C'est ce qui surprend le plus l'avocat criminaliste Jean-Pierre Rancourt, appelé hier à commenter le verdict de ce procès hautement médiatisé.
Samedi, les jurés avaient adressé au juge une question laissant croire qu'ils se penchaient encore, après six longs jours de discussions, sur la défense du cardiologue. « Après, ils n'ont pas délibéré longtemps entre eux autres, seulement quelques heures, ce qui me surprend », souligne Me Rancourt.
« Je ne m'attendais pas à un meurtre au deuxième degré, parce qu'il y avait beaucoup de preuves au niveau de la préméditation, ajoute-t-il par ailleurs. Ils ont choisi le deuxième degré, qui démontre qu'il y avait intention de causer la mort, mais ils ont mis de côté la préméditation. Ils ont probablement compris que la préméditation était tellement peu longue, parce que ça n'a pas été des jours et des jours, qu'ils l'ont mise de côté et sont allés pour un deuxième degré », estime-t-il.
Soulagement pour le Québec
Au début de ce deuxième procès, le juge a évidemment demandé aux jurés de ne pas se laisser influencer par l'opinion publique, qui avait accueilli avec hostilité le verdict du premier procès, soit la non-responsabilité criminelle pour trouble mental.
Bien qu'il souligne qu'« on ne sait jamais ce qui se passe dans une salle de délibération », Me Rancourt croit qu'il est tout à fait possible que les jurés en soient arrivés à cette nouvelle conclusion sans que l'opinion publique ait rien à y voir.
« Ça ne me surprend pas qu'il n'y ait pas de non-responsabilité criminelle, parce que la preuve était assez claire avec les psychiatres de la couronne, notamment le deuxième [NDLR : le psychiatre Pierre Bleau] dont ils ont demandé à réécouter le témoignage. Il restait à savoir si c'était un meurtre au premier ou au deuxième degré, ou un homicide involontaire. »
Le peuple québécois risque en tout cas d'être soulagé par ce dénouement, qu'il en soit en partie responsable ou pas. « Le premier verdict a été tellement conspué, les gens étaient découragés de voir qu'un père de famille pouvait tuer ses deux enfants comme ça et au bout d'un an être dehors. Ç'a été discuté dans tous les foyers du Québec. Maintenant, les gens vont se dire que justice a été rendue», croit Me Rancourt.
Une peine lourde à prévoir
Un meurtre au deuxième degré entraîne la prison à vie avec une peine minimale de 10 à 25 ans avant d'être admissible à une libération conditionnelle. Les jurés n'ont pas souhaité émettre de recommandation au juge à ce sujet.
Pour sa part, Me Rancourt s'attend à ce que Guy Turcotte écope d'une peine dans le haut de cette fourchette.
« Il faut évaluer la gravité objective et suggestive de ce meurtre sur l'échelle des meurtres au deuxième degré. Il a tué deux personnes, ce sont ses enfants, il a donné 46 coups de couteau. [...] Est-ce que ce meurtre-là n'est pas l'un des plus importants? Je pense que ça mérite plus que le minimum de 10 ans », avance l'avocat, qui croit que c'est aussi le point de vue qu'adoptera le juge.