Chronique|

Quand Strasbourg charme à moitié

La vue de la Petite France, à partir du barrage de Vauban, est certainement une des plus populaires à Strasbourg.

CHRONIQUE / L’anticipation aura tué la magie. Souvent décrite comme l’une des plus belles villes de France, Strasbourg croule sous une tonne de pression quand vient le temps de séduire. C’est le blind date où on promet le match parfait. Et malheureusement, le coup de foudre ne s’est pas produit.


Strasbourg, c’est la capitale de l’Alsace, dans l’est de la France. De là, en s’étirant le cou, on peut presque voir l’Allemagne, qui s’étend juste à côté. Et on comprend pourquoi les villes voisines, plus petites, moins touristiques, jalousent un peu la grande sœur d’attirer autant les masses. Vrai que c’est joli et animé Strasbourg, et qu’on aura davantage envie d’y rallonger une balade que dans les petites communautés voisines.

Mais voilà : autant la ville est belle, autant elle vaut bien le détour, autant j’ai eu peine à m’expliquer pourquoi elle devance aussi largement ses voisines en termes d’attraits.

En tram, je suis arrivé à la station Homme de fer, dans la vieille ville, parce que les wagons n’allaient pas plus loin. J’ai traversé la place Kléber sans vraiment voir ses fontaines. Ce jour-là, on préparait de toute évidence une fête et on s’efforçait d’ériger une scène.

Les sens de la vue et de l’odorat sont rapidement pris d’assaut, dans une ville comme Strasbourg, en raison de la panoplie de restaurants et de pâtisseries qui font engraisser avant même qu’on les ait regardés. Côté bouffe, ils savent s’y prendre les Français, et j’oserais dire que les Alsaciens ont quelques cordes uniques à leur arc.

Ce qui charme et fascine, c’est vraisemblablement la quantité de maisons à colombages, autrefois détenues par des citoyens plutôt pauvres, alors qu’elles sont maintenant hors de prix. Si on a voulu un temps cacher leur structure de bois, les façades ont été restaurées pour retrouver leur apparence d’origine.

À Strasbourg, on pousse la surprise un peu plus loin dans le quartier de la Petite France, où la Maison des tanneurs est une attraction. On remarquera surtout le grenier, conçu avec des ouvertures sans vitre parce qu’il devait être ventilé pour le séchage des peaux. Dans le quartier, on pourra d’ailleurs apercevoir d’autres greniers qui ont eu le même usage dans le passé.

La cathédrale Notre-Dame est l’une des attractions de Strasbourg. Grimper une de ses tours offre une vue imprenable sur la ville.

Un des meilleurs endroits pour prendre la mesure de la ville est la cathédrale Notre-Dame, où l’on peut grimper les 66 m d’une des tours pour avoir l’impression un instant d’être un oiseau au-dessus de Strasbourg. Le nombre de visiteurs étant limité pour des raisons de sécurité, la tour ferme à l’occasion pour quelques dizaines de minutes afin de respecter la capacité.

Pour croquer un des clichés les plus populaires de la ville, et je l’avoue, pour un moment plus agréable, c’est plutôt au barrage Vauban que je recommanderais aux visiteurs de se rendre. De là, on aperçoit le quartier de la Petite France et on peut s’amuser à observer les marins du dimanche qui peinent parfois à contrôler leur embarcation sur l’Ill.

Parlant de la Petite France, si le quartier paraît coquet et attire son lot de curieux, il doit son nom à une maladie peu enviable. Selon le guide bénévole qui me faisait découvrir Strasbourg, on trouvait notamment, il y a quelques centaines d’années, des prostituées dans les rues du quartier. En 1687, un hôpital destiné aux malades de la syphilis, qu’on appelait alors le mal des Français, y a été installé. Il aurait donc donné son nom au quartier.

À défaut de se payer une croisière sur un bateau-mouche, on peut à tout le moins arpenter les quais qui font le tour de la Grande Île. Les amoureux y flânent main dans la main, les groupes d’amis s’y rassemblent pour ralentir leur course contre la montre, les pieds ballants au-dessus de l’eau. On y observe les vieilles maisons en contre-plongée, humant de temps à autre le parfum des fleurs qui décorent les façades.

Mon coup de cœur est venu pour le Musée d’art moderne et contemporain, dont les murs extérieurs étaient peints de bandes dessinées. On y entre dans un sas où il faut forcément s’arrêter quelques secondes avant qu’on laisse l’ouverture sur l’intérieur s’agrandir. Là, il n’y a pas à dire, on n’entre pas comme dans un moulin. La plupart des grands mouvements artistiques y sont représentés et la pause qu’on y fait est probablement la meilleure option pour les jours de pluie.

À condition d’exclure les haltes gourmandes, bien sûr.

À Strasbourg, on ne cherche pas bien longtemps pour mettre la dent sur la flammekueche, cette tarte flambée apparentée à la pizza. Le jambonneau est aussi une option populaire au menu, comme les spaetzles, ces pâtes alsaciennes servies en plat principal ou en accompagnement. Pour une expérience totalement touristique et traditionnelle, on mange dans une winstub, un bar-restaurant à vin typique de l’Alsace. Mais attention, les touristes s’y relaient sans ménagement, laissant peu de temps aux serveurs pour souffler.

Bref, il n’y a rien qui cloche avec Strasbourg, mais la relation restera platonique. Ce n’est pas elle… c’est moi. Je n’ai pas eu de coup de foudre, mais je la reverrai sans doute comme amie. Parce qu’elle est attachante malgré tout.