Vêtements intelligents : les entreprises avant les consommateurs

Le Proglove permet de scanner en ayant les mains libres.

Des chaussures qui sonnent l’alarme quand un travailleur tombe, des vêtements qui captent votre pouls et votre respiration, un bikini qui vous avertit quand vous avez pris assez de soleil. L’industrie du vêtement intelligent se développe mais, souvent pour une question de coûts, elle vend ses trouvailles surtout à des entreprises plutôt qu’aux consommateurs.


Qu’est-ce qu’un vêtement intelligent? C’est un textile «capable de détecter, de réagir et de s’adapter à un grand nombre de stimuli», explique Pauline Kaci, directrice générale de Vestechpro, un centre de recherche et d’innovation en habillement. Il peut être chauffant ou rafraîchissant, intégrer des systèmes de transmission (Bluetooth, wi-fi), capter des signes vitaux, entre autres.

«Il a une fonction active, qui n’est pas permanente dans le temps», précise aussi Justine Decaens, directrice innovation technologique pour le Groupe CTT. Il ne faut pas confondre avec des textiles techniques, comme ceux antibactériens par exemple, indique-t-elle. Le Groupe CTT est un centre de transfert de technologie spécialisé dans le textile qui aide des entreprises canadiennes à développer leurs produits.

À l’heure actuelle, le plus grand défi pour les entreprises n’est pas de mettre au point leurs technologies, mais de les commercialiser, estiment les deux femmes.

«La technologie existe, mais on a du mal à la fabriquer en volume», explique Mme Decaens. Plusieurs étapes sont faites à la main.

«Nos entreprises manufacturières ne sont pas habituées à produire ce genre de produits-là», constate aussi Mme Kaci.

Qui dit petits volumes dit souvent prix plus élevés pour chaque article. Plus difficile donc à vendre à un particulier. Plusieurs sociétés qui fabriquent des vêtements intelligents choisissent plutôt de faire affaires avec des entreprises ou des institutions. «Quand on arrivera à automatiser le processus, les prix vont descendre, on va pouvoir se rendre au consommateur», croit Mme Decaens.


Elle donne l’exemple de chandails qui permettent de mesurer les signes vitaux. Il devient plus intéressant de vendre à des hôpitaux ou à des chercheurs qu’à des particuliers. «Là, avoir un chandail qui va coûter 300-400 $, ça devient acceptable. Dans le cas d’une étude clinique, l’appareillage qui est remplacé par le chandail coûte bien plus cher que 300 ou 400 $.»

Même chose pour une entreprise qui achète un produit en santé et sécurité au travail. Le prix n’est pas un obstacle s’il permet d’éviter un accident ou de remplacer d’autres équipements dispendieux. Mme Kaci remarque que le créneau de la santé et la sécurité au travail a le vent dans les voiles. Vestechpro y a d’ailleurs consacré son rendez-vous annuel Wear it smart.

Défis de l'industrie

Quels sont les autres défis de l’industrie? «Un vêtement connecté, ce n’est plus juste la designer qui travaille pour développer un produit. C’est une équipe multidisciplinaire», note Mme Kaci. Il faut faire travailler efficacement tout ce beau monde ensemble. Par ailleurs, il faudra aussi former la main-d’oeuvre.

Les questions de protection des données récoltées et de la vie privée restent aussi importantes. Mme Kaci explique que certains syndicats ont soulevé des interrogations au sujet des produits connectés, craignant que l’employeur ne s’en serve pour surveiller ses employés.