Bien que je préfère être prévenu des dangers, j’évalue les risques au jour le jour une fois rendu sur place. Arrivé à Cancún et ayant visité la populaire ville de Tulum, je me suis rendu à Valladolid, dans la péninsule du Yucatan, avant de planifier ce qu’il restait de mon voyage.
Si la légendaire pyramide maya de Chichen Iza demeure un incontournable, ne serait-ce que pour le folklore, on me conseillait presque tous les jours de prévoir un arrêt à Palenque, beaucoup plus au sud. Les ruines et la jungle en feraient un des plus beaux endroits du pays, foi de (presque) tous les touristes baroudeurs.
Mais voilà, la recommandation venait souvent avec une mise en garde. Descendre à Palenque en voiture? Pas une bonne idée. En autobus? On risque de vous voler vos objets de valeur pendant que vous dormez. Les histoires d'horreur, quoique jamais violentes, affluaient.
J'étais à échafauder mes plans avec une copine mexicaine quand un voyageur français nous a invités à faire une partie de la route avec lui. Il se dirigeait vers Mérida, à l'ouest. Tant pis pour Palenque. Et pour bien occuper l'espace dans l'habitacle, nous avons ajouté un touriste allemand au groupe.
Nous étions encore loin de nous en douter, mais notre équipage hétéroclite soulèverait bien des doutes et des questions. À l'approche des grandes villes, des barrages policiers filtrent les passages en provenance et en direction des agglomérations.
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Une première fois
À l'approche de Mérida, la nuit venue, on nous a demandé de nous immobiliser. Une femme mexicaine avec trois hommes de trois pays différents, c'est louche. Commence la série de questions.
Pas que je ne veuille pas collaborer, mais j'ai appris qu'en gardant le profil bas, devant les forces de l'ordre étrangères, on s'en tire généralement plutôt bien. On ne pose pas de questions. On ne donne pas plus d'information que ce qu'on nous demande. Et on ne tend surtout pas notre passeport ou notre carte d'identité avant qu'ils soient réquisitionnés.
En Argentine, il y a trois ans, je m'étais évité une fouille dans un autobus en attendant les ordres avant de m'exécuter. Pendant que tout le monde se levait et ouvrait ses bagages, je demeurais bien allongé dans mon fauteuil. Le policier, sa mitraillette à la main, constatant que je ne parlais que très peu d'espagnol, n'avait pas insisté.
Je digresse. Cette fois, au Mexique, on nous a demandé depuis combien de temps nous nous connaissions. C'est bien bête que les voyageurs de type «sac à dos» s'unissent et se séparent plus vite qu'il ne le faut pour crier «freeze». Pour un policier, c'est louche, dis-je. Il fallait les passeports, mais pas le mien, parce que je n'ai pas insisté pour le montrer, les papiers d'enregistrement de la voiture, les assurances... Mais on nous a laissés filer.
Encore
Le pire nous attendait deux jours plus tard, sur la route de Campeche. En sortant de Mérida, nous racontons à nouveau notre histoire. Les trois hommes que nous sommes, ici, comprennent l'espagnol de base. Deux sur trois parlent anglais. Qu'on échange entre nous sans arrêt pour comprendre ce qui se passe, ça n'enchante pas le policier.
On nous fait sortir et tour à tour, nous devons vider nos poches. Pendant que le policier compte les billets dans mon portefeuille sous mon regard attentif, des dizaines de voitures passent le contrôle sans être scrutées.
«Si je trouve de la cocaïne, vous serez dans le pétrin», qu'il dit le monsieur en uniforme. Mais cherche, mon brave. Cherche...
Après les portefeuilles, il a entrepris de fouiller nos sacs à dos. Chaque pochette a été ouverte, chaque objet a été retourné dans tous les sens. Mon amie mexicaine s'impatientait.
«Vous êtes nerveuse? Vous avez quelque chose à cacher? Vous vous emportez?»
Après les sacs, il a fait ouvrir le coffre arrière. Vraiment, j'ai cru qu'il ne nous lâcherait pas avant que nous lui ayons remis une rondelette somme d'argent. Le folklore, vous savez! Il pouvait bien chercher, le bougre, il n'aurait pas un sou si jamais il osait réclamer.
Devant la grosse valise qui traînait au fond du coffre, il s'est découragé et nous a finalement laissés partir. Au retour, le soir même, il nous a interpellés de nouveau. Quand on a une tête de touriste...
Le manège s'est répété le lendemain matin sur la route d'Uxmal sans qu'il y ait fouille complète.
Le Yucatan étant particulièrement touristique, nous n'osions pas imaginer les soupçons que nous soulèverions dans des régions plus hostiles.
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