoir sa très vaste expérience en ce qui concerne la question de l’électromagnétisme. « Quand j’étais un jeune chercheur, la pensée offerte par l’industrie était que ces effets des ondes électromagnétiques étaient impossibles. On disait que ça n’avait pas de sens, qu’on ne devrait pas s’en préoccuper. »

« C’était une question qui m’apparaissait un peu douteuse, poursuit-il. Au cours des années, j’ai eu l’occasion de faire personnellement des recherches sur du matériel humain pour voir si c’était vrai. Au début, je croyais qu’il allait être très difficile de trouver des preuves que cette proposition était fausse. Quand j’ai fait des recherches, j’ai réalisé que c’était tout le contraire. »

« Je me suis rendu compte que c’était uniquement une question d’intérêt industriel et financier. Une industrie fleurissante comme celle de la distribution électrique et des télécommunications veut s’extraire et se soustraire d’une évaluation des effets de santé. Ils disent que ça pourrait coûter quelque chose. C’est commun en santé publique. »

Selon lui, la science n’a pas une grande influence sur les décisions de la société. « Les gouvernements ont leur position et les compagnies ont les leurs. Le résultat est une intégration de tout ça. La science, ultimement, a beaucoup d’influence, mais elle est lente. Elle prend du temps. Elle n’a pas autant de muscles qu’une industrie qui a des dizaines de milliers d’employés qui peuvent propager des mensonges », analyse-t-il.  

« Je dis ça de manière très réfléchie. De dire de ne pas s’inquiéter, car c’est trop faible, ce sont de purs mensonges qui ont été concertés par l’industrie pour détourner l’attention du public de la vérité », renchérit le professeur, qui dit que les porteurs de ce mensonge ne sont probablement pas mal intentionnés, mais mal informés. 

Solution

Pour lui, utiliser la fibre optique serait une option représentant moins de dangers. « Tout le monde dans l’industrie des télécommunications sait qu’il n’y a qu’une technique puissante : la fibre optique. Pour avoir des données en quantité à l’avenir, à cause de la fiabilité, de la capacité, de la sobriété énergétique, il n’y a que la fibre optique qui peut nous assurer un avenir différent. La 5G, ce n’est qu’une patente pour vous vendre un cellulaire l’an prochain », avertit le physicien.   

Dans des domaines ciblés, la 5G peut être efficace, relativise-t-il. « Si vous avez un paquet de robots dans une bâtisse qui doivent tous interagir entre eux et qui sont tous mobiles, on peut imaginer des endroits comme ça, la 5G est une très bonne idée. Pour un individu, le téléphone cellulaire nous donne déjà les services qu’il doit rendre. [...] Tenter de vendre un modèle encore plus performant, c’est juste une question de marketing », pense le chercheur. 

OMS

Sans parler de la 5G, l’Organisation mondiale de la Santé consacre une partie de son site aux champs électromagnétiques. « Au cours des 30 dernières années, environ 25 000 articles scientifiques ont été publiés sur les effets biologiques et les applications médicales des rayonnements non ionisants, peut-on lire sur leur site web. Certains peuvent penser que cet effort de recherche est encore insuffisant, mais les connaissances scientifiques acquises dans ce domaine sont désormais plus complètes que celles que l’on possède sur la plupart des produits chimiques. S’appuyant sur un examen approfondi de la littérature scientifique, l’OMS a conclu que les données actuelles ne confirment en aucun cas l’existence d’effets sanitaires résultant d’une exposition à des champs électromagnétiques de faible intensité. Toutefois, notre connaissance des effets biologiques de ces champs comporte encore certaines lacunes et la recherche doit se poursuivre pour les combler. » 

Selon le site du Gouvernement du Canada, « l’utilisation de ces émetteurs-récepteurs par l’équipe de recherche du Centre de recherches sur les communications (CRC) est entièrement conforme aux lignes directrices de Santé Canada ».

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Des citoyens se questionnent

Plusieurs dizaines de curieux se sont déplacés au Club Aramis de Magog pour entendre la conférence du Dr Héroux sur le 5G. En entrant, une affiche demandait aux visiteurs de mettre leur téléphone cellulaire sur le mode avion en plus de le fermer. 

En plus du Dr Héroux, la spécialiste en inspection électromagnétique Julie Galipeau offrait une présentation. 

Marie-Lucie Vachon, de Sutton, venait à cette conférence pour « chercher des confirmations ». « J’ai beaucoup lu sur la question des effets des rayonnements électromagnétiques sur la santé et l’environnement, dit-elle. Je suis perplexe. Je sais que beaucoup d’études indépendantes de l’industrie démontrent qu’il y a des effets. » 

« Les propos ne viennent pas de quelqu’un qui craint, mais quelqu’un qui sait, analyse-t-elle, en parlant du Dr Héroux. C’est une personne extrêmement crédible. »

Mme Vachon dit avoir ressenti des effets de l’électrosensibilité. « Quand on ressent soi-même des effets comme la perte du sommeil, des étourdissements, des battements cardiaques accélérés et qu’on ne réussit pas à les attribuer à quelque chose de précis, je peux relier ça au fait qu’à l’extérieur de ma maison, j’ai deux compteurs communicants. Au bout de deux années, on a eu l’option de les changer. Quand on l’a fait, les symptômes ont disparu », mentionne-t-elle. 

Magalie Tétrault de Granby, elle, s’est déplacée pour s’informer. « Je trouve qu’on aurait davantage à en savoir un peu plus par rapport à la technologie 5G avant de procéder à des installations d’antennes, exprime-t-elle. Quand on regarde des reportages européens, on peut voir que des gens sont affectés par cela et qu’il y a des répercussions sur la nature. »

Yvon Lamontagne, conseiller municipal de Magog, a assisté à la conférence pour la même raison. « Le but premier est de venir chercher des renseignements. Il y a toujours deux côtés à la médaille. Je viens aussi comme citoyen. De la manière dont on en entend parler, les ondes semblent très puissantes. On va voir ce que ça peut apporter à Magog. C’est sûr qu’on est inquiets, il faut être prudents là-dedans », résume-t-il.