Si M. Ghassemi-Shall est libre aujourd'hui, il le doit entre autres à sa conjointe, qui a attiré l'attention et s'est adjoint l'aide d'Amnistie internationale en 2011. L'homme, emprisonné en même temps que son frère Alborz, était notamment accusé d'espionnage sur la base d'un courriel que les deux hommes se seraient échangé. Alborz est décédé en prison en 2010.
« Quand ma conjointe a parlé avec Amnistie internationale, les campagnes ont commencé. Ils ont envoyé des lettres demandant ma libération. Je n'en ai reçu aucune, parce que je n'étais pas autorisé à recevoir du courrier, mais les autorités savaient. C'est une aide importante de démontrer aux autorités qu'il y a une campagne pour un prisonnier en particulier », explique Hamid Ghassemi-Shall, joint hier à sa maison de Toronto.
« Les autorités savent, quand Amnistie choisit un cas, qu'ils doivent faire attention. Ils savent très bien que la pression est forte. Personnellement, j'ai su qu'il y avait des démarches, même si elles ont commencé très tard. J'ai pu sentir que le comportement des gens de la prison était différent, en mieux. Je pouvais sentir qu'il se passait quelque chose sans que je sache exactement ce que c'était. »
Il y a eu les lettres, les manifestations à travers le Canada, mais aussi une déclaration du ministre des Affaires étrangères Lawrence Cannon en janvier 2011. Puis, le premier ministre Stephen Harper avait prévenu l'Iran que le monde entier était attentif à la situation de M. Ghassemi-Shall en 2012.
« La situation de chaque prisonnier est différente. J'étais dans le couloir de la mort. Mon cas était extrême. Quand on est placé dans une situation comme celle-là, on n'arrive plus à penser de façon rationnelle. Le cerveau se met à fonctionner différemment. On essaie de survivre. De savoir que des gens intervenaient en ma faveur m'a permis de penser de façon plus positive. Je ne me sentais plus seul. Quand tu te noies dans une mer où il n'y a rien à quoi te raccrocher, tu te laisses couler. Si tu aperçois un bateau, il y a un espoir de survie. La différence est énorme. »
Hamid Ghassemi-Shall voit la situation de Raif Badawi d'un oeil différent.
« Je savais que l'Iran utilisait parfois ses citoyens pour négocier. Je savais qu'un jour ils m'utiliseraient, mais je ne sais pas ce qui s'est produit en arrière-scène. M. Badawi n'est pas citoyen canadien, alors je ne vois pas comment le gouvernement s'impliquerait davantage. Ils ont mis quatre ans à bouger alors que je suis citoyen canadien...
« S'ils vont trop loin dans leurs représentations, les diplomates peuvent s'attirer d'autres problèmes. C'est pourquoi je crois que l'aide la plus importante que nous puissions recevoir est celle des organisations pour les droits de l'Homme. Je ne crois pas que M. Badawi saura tout ce qui se fait pour lui, mais au moins, la pression est là. Il y a un constat fort que les gens sont derrière lui. »
Sur la page d'Amnistie internationale, sa conjointe Antonella Mega déclare : « Ils ont essayé de me réduire au silence. Mais vous avez parlé pour moi. Votre voix m'a donné de la force quand tout autour de moi n'était que tourment et désespoir. La seule façon pour moi de vous remercier maintenant est de joindre ma voix aux vôtres pour tous ceux qui sont encore contraints au silence. »
M. Ghassemi-Shall et Mme Mega écrivent donc des lettres pour Amnistie internationale. « C'est la moindre des choses que nous pouvons faire. »