Chronique|

Le barrage routier du Viêtnam

La région de Sapa, dans le nord du Viêtnam, est connue pour ses rizières... et ses manteaux North Face. Mon séjour dans ce pays de l'Asie du Sud-Est n'aurait certainement pas été complet si je ne m'y étais pas arrêté... et fait arrêter.


J'étais arrivé à Sapa par le train de nuit, comme plusieurs voyageurs qui achètent leurs billets d'agences plus ou moins légitimes à Hanoi. On s'entasse dans des couchettes étroites avant de descendre une fois le jour levé, avec un minimum de sommeil derrière les paupières.

Assommé par la fatigue, j'ai déposé mon bagage à l'hôtel, où on nous a annoncé que nous partions dans une heure pour une randonnée de deux jours... À peine le temps de réorganiser mes avoirs pour n'emporter que l'essentiel. Juste le temps de paniquer aussi en réalisant que mon passeport avait disparu.

«Si tu l'as laissé dans le train, tu peux lui dire au revoir», m'a «rassuré» l'hôtelier.

J'ai finalement retrouvé le précieux document là où il n'aurait jamais dû se trouver : dans une pochette de mon sac à dos où j'avais l'impression d'avoir déjà regardé cent fois.

Les deux jours suivants font rêver. Accompagnés d'une jeune fille vêtue d'habits traditionnels, nous avons traversé des rizières, longé des rivières, franchi des forêts de bambou et échangé avec des villageois qui vivent bien modestement. Çà et là, les hommes labourent les champs à l'aide de leur précieux buffle alors que d'autres plantent le riz lentement mais sûrement.

Les enfants s'amusent, qui en plantant leurs deux mains dans la boue, qui en montant sur le dos des buffles se laissant importuner par des coups de brindilles de bois. Et au coeur d'une vallée, une petite maison de bois nous attendait pour que nous y passions la nuit. Sur un patio improvisé, autour d'une petite table en bois, nous avons consacré la fin de l'après-midi à regarder les nuages envelopper les montagnes.

Au retour à notre hôtel, nous avons décidé de louer des mobylettes pour explorer la campagne et toiser les quelques chutes et montagnes qu'on nous recommandait plus au nord. Simple comme 1, 2, 3. Nous avons rapidement mis la main sur des casques et les clés de nos montures de faible puissance. C'est à peine si nous avions pensé déposer une partie de nos affaires dans les chambres qu'on nous avait assignées.

La randonnée s'annonçait joyeuse alors que sept d'entre nous forment un cortège de motards du dimanche. Alors que nous cheminions au «zinzin» de nos petits moteurs, un policier debout au milieu de la route, son sifflet entre les lèvres, nous a fait signe de nous immobiliser. Problème! Problème! On ne veut jamais composer avec la police à l'étranger.

«Permis de conduire», qu'il réclame.

Pas de problème, j'ai sûrement ça dans mon sac... Quoique...

Introuvable... Devant ma réponse négative, ainsi que celle de trois de mes compagnons, l'agent nous a simplement demandé de le suivre.

C'est à peu près là que j'ai paniqué. Pareil comme lorsque je pensais avoir égaré mon passeport. Au tout dernier moment, j'ai aperçu mon portefeuille au fond de mon sac. Essayez, vous, de convaincre un policier vietnamien que vous venez de retrouver votre permis quand vous vous étiez déjà déclaré coupable de ne pas l'avoir apporté. Il était bien entendu convaincu que j'essayais de lui en passer une petite vite.

Mes trois amis qui avaient laissé leur permis à l'hôtel ont obtenu d'aller le chercher... au guidon de leur mobylette. Pendant ce temps, nous étions forcés d'attendre sur le bord de la route, en garde à vue, pour être certains qu'ils reviennent.

Pendant notre «détention», nous avons vu des touristes brandir une carte de crédit en prétextant que c'était leur permis de conduire et des Vietnamiens passer à vive allure pour éviter d'être arrêtés. Les premiers passaient sans embûches. Les seconds n'étaient même pas pris en chasse. Les touristes qui ne détenaient pas de permis valide pouvaient quant à eux s'en procurer un bon pour une journée en échange de quelques dollars.

Plus de peur que de mal avant de reprendre la randonnée...

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