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Étrange capitale, aussi, Kigali, pour ses nombreuses collines, comme un collage de banlieues hétéroclites qui ne permettent pas de prendre toute la mesure de l'étendue de la cité.
Bien sûr on s'arrêtera au centre-ville, où les grands hôtels ont poussé. De petits gratte-ciel modernes sont aussi apparus. Des bureaux y ont été transférés de force pour éviter de laisser tous ces espaces vides.
À travers les promenades, on s'arrêtera probablement près de l'Hôtel des mille collines, où plus d'un millier de Tutsis se sont réfugiés pendant le génocide. Le film Hôtel Rwanda raconte d'ailleurs les événements qui s'y sont produits.
À une quinzaine de minutes de marche, le Camp Kigali garde lui aussi les séquelles du génocide. C'est là qu'ont été tués dix soldats belges, des soldats armés de pistolets qui ont résisté pendant deux heures avant d'être abattus dans l'école où ils s'étaient réfugiés. Ils étaient pour la plupart âgés dans la vingtaine. Dix monuments sobres ont pris racine dans le jardin pour que ces victimes du génocide restent elles aussi présentes à la mémoire de la communauté internationale.
Si on s'éloigne un peu des monuments, qu'on accepte de se plonger dans la réalité d'un quartier de Kigali, on aboutira peut-être à Nyamirambo. Là, plusieurs femmes se sont regroupées pour créer le Centre des femmes de Nyamirambo, en 2007, un organisme qui leur donne non seulement du travail, mais qui vient aussi en aide à la communauté. Le tour guidé du voisinage qu'elles proposent inspire, fascine, permet de se mêler à la vraie vie un instant.
Le Centre des femmes emploie des femmes victimes de violence ou dans le besoin pour combattre les inégalités sociales et pour leur permettre de s'outiller pour le marché du travail.
Dans leurs locaux, les employées cousent, fabriquent des sacs, des peluches pour les enfants, des jouets ou des vêtements qui sont revendus dans la boutique adjacente. En face, elles ont mis sur pied une bibliothèque pour donner accès à la lecture aux enfants défavorisés. Elles recueillent des livres en français, en anglais et en kinyarwanda, la langue officielle du pays.
Avant d'amorcer la tournée du quartier, on nous enseigne d'ailleurs quelques mots de kinyarwanda pour que nous puissions saluer les gens que nous croiserons. On nous amène ensuite dans les salons de coiffure traditionnels.
En sillonnant les rues en terre, on apprend que le système d'aqueduc ne se rend pas partout dans le quartier. Des sources d'eau ont été aménagées. Il est possible d'y remplir d'énormes cruches à un prix dérisoire. Quant aux douches, elles sont souvent partagées entre plusieurs familles. Il faut donc se lever tôt pour se mettre en ligne, le matin, si on veut éviter les retards au travail ou à l'école.
On nous explique aussi qu'un arbre géant a poussé devant la maison du leader de la communauté, ce qui permettait autrefois de le repérer rapidement, que le grand marché vise la revente des objets dont on ne sert plus et qu'on n'y badine pas, et on observe un homme repasser un veston avec un fer à repasser d'une autre époque, chauffé à l'aide de braises.
Nyamirambo, c'est aussi le quartier musulman. Pendant le génocide, plusieurs Tutsis avaient trouvé refuge dans des églises, espérant que les Hutus ne souilleraient pas un lieu aussi sacré. Les églises sont pourtant devenues des tombeaux.
Les mosquées, elles, ont permis à des milliers de Tutsis d'avoir la vie sauve. Les agresseurs craignaient que ces lieux de prière soient habités d'esprits malveillants. Ils ont épargné ceux qui s'y étaient cachés. Plusieurs survivants se sont alors convertis et ont refusé de quitter le quartier.
Enfin, Nyamirambo offre des points de vue magnifiques sur le reste de la ville. Pendant qu'on scrute l'horizon, des enfants s'amusent à glisser sur les pentes argileuses derrière chez eux. Pour traîneau, ils utilisent de simples tiroirs de commodes.
À la fin de la tournée, ceux qui le souhaitent peuvent goûter un repas traditionnel mitonné par une famille rwandaise.
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