On aura beau dire que les petites bibittes ne mangent pas les grosses, en Australie, quantité d’entre elles peuvent avoir votre peau. On imagine des scénarios horrifiants à la Jaws en fréquentant les plages où risquent effectivement de se trouver quelques requins. C’est sans compter les pieuvres et les méduses qui représentent aussi un danger.Dans le domaine de l’infiniment plus petit, il y a toutes ces araignées qu’on espère ne pas croiser. La veuve noire à dos rouge donne des frissons simplement à l’évocation de son nom. Et ce qu’il y a d’effrayant, c’est qu’on n’y connaît rien, nous, en araignées.
On retiendra bien sûr davantage les histoires d'horreur. À deux ou trois jours après mon arrivée dans le pays, je me suis installé sur le matelas du haut d'un lit superposé, dans un dortoir de Melbourne. La jeune femme qui dormait sur le matelas du dessous se souviendra longtemps de sa rencontre avec une araignée. La bestiole avait le corps plus gros qu'une pièce de deux dollars, jurait-elle.
Dans son lit, elle a été mordue par cette indésirable et a été quitte pour une plaie qui n'en finissait plus de saigner. Les médecins l'ont à peine rassurée, lui proposant de consulter de nouveau si sa situation s'aggravait, mais le temps lui a prouvé qu'elle s'en remettrait sans séquelles. Petite frousse!
Moins d'une semaine plus tard, dans un zoo de Ballarat, une de ces araignées venimeuses était gardée en captivité. Des photos montrant les dommages qu'elle peut causer donnaient envie de courir en direction opposée. Une morsure est, semble-t-il, synonyme d'amputation pour plusieurs victimes.
Et à travers tout ça, en plus du danger réel que posent les kangourous sur la route, ajoutez sept des dix serpents les plus venimeux au monde. On dit même qu'il s'agit du seul endroit sur la planète où on compte plus de serpents venimeux que de non venimeux. Ça donne le goût de se promener en forêt.
Ceci dit, dans la vraie de vraie vie, il y a toutes les chances du monde qu'on ne rencontre jamais un de ces animaux. Les décès liés aux requins, aux araignées ou aux serpents sont vraiment très rares. Comme le disait très bien un des mes guides en Australie : « Les requins tuent en moyenne un nageur par année et il y a déjà eu une attaque cette année, alors vous pouvez vous baigner sans crainte. »
Le même guide s'amusait à nous faire exagérer la puissance de nos pas quand nous nous aventurions hors des chemins battus. Les serpents ayant tendance à se tenir loin du brouhaha, il était préférable que nous provoquions le plus de vibrations possible en nous déplaçant.
Facile à dire quand on se circule en groupe. Moins évident quand on s'offre une randonnée en solo. À Sydney, il existe un joli sentier de marche qui prend son origine tout près de la plage Manly. On s'y rend de préférence en traversier, pour observer le célèbre Opéra à partir de la baie.
De Manly, on en a pour environ trois heures à arpenter les boisés, les falaises, les plages et quelques rues résidentielles. L'après-midi où je m'y suis rendu, je n'ai croisé qu'une poignée de randonneurs sur le chemin.
Bien perdu dans mes pensées, je marchais d'un bon pas quand j'ai vu s'agiter un buisson à quelques mètres devant moi. Coup d'oeil à gauche : pas un chat. Coup d'oeil à droite : personne.
À moins de deux mètres devant moi apparaît soudainement une grosse tête qui me semble avoir toutes les caractéristiques d'une tête de serpent. Premier réflexe : il est où mon appareil photo? Quand je raconterai cette histoire, il me faudra prouver que j'ai vraiment croisé un serpent.
Deuxième réflexe, environ une seconde après le premier : reculer doucement. Danger!
La bête a détalé d'un coup sec, exposant du même coup un corps énorme et quatre grosses pattes. Le serpent n'en était pas un. Tout indique qu'il s'agissait d'une espèce de varan. Pas de photo de la bête, évidemment.
La fois où je pensais avoir vu un serpent s'est finalement avérée sans danger. N'empêche, ce jour-là, j'ai terminé la randonnée à pas d'éléphants. On n'est jamais trop prudent.
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