De plus, la deuxième séance de 50 coups de fouet qui devait être administrée au blogueur Raïf Badawi, vendredi, en Arabie saoudite, a été suspendue selon ce que rapporte l'organisation Amnistie internationale au Canada francophone.
Deux nouvelles qui ont exhalté la centaine de manifestants réunis comme chaque vendredi devant l'hôtel de ville de Sherbrooke afin de montrer leur appui au blogueur.
«On gagne du temps. Il y a beaucoup d'appuis qui continuent à rentrer pendant ce temps-là, donc les démarches diplomatiques continuent également » s'est réjoui la coordonnatrice du groupe Amnistie Internationale à Sherbrooke, Mireille Elchacar.
Si les troupes ont le sentiment d'avoir gagné une bataille, Mme Elchacar rappelle que la guerre, elle, ne l'est pas et qu'il est important de continuer le combat.
«Pour l'instant ça ne veut pas dire que la peine est annulée, donc il faut continuer nos efforts. Il n'y a pas de nouveau procès ou quoi que ce soit pour l'instant, mais on voit que ça commence à bouger donc c'est ce n'est pas le temps de lâcher, c'est le temps de continuer nos pressions. »
Des raisons médicales
La décision de reporter la flagelleation aurait été prise pour des raisons médicales.
«On sait que la dernière fois, lors de la première séance de flagellation, il avait vu un médecin auparavant. Ça peut nous paraître étrange, et en fait ce l'est, mais c'est pour s'assurer qu'il était en bon état physique pour recevoir les coups de fouet», a expliqué à La Presse Canadienne Mireille Elchacar.
«Cette fois-ci, on a procédé à ce même examen médical avant la séance de flagellation et le docteur a recommandé de reporter la séance à la semaine prochaine, puisque M. Badawi n'a pas cicatrisé depuis la dernière fois.»
Amnistie internationale a pu s'entretenir avec M. Badawi il y a quelques jours, après qu'il eut subi les 50 premiers coups de fouet prévus à sa peine d'un millier de coups. Il avait alors affirmé qu'il ne se croyait pas capable de résister à une deuxième séance du genre. En plus de ce châtiment, il a été condamné à une peine de 10 ans d'emprisonnement pour avoir critiqué les chefs religieux de l'Arabie saoudite sur son blogue.
«On pouvait évidemment s'attendre à ce qu'il ne se remette pas de 50 coups de bâtons et de fouets d'ici la semaine dernière, c'était évident», a souligné Mme Elchacar, qui a précisé que les autorités saoudiennes avaient confirmé le report des coups de fouet jusqu'à la semaine prochaine.
L'épouse et les enfants de M. Badawi demeurent à Sherbrooke depuis un peu plus d'un an, mais d'autres membres de sa famille sont toujours en Arabie saoudite. La soeur du blogueur était d'ailleurs présente à la première séance de flagellation, la semaine dernière.
Mme Elchacar a cependant indiqué qu'Amnistie n'avait pas communiqué directement avec M. Badawi, vendredi, de sorte qu'il lui était impossible de connaître exactement son état de santé.
«On veut savoir si c'est vraiment le cas, si sa santé est (vraiment) en très mauvais état, dans lequel cas on est très inquiet. Par contre, on se demande également si ce n'est pas une manière pour l'Arabie saoudite de céder aux pressions sans perdre la face», a-t-elle suggéré.
La pression est forte, en effet. Des vigiles de sympathie à la cause de Raïf Badawi ont été tenues dans plusieurs villes du Québec, mais aussi dans une vingtaine de pays dans le monde.
Plus tôt cette semaine, le ministre des Affaires étrangères, John Baird, a dénoncé le châtiment corporel infligé au blogueur saoudien. Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, a indiqué à l'ambassadeur de l'Arabie saoudite à Ottawa que la province était prête à accueillir M. Badawi s'il était libéré. L'ONU a également demandé la suspension de la condamnation de coups de fouet imposée au blogueur.
«Juste hier, on a reçu l'appui de la Suisse et de la Grande-Bretagne, donc on commence vraiment à avoir des appuis diplomatiques un peu partout», a ajouté Mme Elchacar.
L'agente d'Amnistie internationale a communiqué vendredi avec l'épouse de M. Badawi, Ensaf Haidar, à la suite de l'annonce du report des coups de fouet. Celle-ci demeure inquiète pour la santé de son mari, mais elle s'est d'abord et avant tout sentie soulagée de savoir qu'il serait épargné cette semaine.
«Elle est vraiment très soulagée, parce qu'elle, à court terme, elle était vraiment terrorisée par ces séances de flagellation. Elle est très contente, mais comme tout le monde elle est inquiète, elle ne sait pas ce qui se passe exactement avec la santé de son mari parce que depuis qu'il est dans un nouveau centre pénitentiaire, depuis deux semaines et demie, elle n'a pas pu lui parler.»
- Avec Caroline St-Pierre, La Presse Canadienne