Chronique|

Trèves et ses ruines romaines

La Porta Nigra, construite au 2e siècle, est l’une des principales attractions de Trèves en Allemagne.

CHRONIQUE / La filée de voitures dans la voie de gauche s’éternisait. Le GPS indiquait qu’il faudrait tourner à gauche sur le pont Käiser-Wilhelm plusieurs centaines de mètres plus loin. Pour traverser la Moselle et atteindre Trèves, une petite ville de l’ouest de l’Allemagne, il fallait donc se montrer patient comme au lendemain de Noël, à l’entrée des magasins.


Il faut croire que les accès sont limités, ou que la circulation est mal contrôlée par la signalisation, à l’entrée de Trèves, parce que les rues de la ville, une fois la rivière passée, ne bouchonnent pas du tout. À 115 000 habitants, le contraire aurait été étonnant.

Il reste que la navigation dans la vieille ville demeure un tantinet risquée, piétons et sens uniques posant quelques défis. Ne le dites à personne, mais j’ai joué les dyslexiques en apercevant sur le tard quelques panneaux fléchés que mon GPS n’avait pas enregistrés. Abandonner le véhicule à quelques mètres du cœur de la vieille ville aura été une libération.

Trèves s’imposait dans mon trajet entre Cologne, plus au nord, et l’Autriche, où je finirais le voyage. En cherchant les sites dignes d’intérêt sur mon itinéraire, ceux inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO par exemple, deux villes rivalisaient pour un court arrêt : Aix-la-Chapelle et Trèves.

La première, plus au nord, dispose d’une grande cathédrale. Elle avait l’avantage d’offrir une pause sur la route pour le Luxembourg, où je pourrais parcourir le pays du nord au sud. La seconde, justement tout près de la frontière du Luxembourg, m’aurait forcé à écourter mon passage dans le petit pays.

Si Aix-la-Chapelle a gagné la bataille, malgré les avis divisés des Allemands rencontrés sur la route, je me suis finalement convaincu d’un détour, entre la ville de Luxembourg et Strasbourg, en France. Trèves s’ajoutait sur l’itinéraire, à seulement une quarantaine de minutes de la capitale luxembourgeoise.

Trèves est petite, calme et charmante. Elle est l’une des plus vieilles villes allemandes et on y trouve encore aujourd’hui plusieurs ruines romaines. Aucune autre ville au nord des Alpes n’offre autant de monuments romains.

Bien au centre de la vieille ville, d’où on peut apercevoir quelques clochers parfaitement perchés, un marché, le Kornmarkt, s’anime en milieu de journée pour vendre fruits et légumes. Là, impossible de se noyer dans la foule.

La principale attraction, la Porta Nigra, date du deuxième siècle. Imposante porte de grès, elle peut être visitée, entre autres pour la vue qu’elle offre sur la ville. Transformée en église à travers le temps, elle a retrouvé ses allures d’origine dans les années 1800. 

Plus centrale, la basilique, très vaste, était la plus grande de l’Antiquité et incarnait le siège et le pouvoir de l’Empire romain. Rien que ça. Et pourtant, ce jour-là, ça ne se bousculait pas au portillon pour la visiter. 

Pas plus que pour entrer dans l’impressionnante et monumentale église Notre-Dame. Son vaste parvis était presque désert. Il faut dire que les nuages gris décourageaient peut-être les fidèles et les touristes de mettre le nez dehors. Ça n’empêchait pas une femme de beugler des messages religieux dans un porte-voix, à une extrémité de la place. 

C’est sur cette place, en plein jour, qu’est érigé un marché, dans la vieille ville de Trèves.

Cette église est la première église de style gothique classique français construite hors de France. 

Et ce qu’il y a d’impressionnant, c’est que de toutes les ruines romaines qui tiennent toujours le coup à Trèves, seules la basilique et la cathédrale ont été légèrement endommagées lors de la Deuxième Guerre mondiale. 

Ça m’apprendra à vouloir tout visiter à pied, j’ai mis 20 minutes de trop pour me rendre à l’amphithéâtre, juste à l’extérieur de la vieille ville, dans un secteur un peu plus résidentiel. On venait d’en fermer les portes quand je suis arrivé. Sur les photos que j’en ai vues, il n’a pas les allures du Colisée à Rome ou des arènes de Nîmes, dans le sud de la France, mais il a tout de même accueilli des combats de gladiateurs.

La promenade dans la ville, à la pluie s’il vous plaît, m’aura néanmoins fait sortir du centre touristique de la petite ville étudiante. On sent, là, un rythme de vie beaucoup plus lent que dans les grandes villes. On peut flâner, admirer les fresques sur les façades des maisons d’époque, sans se sentir trop bousculé. 

Trèves, c’est le charme de l’Europe ancienne dans un emballage modeste. On en fait facilement le tour en une seule journée, mais pour peu qu’on ait envie de s’imposer de ralentir, il peut s’agir d’un refuge de choix. 

Ma découverte insolite, facile à trouver sur une artère traversant la vieille ville? Un stand à hot-dogs aménagé à même une vieille église, au premier étage du lieu de culte. On peut donc déguster pain et saucisse sous un auvent lui-même surmonté d’un crucifix et d’une statue de Marie.