Omnipraticienne depuis bientôt 20 ans, Marie-Josée Dubois a souvent oeuvré, au fil de sa carrière, auprès des enfants malades. « J'ai fait plusieurs années de soins palliatifs, indique-t-elle. J'ai aussi travaillé avec des enfants inuits dans le Grand Nord et avec les Montagnais sur la Côte-Nord. En fréquentant les populations d'enfants de partout, dont les enfants du Phare Enfants et Familles, où j'ai été la directrice médicale pendant deux ans, j'ai vraiment eu un coup de foudre pour cette pratique-là. »
Grâce à ses contacts avec les communautés autochtones, la Dre Dubois a également développé une conception plus ouverte et plurielle de la santé. Constatant que ce que le réseau de la santé actuel offrait aux enfants souffrant de maladies incurables était plutôt limité, Marie-Josée Dubois a eu envie de créer un projet qui permettrait aux malades d'être soignés tout en retrouvant un espace de liberté, de joie et d'insouciance, et ce, en pleine nature.
« J'ai un grand amour de la nature, et j'ai vu, dans ma pratique, autant chez les adultes que chez les enfants qui ont des maladies graves, des gens confinés à leur chambre d'hôpital ou à leur lit à la maison, sans contacts avec l'extérieur et avec la nature, qui, selon moi, est très bienfaitrice et même guérisseuse », raconte-t-elle.
C'est ainsi qu'est née l'idée des Enfants Gioia (se prononce comme le mot anglais joy, auquel on ajoute un a) : un organisme créé en août 2015 par la Dre Dubois, réunissant plus de 40 bénévoles qui viennent en aide à huit familles dont un enfant est atteint d'une maladie grave, en leur proposant toutes les 6 à 8 semaines des activités d'apprentissage en nature comme du jardinage, des séances de yoga, des ateliers d'art-thérapie, de l'équithérapie, etc.
Le centre Gioia
Mais Marie-Josée Dubois voit plus grand : d'ici trois à cinq ans, elle souhaite construire en Estrie un centre qui pourrait accueillir une trentaine d'enfants, d'adolescents et de jeunes adultes malades ainsi que leur famille. D'abord un centre de jour, le centre Gioia permettrait à ces personnes atteintes d'une maladie grave ou incurable - dont certaines seraient en fin de vie et d'autres non - d'accéder à « un apprentissage par l'expérience en nature » ainsi qu'à « des soins pour la globalité de leur santé ».
« On veut offrir aux enfants un espace où ils peuvent se déployer jusqu'à leur plein potentiel, dit la Dre Dubois. Ils ont le droit de vivre une vie pleine et entière, qu'elle dure 10, 20 ou 30 ans. Je veux aussi ouvrir une section pour les 19 à 29 ans, parce que quand les enfants malades arrivent à 18 ans, ils tombent dans une sorte de vide, où ils se retrouvent sans aide. Et les maisons de soins palliatifs pour adultes ne sont pas adaptées, selon moi, pour les jeunes. »
« Au centre Gioia, on va faire des sciences, de l'astronomie, de la méditation, du yoga, beaucoup de jardinage, énumère-t-elle. Je veux que les enfants et les jeunes adultes se réapproprient une autonomie face à leur santé, qu'ils sentent qu'ils peuvent encore faire quelque chose, et même beaucoup. »
À plus long terme, l'omnipraticienne qui habite depuis peu à Austin aimerait construire « des petites unités de fin de vie » à même le centre, où des soins palliatifs pourraient être prodigués aux patients jusqu'à leur dernier souffle.
Marie-Josée Dubois voudrait aussi jumeler des enfants malades et des enfants sains, afin que ces derniers réalisent la chance qu'ils ont d'être en santé. « Et ça permet à l'enfant malade de voir qu'il peut apporter énormément de sa vision du monde, de sa sagesse et de son émerveillement à l'autre », ajoute-t-elle.
Afin de concrétiser ce projet d'envergure, la Dre Dubois estime devoir amasser entre 15 et 20 millions $. Pour y arriver, elle organise depuis quelques mois déjà plusieurs activités de financement et fera bientôt des demandes de subventions auprès des différents paliers gouvernementaux. « On compte aussi évidemment sur la générosité de certains grands donateurs qui seraient touchés par notre projet et qui voudraient y contribuer de façon récurrente. »
Par ailleurs, la fondatrice des Enfants Gioia est à la recherche d'un terrain d'au moins 40 acres dans la région estrienne pour y établir son centre. Pour faire un don et encourager cette initiative, rendez-vous à lesenfantsgioia.com.