Il y a deux façons de lire les guides de voyage, les blogues, les sites internet qui nous recommandent des lieux à visiter. Celle que je préfère consiste à regarder grossièrement les itinéraires proposés, cibler les surprises qu’on veut absolument se réserver ou éviter, et bien sûr, identifier un ou deux incontournables.
Pour moi, la lecture, la préparation, elle sert surtout à mettre en contexte. Pourrai-je rentrer à pied à mon hôtel si la noirceur est déjà tombée ou est-il préférable de prendre un taxi? Dois-je négocier le prix du taxi ou le chauffeur a-t-il l'obligation d'utiliser le compteur? Si je négocie, par combien dois-je diviser la demande du marchand pour payer un montant raisonnable?
Je m'informe sur le pourboire à laisser dans les restaurants, sur le niveau de français ou d'anglais de la population locale et sur les petites arnaques qu'on tentera forcément de me passer.
Il y a la deuxième façon, où on veut tellement maximiser chaque minute qu'on se lance dans des listes toutes plus longues les unes que les autres. À Paris, par exemple, on notera tous les incontournables : la tour Eiffel, l'Arc de triomphe, Notre-Dame-de-Paris, le Louvre, le musée d'Orsay, le Sacré-Coeur... Et on tentera de tout faire entrer en trois jours.
Parce que pendant qu'on y est, il faut bien voir toute la France : le Mont-Saint-Michel, Carcassonne, Lyon, les plages de Normandie... On fera la liste des trajets de train, de leur durée, et on choisira même avant de partir l'heure du convoi qu'on préfère. On réservera les hôtels aussi, ceux qui se trouvent dans le Routard, ou le Lonely, forcément, parce qu'on ne veut pas de mauvaise surprise.
Me voilà épuisé juste à y penser.
Ce qu'il y a de beau, à la première option, c'est la possibilité de débarquer là où les guides n'ont pas pris la peine de suggérer une escale. C'est vrai qu'en train, c'est moins tentant de débarquer au milieu de nulle part sans savoir si on trouvera un toit pour dormir ou si la ville présente le moindre intérêt. Au contraire, quand on se retrouve derrière un volant, il est fichtrement plus intéressant de s'arrêter là où il n'y a rien à voir... en théorie.
Puisque je parlais de la France, prenons l'exemple de Charlieu, une petite ville de moins de 4000 habitants quelque part dans la Loire. Si son abbaye est magnifique, on fait rapidement le tour de la commune quand on se promène à pied. Pourtant, on a bien envie de s'y arrêter, d'aller flâner dans un resto et de discuter avec quelques citoyens. On peut aussi prendre son temps dans un... café-coiffure...
Même genre d'expérience à Briennon, à quelques kilomètres de là, où la population est deux fois moins importante. On y trouve un canal, un musée, et simplement de quoi se « dégourdir l'oeil » à une vitesse beaucoup moins folle qu'à Paris.
Les États-Unis sont sans aucun doute une mine d'or pour le même type d'arrêts, parfois prolongés, qui répondent beaucoup mieux à la raison d'être des vacances qu'une course contre la montre dans un grand centre. Les vignobles de Solvang, par exemple, donnent le goût de s'attarder. Pourtant, en Californie, on vous recommandera Napa, à des lieues de là.
Les amateurs de montagnes connaissent probablement aussi Littleton au New Hampshire, un arrêt logique en route vers le mont Washington ou Lafayette. La liste des activités y est limitée. Pourtant, la brasserie Schilling, la rivière qui se trouve juste derrière et ses brocantes peuvent tenir occupé pour quelques heures à l'écart des grands centres.
Là où il n'y a apparemment rien à voir, il y a tout à découvrir.
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