Sur les traces d'Edmond Dantès

Les îles du Frioul valent le détour. Pomègues offre surtout la possibilité de marcher alors que Ratonneau compte des restaurants et une plage.

CHRONIQUE / Toutes ces fois où je me dis que j'ai peut-être perdu mon coeur d'enfant, j'essaie de me souvenir à quel point je suis un touriste impressionnable. Tous ces tours guidés, tous ces châteaux, tous ces paysages ayant servi de trame de fond pour un livre ou un long-métrage, ils me font envie.


Il m'était impossible de m'arrêter à Marseille sans passer par le château d'If.

Oui, oui, je suis passé à un doigt de payer pour un des tours sur le thème du Trône de fer, à Dubrovnik. Au final, j'ai trouvé moi-même le parvis d'où part Cersei Lannister pour la mythique scène de la honte, où elle doit traverser tout le royaume complètement nue. J'ai aussi pu m'asseoir sur une réplique du fameux trône, gratuitement, sur l'île de Lokrum.

Quelque part entre Queenstown et Milford Sound, en Nouvelle-Zélande, je me suis écrasé le nez contre la fenêtre de l'autobus quand la guide a annoncé que des scènes extérieures du Seigneur des anneaux y avaient été tournées. Dans le même sens, en gravissant le mont Tangariro, dans le même pays, je me rappelais les images du Mordor qu'il incarnait dans la trilogie.

Ai-je besoin de mentionner qu'il m'apparaissait incontournable de me rendre au château d'If, à Marseille? Qu'on fasse référence à Edmond Dantès ou à son alter ego, le comte de Monte-Christo, je ne pouvais que classer l'attraction en tête du palmarès des lieux que je voulais visiter.

Oui, je sais bien qu'il s'agit d'un personnage fictif créé par Alexandre Dumas. Bien sûr, je sais que le renommé comte n'a jamais réellement occupé une cellule dans ledit château. N'empêche, une fois qu'on a titillé mon imaginaire, il n'y a plus rien pour me faire reculer.

Avec le peu de temps dont je disposais à Marseille, on me recommandait plutôt d'aller flâner dans les calanques, ces vallons rocheux en bord de mer qui sont typiques de la région. Pas possible de visiter Marseille sans voir les calanques, qu'on me disait. Oui, mais Monte-Cristo, vous savez...

J'ai fait à ma tête. Comme toujours. Et je me suis dirigé dans le Vieux-Port avec pour seule intention de visiter le château d'If. Pour ce faire, il faut prévoir le coup, un brin, parce que le dernier bateau quitte l'île d'If vers 18 h. Faut pas le manquer.

Ceci dit, à l'achat du billet, on demande si l'aller-retour inclura les îles du Frioul ou pas. Il faudrait être franchement têtu pour refuser un arrêt dans l'archipel, surtout que le petit traversier passera nécessairement par If et les îles du Frioul avant de rentrer à Marseille.

Le point de vue sur le port, ses centaines de petites embarcations accostées, sur la grande roue qui s'éloigne doucement, sur le fort Saint-Jean, vaut presque à lui l'escapade sur l'eau.

Le château d'If, il est bien pour le coup d'oeil à l'arrivée et pour l'histoire réelle de la forteresse, autrefois utilisée comme prison. La légende de Montre-Cristo, de même que l'histoire de l'auteur Alexandre Dumas, y est exposée.

Le tunnel creusé par Edmond Dantès (!) n'aurait probablement pas été nécessaire, mais la vue du sommet de la forteresse compense pour la fiction qu'on a jugé bon de mettre en valeur. Dans l'une des pièces, on raconte l'histoire (vraie) très intéressante d'un rhinocéros ayant fait escale sur l'île d'If. Un visiteur inusité au parcours captivant...

La vraie surprise, parce qu'inattendue, m'est venue des îles du Frioul. Près du quai, quelques boutiques et restaurants se sont agglutinés pour accueillir les touristes. La plupart des visiteurs, ce jour-là, ont pris les sentiers de l'île de Ratonneau, question de voir la plage ou le fort du Brigandin.

Ce têtu-ci, par esprit d'opposition, a suivi la petite route de l'île de Pomègues, de l'autre côté. En prenant la route jusqu'au bout de l'île, on s'offre tout de même quelques calanques et beaucoup d'intimité. Le nombre de voyageurs rencontrés de ce côté se comptait sur les doigts d'une main. Se poser sur les rochers gris-blanc et regarder la mer peut voler bien du sable dans le sablier. Il y a ce risque de se perdre dans l'horizon.

Le plus grand danger, à part celui de perdre le compte du temps qui s'enfuit (et de rater le traversier qu'on prévoyait prendre), il vole au-dessus de nos têtes. Les goélands, présents en quantité industrielle, envoient un message assez clair lorsque notre présence n'est pas requise.

Quand les goélands attaquent, ils n'entendent pas à rire. Le vol en basse altitude et les cris suffisent à nous faire accélérer le pas. On couvre la tête et on espère ne pas recevoir de coups de bec.

Même si on se sent comme des indésirables quand les volatiles s'y mettent, les îles du Frioul valent un petit détour.

Suivez mes aventures au www.jonathancusteau.com.