Chronique|

Moins de FOMO, plus de YOLO

Je n’ai jamais regretté de profiter des circonstances pour visiter le glacier de Franz Josef, en Nouvelle-Zélande.

CHRONIQUE / FOMO. « Fear of missing out ». La peur de manquer quelque chose. YOLO. « You only live once ». Vous ne vivez qu’une fois. Voilà pour le vocabulaire. C’est de l’anglais, oui, mais dans un monde de LOL, on peut bien faire avec pour les besoins de la cause.


La FOMO devrait être l’ennemie du voyageur, même si elle se glisse toujours dans le bagage sans y avoir été invitée. Le poids excédentaire de la valise, à l’aéroport, c’est la FOMO. Sortez-la de là.

Chez moi, elle s’était invitée pour la première incursion en Europe. Un mois, trois pays et un itinéraire long comme deux fois le tour de la Terre. J’avais comme la conviction que je ne partirais plus jamais. Je voulais tout voir de la France, de l’Espagne et de l’Italie en une trentaine de jours top chrono. Allô le réalisme.

Tous les guides de voyage y sont passés : Ulysse, Lonely Planet, Routard... J’ai écumé l’internet pour être certain de ne rien manquer et j’ai dressé une liste exhaustive des moindres petites églises, des moindres petits restaurants que d’aucuns suggéraient de visiter. Par quartier s’il vous plaît. Pas question de manquer quoi que ce soit.

Je m’en suis fait des ampoules à marcher comme Speedy Gonzales, à essayer de tout voir pour cocher les éléments de ma liste soigneusement préparée. La tour Eiffel : cochée. Les musées d’Orsay, du Louvre, les dix plus belles cathédrales de Paris, la Sagrada Familia, les dix plus belles réalisations de Gaudi, le Colisée de Rome, les ponts les plus célèbres de Venise : cochés.

Mais je suis passé très vite. Il me faudrait retourner et rétrograder la vitesse pour apprécier, comprendre.

Cette peur de tout manquer, elle a aussi du bon. C’est elle qui m’a convaincu de mettre ma vie sur pause et de partir plusieurs mois consécutifs. Cette peur de ne jamais voir le monde, de ne jamais me tremper dans la culture asiatique, sud-américaine, et de réaliser qu’un jour, la santé ne le permettrait probablement plus. J’ai foncé tête baissée. Parce qu’on ne vit qu’une fois et que de ne rien faire, c’est aussi renoncer à un tas de choses.

YOLO, c’est aussi renoncer. Pour vivre ici, maintenant, comprendre qu’on ne pourra pas tout voir et accepter de nous attarder là où le moment présent le commande. C’est faire le choix de piquer une sainte colère quand les choses ne se déroulent pas comme prévu ou de trouver une façon de faire contre mauvaise fortune bon cœur.

Quand on a annulé mon traversier entre les îles du Nord et du Sud de la Nouvelle-Zélande, en raison du mauvais temps, je me sentais pris au piège. Prisonnier à Wellington, la capitale, j’ai renoncé aux villes de Nelson, Punaikaiki et Kaikoura, que j’avais ciblées pour la suite du voyage. J’ai plutôt sauté sur l’occasion de prendre un vol vers Queenstown, plus au sud, et de visiter les fjords de Milford Sound et le glacier de Franz Josef, que j’avais initialement rayés de mon itinéraire. Franz Josef m’a par la suite offert parmi les plus beaux souvenirs de mon voyage.

YOLO, c’est aussi ce qui m’a guidé à Quito, en Équateur. Cette fois-là, je me rendais en Amérique du Sud avec la ferme intention de voir les tortues et les lézards des îles Galapagos. La capitale du pays m’a toutefois charmé au point où je n’ai plus vu le temps passer. Le mont Pichincha, la Mitad del Mundo, le parc Itchimba, la Capella del Hombre m’ont tellement attiré que le temps m’a manqué pour les îles.

On m’a pourtant suggéré une visite éclair, avec billets d’avion et bateau rapide à la clé, mais j’aurais passé plus de temps à me déplacer qu’à vraiment me poser aux Galapagos. J’ai décidé de profiter de Quito.

Si on passait moins de temps à penser à ce qui nous échappe, à ce que l’on manque, on apprendrait à profiter un peu plus de nos voyages, quitte à ralentir le rythme et à explorer plus lentement. YOLO, c’est aussi apprendre à connaître la population locale, goûter à des aliments qui nous sont inconnus ou accepter de réduire ses nuits de sommeil pour tirer profit de chaque moment.

Et c’est parce que je me dis YOLO que je me donne le droit de sauter dans l’avion chaque fois que l’occasion se présente. Pour moi. Pour chaque moment qui ne reviendra pas. Point.

Suivez mes aventures au www.jonathancusteau.com.

Quito m’a tellement charmé que j’ai décidé d’y passer plus de temps, entre autres pour voir la ligne de l’équateur à Mitad del Mundo.