Retour sur la chronique du 24 mai 2017, dans laquelle j’exprimais mes nobles intentions de m’en tenir à l’abattage d’un cerf sans bois si j’obtenais l’un des permis émis par tirage au sort. Je présentation ce raisonnement comme un défi d’adaptation pour les chasseurs participant au programme expérimental de restriction de la taille légale des bois (RTLB) dans les zones 6 nord et 6 sud, dont je suis.
N’ayant pas été au nombre de gagnants l’an dernier, le dilemme ne s’est pas posé. Détenteur de l’un de ces permis, c’était différent cette année.
Sauf que j’ai été confronté à la dualité. Une dualité si vite arrivée!
En fait, je ne l’ai jamais entendue venir. Elle s’est pointée à ma gauche, le cou gonflé et bien entraîné en écorchant le bas des arbres pour marquer son territoire et sa réceptivité à engager le combat avec d’éventuels rivaux en prévision de la période d’accouplement.
Cette brève description en sous-entendus suffit pour que vous compreniez que c’est un mâle, un beau, « un huit pointes de 173 lb », qui s’est offert en cible à une trentaine de mètres.
Bois trop dense et coin trop isolé pour transporter pommes ou carottes. Une belle swamp que j’aurais d’ailleurs contaminée et gaspillée avec une intrusion trop invasive.
Alors, j’ai appliqué la méthode de chasse fine m’ayant rapporté si souvent : n’essaie pas de surprendre les chevreuils en marchant vers l’endroit où ils sont, devance-les là où ils vont, pour être aux aguets et à bon vent lorsqu’ils arriveront.
Il était 8 h 15, dimanche matin, lorsque Monsieur est apparu dans mon champ de vision. Bien que j’étais au sol, sans abri, juste fondu dans le décor au beau milieu de son dortoir, je n’ai jamais été détecté par ses radars.
Ceux qui s’adonnent à ce type de chasse savent à quel point le coefficient est élevé. On rentre bredouille à la maison beaucoup plus souvent que triomphant d’avoir déjoué l’un de ces rusés.
Estimant qu’en de telles circonstances la récompense serait méritée, j’avais pris la décision de ne pas « refuser » un mâle de qualité. J’ai savouré le moment et vous en souhaite autant d’ici la fin de la saison.
Mais pourquoi ramener la question des permis spéciaux sur le tapis?
Uniquement pour rappeler leur raison d’être. Ils sont le mode de contingentement offrant le plus de souplesse pour réagir promptement aux facteurs externes influençant la croissance du cheptel, en particulier aux hivers très rigoureux qui peuvent causer une profonde trouée en seulement quelques mois.
Lorsque la nature sévit, les gestionnaires fauniques lèvent le pied. Dans une conjoncture inverse, soit à la suite de quelques hivers successifs particulièrement cléments, une pression insuffisante sur les cerfs sans bois est susceptible d’entraîner une surabondance, en particulier dans les secteurs où la densité est déjà très élevée.
D’où l’importance d’augmenter le taux d’utilisation des permis spéciaux, qui varie entre 35 et 45 % dans la zone 6 sud et n’atteint même pas 25 % dans la 6 nord, pour rendre cet outil de gestion plus précis et par le fait même plus efficace.
Sans que cette « partie du contrat social » devienne une obsession, il faut que la préoccupation soit partagée, qu’elle se discute et s’infiltre peu à peu dans nos pratiques.
Je suis le plus mal placé pour les leçons de moral ou vous imposer des restrictions. Je ne ressentais pas non plus le besoin de me justifier avec une mise en contexte, que certains percevront peut-être comme de la vantardise.
On discute. On jase tout simplement. On partage nos expériences sans prétention aucune, pour essayer de mieux comprendre et même d’anticiper l’évolution du programme expérimental qui multipliera les occasions de croiser et de récolter des mâles matures.
À mon tour, j’ai hâte de vous entendre ou de vous lire sur cette deuxième des cinq années du RTLB.