Vendredi, la chanteuse et performeuse s’arrête dans la région pour présenter son livre-disque tout neuf au public sherbrookois, qui l’a découverte alors qu’elle étudiait le chant jazz à l’Université de Sherbrooke.
« Je viens de Québec, je suis retournée m’y établir en 2014, après trois ans de voyage à l’étranger, mais j’éprouve un attachement particulier pour Sherbrooke, où j’ai vécu pendant huit ans », explique l’artiste qui, pendant ses années estriennes, a fait partie du quatuor vocal de chant du monde Les joueurs de source.
« La musique du monde est aux racines de ce que je fais. Ça se sent dans ce projet-ci, comme dans ce que j’ai fait auparavant. Lorsque je suis revenue de voyage, après être allée au Mexique, aux États-Unis, en Inde et en Thaïlande, je me suis rendu compte que j’avais une brochette de chants qui avaient en commun de présenter un amalgame de personnages féminins en quête d’intégrité et de satisfaction. J’ai eu envie de créer un spectacle autour de cette ribambelle de femmes. »
« J’ai réalisé, poursuit-elle, qu’il y avait un fil conducteur entre le personnage de la princesse dans sa tour d’ivoire et cette femme qui, en moi, s’était barricadée pour ne pas entrer en relation et ne pas rencontrer ses ombres. J’ai utilisé cet archétype, de même que ceux du dragon et du chevalier errant, mais ça aurait pu être l’histoire d’un prince aussi, je pense, parce que le thème pivot, c’est vraiment la quête d’intégrité. Ça découle d’une question : comment réussit-on à rester soi-même lorsqu’on est en couple? »
Le spectacle est donc né avant le disque, les mots ont vécu au micro, devant public. Et celui-ci, ravi, réclamait un recueil.
« Les gens me disaient qu’ils souhaitaient lire les paroles parce qu’il y avait beaucoup de choses dans les textes et qu’en une soirée, ils n’avaient pas le temps de tout capter. »
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Raconter les femmes... et les hommes
Une campagne de sociofinancement a permis à la créatrice de ramasser 4000 $.
« Je pensais éditer mon livre et mon album, mais une amie a envoyé mon matériel à Planète rebelle. Mon rêve, c’était de publier au sein de cette maison d’édition, mais je n’osais même pas l’envisager. Finalement, ce sont eux qui m’ont contactée. »
Le projet a pris forme. Flavie Dufour signe paroles, musique et arrangements.
« Les sujets qui m’ont inspirée sont universels. Il est question d’indépendance, d’intégrité et de tous les états de fragilité qu’on traverse lorsqu’on laisse tomber nos carapaces. J’aborde aussi des thématiques moins courantes, parfois taboues. Le désir pressant d’être enceinte, par exemple. Je touche à la dépendance affective, à l’affirmation de la colère, à la peur de la compétition. Le tout est formulé très poétiquement, bien sûr et, en salle, c’est toujours surprenant de voir à quel point ça résonne auprès des gens. Chaque fois, il y en a qui pleurent. Des femmes se reconnaissent, des hommes viennent me voir et me remercient de leur avoir dévoilé cet angle féminin, qui les amène à se positionner différemment. Comme si je leur révélais le masculin dans le féminin. Tout ça est très touchant. »
La réaction est d’autant plus sentie que le spectacle est immersif, d’une certaine façon.
« Concrètement, je commence par interpréter des textes où je parle du plaisir d’être seule. Petit à petit, le propos nous amène ailleurs, jusqu’à ce que la princesse décide de quitter sa tour. J’amène ainsi le public à se rencontrer, je lui fais vivre le propos du spectacle. Ça apporte quelque chose de très fort. Les spectateurs ne sont pas que témoins, ils participent au récit », explique l’artiste.
Des jeux d’ombres ajoutent à la facture visuelle et « permettent d’ouvrir les portes de l’imaginaire ».
« Je suis seule sur scène et je fais tout, en m’accompagnant d’une loop station [une pédale de boucle] sur laquelle j’enregistre ma voix. Ça me permet d’être polyphonique en solo, de créer des ambiances sonores. Dans tout ça, je remets les genres en question. Au fond, j’évoque l’art d’honorer la princesse, oui, mais aussi le dragon et le chevalier errant. Toutes ces facettes que nous portons en nous, les hommes autant que les femmes. »
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