«On peut dire que c'est un gouvernement qui tient ses promesses. On n'a pas de grandes surprises. Les mesures qui touchent l'assurance-emploi et les allocations pour enfants répondent aux engagements pris envers la classe moyenne pendant la campagne électorale. Le programme d'infrastructures intéresse évidemment beaucoup les municipalités et nous sommes heureux que l'engagement de doubler les dépenses sur 10 ans soit respecté, même si les investissements semblent moins importants au cours des premières années», a déclaré d'entrée de jeu le président du comité exécutif de la Ville de Sherbrooke, Serge Paquin, qui se réjouissait également que le gouvernement fédéral s'engage à assumer jusqu'à la moitié des coûts admissibles en ce qui a trait au transport en commun.
À noter que le maire Bernard Sévigny a préféré laisser son collègue commenter le budget étant donné que sa conjointe, Marie-Claude Bibeau, est ministre à Ottawa.
Le vice-président de la CSN, Jean Lacharité, avait le sourire aux lèvres alors que les mesures libérales étaient dévoilées, notamment le rétablissement des crédits d'impôt pour les fonds de travailleurs. «Je suis aussi très heureux que la réforme Harper de 2012 liée à l'assurance-emploi soit abolie. Heureux également des améliorations liées à l'accessibilité, mais ça ne répond pas à toutes nos revendications. Je m'inquiète encore pour les régions à fort taux de chômage saisonnier au Québec», note-t-il ajoutant que, par ailleurs, il est très satisfait du réinvestissement dans la Société Radio-Canada et dans le milieu des arts de façon plus générale.
Un déficit «sain»
Le déficit prévu de 29,4 milliards pour l'année 2016-2017 n'inquiète pas les acteurs socioéconomiques de la région interrogés. «Faire un déficit est justifié compte tenu de l'économie canadienne actuelle. C'est sain. Ce qui importe ce n'est pas le niveau des dépenses ou l'ampleur du déficit, mais bien le ratio de notre endettement par rapport à notre PIB. Et avec un ratio de 32,5pour cent, le Canada est le mieux positionné des pays du G7», mentionne Luc Savard, professeur à l'Université de Sherbrooke.
«Par contre, j'aurais préféré des mesures plus ponctuelles qui favorisent des investissements rapides plutôt que des changements dans les programmes qui pourraient, à plus long terme, nuire à l'économie lorsque le contexte évoluera», ajoute l'économiste.
«C'est un budget basé sur l'économie canadienne et non pas sur des principes idéologiques. Globablement, je suis d'accord avec le budget, mais il va falloir le suivre de près au cours des prochaines années», renchérit Réal Létourneau, fiscaliste chez Raymond Chabot Grant Thornton.
«La vraie surprise, c'est lorsque les libéraux ont défié la population canadienne en leur disant qu'ils allaient faire un déficit et le fait qu'ils se soient fait élire là-dessus», ajoute M. Létourneau, qualifiant cette stratégie d'audacieuse.
Les investissements dans la recherche, l'innovation et les technologies réjouissent aussi l'ensemble des intervenants. «Une autre preuve du changement de cap majeur au niveau du gouvernement fédéral», souligne M. Savard.
«C'est un revirement total qui nous ramène au centre et même au centre gauche. C'est quasiment un budget social démocrate», souligne M. Paquin.
Le budget s'adresse à la classe moyenne, mais très peu aux entreprises, notent les intervenants.
«On ne parle pas beaucoup des PME à part de dire que la diminution du taux d'imposition est moins grande que prévu. Selon moi, c'est une mauvaise nouvelle, car les PME sont le moteur de notre économie. On ne parle pas non plus du commerce de détail», a souligné le président de la Chambre de commerce de Sherbrooke, Bruno Lavoie.
«Par contre, l'argent distribué à la classe moyenne devrait aider le commerce de détail», a précisé M.Paquin.
«On va surveiller cela, car les mesures touchant l'entrepreneuriat seront peut-être annoncées subséquemment», enchaine M.Lavoie.
De façon générale, le budget est perçu comme étant populiste.
«Ce n'est pas avec ce budget que Trudeau perdra des points de popularité au cours des prochains mois», estime M. Savard.
«Il est en lune de miel», conclut M.Létourneau.