Vous avez entendu dire qu'une certaine fondation a des frais d'administration vraiment très élevés? Vous vous demandez combien d'argent est utilisé sur le terrain chaque fois que vous faites un chèque à un organisme de charité? La Tribune s'est intéressée aux frais d'administration et aux frais de collecte de différents organismes oeuvrant sur son territoire afin de faire le point sur cette question qui suscite souvent bien des interrogations chez les donateurs.


Aucun organisme ne se ressemble complètement et ne fait face aux mêmes défis - et donc, aux mêmes dépenses. Il est donc très difficile de comparer les organismes de charité et les fondations.

«C'est un milieu où on compare des choses incomparables, comme si, sous une seule et même étiquette, on tentait de regrouper des petits organismes et les fondations des gros hôpitaux», soutient Sylvain Lefèvre, professeur à l'école des sciences de gestion de l'Université du Québec à Montréal (UQAM).

Il y a pourtant toutes sortes d'organismes. À preuve... «Il y a des grandes fondations avec des salaires de plus de 100 000 $ et des petites organisations non gouvernementales (ONG) avec des salaires de moins de 30 000 $», illustre M. Lefebvre.

«On entend souvent le slogan : On veut que tout l'argent aille sur le terrain». Pourtant, il est essentiel que de l'argent soit investi pour payer le comptable et autres frais administratifs. Sans eux, ça ne fonctionnerait pas aussi bien. Quand je vois des frais de ce type, pour moi, ça veut dire que les missions sont bien pensées, bien préparées. Quand je vois des frais administratifs trop bas, ça me fait douter», dit-il.

Des frais à 0%?

Dans un récent sondage, 34 % des répondants avaient signifié que, selon eux, les frais d'administration devraient être de 0 % dans les organismes... «Les gens ne sont pas vraiment conscients de ce que sont ces organisations!» lance Daniel Lapointe, enseignant au certificat en philanthropie à l'Université de Montréal et auteur du livre La gestion philanthropique, guide pratique pour la collecte de fonds.

«Des frais d'administration, ce n'est pas de l'argent gaspillé. Les fondations, les organismes, ce sont des entreprises : ils ont besoin d'employés, d'un site web souvent mis à jour, d'un local, de téléphones!» explique Daniel Lapointe.

«Si on prend un organisme d'envergure canadien qui réussit à amasser 1 M$ par année, et dont 250 000 $ servent à opérer, il reste encore 750 000 $ pour la cause qu'ils soutiennent, ça représente vraiment une grande aide», ajoute M. Lapointe.

En comparaison, certains organismes vont diriger de façon artisanale : ils vont s'installer dans le sous-sol d'un des bénévoles, ne se verseront aucun salaire et utiliseront leur téléphone de maison. Résultat, les frais d'administration tourneront autour de 0 %, mais les sommes amassées augmenteront bien rarement au-delà des 50 000 $ par exemple.

«Cette somme est importante pour la cause, mais ça reste 50 000 $, c'est loin du 750 000 $», dit Daniel Lapointe.

Bonnes explications

L'enjeu derrière tout ça pour les organismes? Bien, très bien expliquer à quoi sont consacrées leurs dépenses. En effet, les dépenses des organismes de bienfaisance sont souvent perçues comme quelque chose «d'un peu honteux», quelque chose «d'un peu illégitime».

Les frais d'administration servent à payer les salaires des employés, les locaux où logent les organismes, le matériel qu'ils utilisent pour travailler. Encore là, les frais varient pour toutes sortes de raison selon la structure de l'ONG. «Pour donner un ordre de grandeur, je dirais que la cible est autour de 10 % des revenus», dit Sylvain Lefebvre.

«Il n'y a pas de seuil légal, mais quand les frais d'administration et de collecte de fonds dépassent 35 % du budget, les ONG sont plus à risque d'être vérifiés par les impôts.»